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lundi 10 juin 2024

[EDITO] Macron dissout l’Assemblée ! Coup de Jarnac ou balle dans le pied ?


Capture d'écran
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Cela restera sans doute, dans son double quinquennat, comme le plus beau coup de théâtre de ce grand acteur : Emmanuel Macron, dont le parti vient d’être défait dans les grandes largeurs, a annoncé la dissolution de l’Assemblée.

Celle-ci prend effet dès ce dimanche 9 juin. Le premier tour des prochaines législatives aura lieu le 30 juin, le deuxième le 7 juillet. Pas le temps de se retourner.

À court terme, d’aucuns se réjouissent d’y voir un premier clou sur le cercueil de la loi Euthanasie. D’autres constatent, éberlués, que le ministre de l’Intérieur pourrait changer, deux jours avant l’ouverture des Jeux olympiques.

Mais à plus long terme, beaucoup y voient une botte de Jarnac. Du nom de ce coup historique, habile, déloyal et imprévu passé dans le langage populaire, mais aussi de la ville natale charentaise de Mitterrand. N’est-ce pas le roué Président socialiste qui a attiré, en son temps, Jacques Chirac dans le piège machiavélique de la cohabitation, l’usant, le cramant, le démonétisant… jusqu’à ce que le fringant Premier ministre ne devienne un fusible inoffensif et épuisé ?

On le sait, l’outil rhétorique contre le RN a changé. Depuis des mois, Emmanuel Macron et son gouvernement sont passés du champ sémantique de la peur - heures sombres, bruits de bottes et tutti quanti - à celui de l’impuissance : regardez donc Giorgia Meloni, elle ne parvient à rien, ou presque, en matière d'immigration !

Bien sûr, la manœuvre est osée et nombre de députés macronistes, louchant sur les scores du RN dans leur circonscription à l’occasion de ces européennes, grincent des dents. Mais plutôt que continuer, jusqu’en 2027, à s’embourber dans son impéritie à mesure que grimpe la cote de popularité du RN dans les sondages sur l’air du « Après tout, ceux-là, on ne les a jamais essayés ! », Emmanuel Macron fait le choix de dynamiter la Chambre des députés. Il ouvre ainsi l’option, in fine, d’une cohabitation avec le RN, puisque Jordan Bardella, il y a quelques mois, s’y était dit prêt. Avec l’espoir qu’un mélange d’inexpérience et d’État profond (appelons ainsi le Conseil d’État, le Conseil constitutionnel, les instances judiciaire en général et toutes les administrations qui se feront une joie sardonique de mettre des bâtons dans les roues) conduise le RN à se prendre les pieds dans le tapis, ruinant le rêve élyséen de Marine Le Pen.

Mais les paris se perdent, parfois. Et Emmanuel Macron devrait se méfier : la baraka, depuis quelque temps, semble l’avoir quitté. Si le sens de l’Histoire, comme on le prétend à gauche, existe, celui-ci semble tourner furieusement le dos au camp du mondialisme : le RN a fait plus de deux fois le score de Renaissance. Reconquête entre au Parlement européen. Et LR, dont le ventre mou a été siphonné par le macronisme, et qui a fait pour ces européennes une campagne très droitière, faiblit un peu mais se maintient néanmoins. Peu ou prou, 44 % des électeurs français veulent retourner la table. Pas qu’Emmanuel Macron y redresse le couvert pour une nouvelle petite tambouille électorale. Quand un coup de Jarnac manque sa cible, on appelle cela se tirer une balle dans le pied.

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