Thibault Raisse | Publié le 25.10.2014, 06h58
LP / Arnaud Journois
Palais de Justice de Paris, vendredi 24 octobre 2014. Deux mois de prison avec sursis ont été requis contre Arnaud, qui avait voulu défendre une collègue agressée en frappant son assaillant.
Il a mis fin à une agression sexuelle présumée.
Au passage, il a pris un coup sur le visage.
Son tort ?
Il a rendu deux fois les coups.
Pour son geste, Arnaud ne s'attendait pas à recevoir la Légion d'honneur.
Mais il ne s'attendait pas non plus à se retrouver dans un tribunal côté prévenu.
Ce grand brun élancé de 37 ans comparaissait hier devant la 10e chambre correctionnelle de Paris pour violences volontaires à l'encontre d'Emeric, 29 ans, ce dernier poursuivi durant la même audience pour l'agression sexuelle.
Arnaud s'était interposé en apercevant Emeric en train de caresser l'une de ses collègues, alors endormie, lors d'une fête en boîte de nuit.
Arnaud et Barbara, tous deux employés dans la même école d'art francilienne, participaient à une soirée étudiante le 30 mars 2013 dans une discothèque du quartier des Halles (Ier arrondissement).
« Vers 5 heures du matin, je me suis sentie fatiguée. Je suis allée me reposer sur une banquette dans une zone de la boîte privatisée pour l'occasion », raconte la jeune femme de 25 ans à la barre.
Deux heures plus tard, Arnaud aperçoit un homme en train d'enlacer sa collègue assoupie, une main sur son entrejambe.
« J'ai demandé à cet inconnu s'il la connaissait, il m'a répondu oui. Pour m'en assurer, je lui ai demandé quel était le prénom de cette femme. Il s'est alors levé, et m'a frappé avec sa paume », se souvient Arnaud.
L'imposant gaillard réplique alors en assénant deux coups de poing au visage de l'assaillant, avant que des vigiles ne séparent les deux hommes.
L'agresseur présumé, un barman au crâne rasé de corpulence équivalente à celle d'Arnaud, est expulsé de l'établissement.
Là, selon certains témoins, il se bagarre de nouveau avec des passants.
Arrivés sur les lieux, les pompiers le transportent à l'hôpital, grièvement blessé.
« Son pronostic vital était engagé, et les témoignages qui parlent de cette supposée deuxième bagarre sont flous », souligne Me Martine Bouccara, l'avocate d'Emeric.
Auditionné par la police, Arnaud reconnaît avoir frappé deux fois, mais sans excès.
Emeric, lui, nie toute agression sexuelle ou physique, tout en assurant n'avoir aucun souvenir précis de la soirée.
Les deux protagonistes n'ont jamais été condamnés pour violences, et ont une vie plutôt bien rangée.
Pour le procureur, « les attouchements, corroborés par plusieurs témoins, et le collant déchiré de la victime ne font aucun doute ».
Pas de quoi dédouaner le bon Samaritain.
« Ce n'est pas Zorro : sa réponse était disproportionnée, il y a d'autres façons de faire », poursuit la représentante du parquet.
Et elle réclame deux mois de prison avec sursis contre Arnaud et six mois de prison avec sursis et mise à l'épreuve contre Emeric.
« L'agression sexuelle est une invention pour justifier a posteriori les coups », balaye Me Bouccara, en demandant la relaxe de son client.
Quant à l'avocat d'Arnaud, il évoque « un cas parfait de légitime défense » et loue son acte de bravoure.
« A l'heure où l'on reproche aux passants, dans le métro ou ailleurs, de ne pas intervenir lorsqu'ils sont témoins d'une agression, son attitude est celle d'un citoyen exemplaire », justifie Me Vincent de La Morandière, en plaidant lui aussi la relaxe. Jugement le 21 novembre.
VIDEO. Au tribunal pour avoir tenté de s'opposer à une agression sexuelle
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