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lundi 25 juillet 2016

Kersaudy - Quand arrachera-t-on les racines du terrorisme en France ?

 Le 25/07/2016
Par François Kersaudy





La foule niçoise a sifflé le Premier ministre Manuel Valls pour exprimer sa rage impuissante devant le crime d’un ennemi insaisissable. © DPA/ ANDREAS GEBERT


Les gouvernements de gauche et de droite ont eu leur lot d'attentats. Aucun n'a pris à temps les mesures adaptées à la situation, relève François Kersaudy.

Comment diable rendre ce gouvernement responsable de l'attentat de Nice – et de tous ceux qui l'ont précédé ?
Au siècle dernier, le célèbre philosophe géorgien Joseph Vissarionovitch Djougachvili[1] avait formulé le problème en ces termes : « Lorsqu'il se produit quelque chose de soudain et d'inattendu, vous pouvez être sûr que, dès le lendemain, cinquante imbéciles feront la queue devant votre bureau pour vous annoncer qu'ils l'avaient prévu ! »
 En l'occurrence, il s'agissait pour les politiciens d'opposition de récupérer l'événement à des fins électoralistes, avec les habituelles aberrations accompagnant ce genre d'exercice.
Pour le ministère de l'Intérieur, par contre, il fallait minimiser a posteriori les carences inévitables dans la protection d'une des 516 villes de France les plus vulnérables un soir de 14 Juillet.
Quant à la foule niçoise qui sifflait le Premier ministre, elle exprimait simplement une rage impuissante devant le crime d'un ennemi insaisissable, exactement comme la foule irakienne qui lançait des pierres contre la voiture du Premier ministre al-Abadi sur les lieux du sanglant attentat de Bagdad.
En fait, la vérité simple et triste, c'est que lorsque des fanatiques sont prêts à mourir pour faire un maximum de victimes innocentes, certains finiront toujours par réussir.
Que ce soit sous des gouvernements de gauche ou de droite ne fait rien à l'affaire : tous ont eu leur lot d'attentats destinés à semer l'épouvante, et aucun n'a pu prendre à temps les mesures adaptées à la situation.

Un étonnant quinquennat


On ne verra pas là un soudain accès d'affection à l'égard de l'actuel gouvernement.
 Comme la plupart des Français, je constate que François Hollande était fait pour être président comme DSK pour être archevêque ;
que le Premier ministre contrôle mal ses nerfs, ses ministres, sa majorité, sa politique, son ambition et sa communication ;
 que la ministre de l'Éducation est aussi fâchée avec l'enseignement qu'avec les accords du participe ; que le ministre des Affaires étrangères est très mal à l'aise dans ses nouvelles fonctions, au point de confondre Bachar el-Assad et Saddam Hussein ;
que la ministre du Travail connaît bien mal un Code du travail qu'elle va pourtant enrichir de 400 pages supplémentaires ;
 que le ministre de l'Intérieur, piqué au vif, se met à porter plainte contre une policière placée sous ses ordres ;
que le ministre de l'Économie joue sa propre partition en dénigrant la politique économique qu'il est chargé de mettre en oeuvre ;
 que l'ancienne compagne du chef de l'État n'a pu devenir ministre de l'Écologie qu'à la faveur du remplacement de la deuxième maîtresse du souverain par une troisième maîtresse en titre ;
 que le ministre délégué au Budget cachait son propre budget à l'étranger ;
que la ministre de la Justice avait autant d'antipathie pour les prisons que de sympathie pour les prisonniers ;
qu'une partie des députés socialistes étant idéologiquement hostile à l'autre partie, la majorité parlementaire s'est montrée hors d'état de légiférer rationnellement sur les questions essentielles de sécurité, du travail, de l'immigration et de l'incontinence budgétaire.

À l'évidence, il faudra aux futurs exégètes une habileté peu commune pour défendre un quinquennat aussi déjanté…

Contexte délétère

Il reste pourtant que le gouvernement ne peut agir que dans le cadre des institutions, des structures, des lois et des contraintes existantes, et que c'est sous cet éclairage qu'il faut considérer les événements de Nice.
Voici par exemple un citoyen tunisien bénéficiant d'un titre de séjour temporaire, défavorablement connu des services de police pour menaces, dégradations, vols, violences conjugales et agression ayant entraîné une condamnation judiciaire à six mois d'emprisonnement avec sursis.
 Dans plus de 130 pays au monde, de tels exploits auraient justifié une incarcération plus ou moins longue, suivie d'une expulsion immédiate vers le pays d'origine.

En France, c'est impossible : le maquis des lois, la pusillanimité ou la compassion des juges, le formalisme et l'engorgement des tribunaux, le foisonnement d'associations de défense du délinquant étranger, la culpabilité post-coloniale, l'antiracisme agressif et sélectif, le droit-de-l'hommisme idéologique, l'absence de contrôles aux frontières, l'hostilité à l'égard des forces de l'ordre, la suppression de la double peine à l'initiative du président Sarkozy, les directives européennes hors-sol, l'omniprésence de médias obnubilés par la quête du sensationnel, le tabou de l'amalgame et le culte de la bien-pensance – autant d'éléments qui se conjuguent de longue date pour assurer la pérennité et la prospérité en France de la délinquance comme de la criminalité crapuleuse et pseudo-religieuse.

Vue rétrospective

Cette délinquance et cette criminalité, ce n'est pas depuis quatre ans, mais bien depuis quarante ans qu'elles prospèrent et se multiplient dans quelque 700 zones de non-droit, laissées en marge de la République par l'angélisme, l'électoralisme, la démagogie, l'assistanat, l'immigration massive, les petites concessions, les grandes lâchetés, les petits trafics et les grandes émeutes.

C'est également depuis quarante ans que des juges, des professeurs, des syndicalistes, des éducateurs et autres idéologues d'extrême gauche se sont crus habilités à contester et à affronter l'État, afin de promouvoir une société utopique à leur convenance.

Ce n'est donc pas non plus d'hier, ni même d'avant-hier, que datent les prêches de haine dans les mosquées salafistes, les exactions commises par des enfants d'immigrés déracinés, les agressions de policiers et de pompiers aux abords des « zones sensibles », les effarantes lacunes de la politique pénale, les errements et les immixtions d'une justice capable de condamner l'administration du fait de la survenue d'actes de terrorisme, le vote de lois sécuritaires inapplicables ou inappliquées au sein d'une Assemblée nationale rongée par l'absentéisme, le clientélisme et les discordes partisanes, la gouvernance conçue comme une navigation à vue ponctuée de coups de communication en prévision des prochaines échéances électorales, ainsi que l'utilisation de l'armée de terre comme variable d'ajustement budgétaire et comme instrument de dissuasion illusoire à usage de propagande interne.

Tout ceci devrait suggérer en creux les éléments d'une politique efficace contre les racines du terrorisme en France.
La droite, dont les chefs sont actuellement obnubilés par la perspective de la primaire à venir, ne pourra concevoir un agenda sérieux en la matière qu'une fois cet obstacle surmonté.
 Dans l'intervalle, le tout récent rapport Fenech-Pietrasanta sur la lutte contre le terrorisme mériterait une tout autre attention de la part du président et du Premier ministre.

[1] Alias Staline.

Le Point

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