Le 26/07/2016
Aude de Kerros
Il supprime les images, fait disparaître le corps et le visage de la femme.
Le Maire de Londres, Sadiq Khan, a pris un arrêté municipal applicable à partir du mois de juillet, supprimant dans tous les moyens de transports urbains municipaux, les publicités susceptibles de créer chez les usagers « un problème de confiance en soi, lié à leurs corps ».
Ainsi, pour éviter des blessures narcissiques voici que, tout particulièrement, les Vénus blondes, minces, déliées, ensoleillées sont chassées de l’espace public.
Depuis longtemps, exclues des temples et des académies de peinture, elles subsistaient sur les affiches publicitaires en vendant soutiens gorges et produits solaires.
Sadiq Khan en faisant cela, caché sous le voile d’un discours prophylactique, impose l’iconoclasme de rigueur en Orient.
Il supprime les images, fait disparaître le corps et le visage de la femme.
Rusé, il invoque la compassion, l’hygiène publique pour occulter son forfait.
Son discours passe bien, les grands médias ne sont pas choqués ! (Ils entrevoient sans doute l’avantage des achats d’espace reportés sur les magazines !).
Il est vrai que les arguments avancés par le maire sont acceptables et familiers à la pensée postmoderne.
Il est conforme, entre autres, au discours qui accompagne « l’Art contemporain » (AC) depuis des décennies.
Sa doxa proclame : « la beauté est inégalitaire, peccamineuse ! »
Comme le Maire de Londres, le clergé de l’AC affirme que tout ce qui est esthétique, idéal, est « irréaliste », aliénant, « fasciste » même !
Détruire les images ou les déconstruire ?
Là où l’islam exige la disparition radicale de la figuration, l’AC exige sa « mise en abîme », sa déconstruction, sa critique acerbe.
Pour les deux, c’est le même jugement moral négatif, le même rejet de la nature.
La post modernité en Occident avait établi une règle : la beauté en général et celle du corps humain en particulier étaient mis au service de la publicité et de la consommation.
La déconstruction de la beauté, sa négation même, sont réservés à la fonction artistique.
Mais l’entrée en scène de la puissance islamique en terre européenne change la donne : son refus catégorique des images, celles de la femme en particulier, impose, si l’on veut « vivre ensemble » quelques renoncements…
Ainsi à Londres, s’est instauré un compromis réaliste grâce au double langage.
La France défend encore l’ancien modèle.
L’administration artistique persévère dans sa pratique du nihilisme iconoclaste institutionnel. Comme chaque année en juin, l’État offre l’espace de Versailles aux grandes marques globalisées de l’AC.
En 2015, Anish Kapoor y a procédé à la déconstruction de l’image idéale de la femme.
Son œuvre majeure, « le vagin de la reine », a représenté, sous la protection du ministère de la Culture, la noble figure de la reine en urinoir duchampien, un lieu d’aisance.
Il est vrai qu’aux gardiens de la doxa de la rue de Valois, les figures tutélaires de Vénus, de la Vierge dont la beauté célèbre l’amour, mais aussi le sens tragique de la vie et de la liberté, ont disparu de l’enseignement des Ecoles d’art, des cimaises des Centres d’AC, de la commande d’Art sacré pour les églises.
Une question se pose : l’iconoclasme post religieux fera-t-il en France, comme ce fut le cas à Byzance, le lit de l’invasion de l’Islam ?
Quand on compare les interviews qui accompagnent ces évènements, tant à Londres pour Sadiq Khan, qu’à Versailles pour l’invité de 2016, Olafur Eliasson, on constate que ces deux vedettes de l’actualité emploient les mêmes mots pour qualifier leur action : ils disent « donner vie à l’espace social », ils « créent de la réalité », ils « tissent des liens sociaux », ils élaborent vertueusement la « civilisation globale ».
Leur discours se veut « scientifique », il s’inspire des sciences sociales.
Après Marie, Vénus s’efface de nos yeux.
Elles disparaissent toutes deux dans un silence vertigineux.
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