20 février 2016
François Hollande se livre en ce moment à un exercice tout à fait passionnant: il donne la démonstration, en grandeur et en temps réels, de la mécanique du gouvernement profond à l’oeuvre en France.
Les simagrées auxquels les dirigeants européens se livrent autour d’un possible « Brexit » lui en donnent l’occasion parfaite.
Hollande et la doxa du gouvernement profond
Au fondement de la mécanique hollandaise, on trouve l’inlassable énumération d’une doxa qui s’entretient toute seule à partir de quelques piliers dont toute remise en cause est taxée de populisme, de poujadisme ou de démagogie.
Dans ce salmigondis de certitudes toutes démenties par la plus évidente des réalités, l’idée de base est encore et toujours le principe générique selon lequel l’Europe comme construction communautaire, quelle qu’en soit la forme précise (et généralement la plus fantasmée), est une bonne chose.
La conséquence immédiatement tirée de cette certitude est qu’il faut forcément plus d’Europe, plutôt que moins d’Europe, et plus d’Europe au lieu de mieux d’Europe.
Sur France Inter, ce vendredi soir, François Hollande n’a pas dit autre chose:
« Je fais ce qu’il faut pour que nous puissions garder le Royaume-Uni dans l’Europe, mais à condition que l’Europe puisse avancer. » (…)
« Que la Grande-Bretagne reste ou non, l’Europe devra prendre des décisions au lendemain du référendum. » Le président français dit ainsi s’être rapproché de l’Allemagne pour ne « pas attendre la rupture, le Brexit » mais « prendre l’initiative ». Il rappelle son projet de s’appuyer sur un « noyau dur » européen.
Alors que la zone euro est économiquement malade, que les décisions agricoles et diplomatiques européennes mettent nos éleveurs à genoux, que la désaffection populaire pour l’Europe est visible et forte, François Hollande fore droit: il faut plus d’Europe.
Hollande et sa logique européenne oblique
Ce principe étant posé, il emporte tous les autres.
Première conséquence de la prémisse du raisonnement: il faut conserver la Grande-Bretagne coûte-que-coûte ou presque dans l’Union.
Personne ne juge bien entendu utile de souligner que la Grande-Bretagne menace de quitter l’Union à cause d’un afflux d’immigrés qu’elle souhaite pouvoir endiguer.
Face à cet afflux, la Grande-Bretagne reproche à l’Europe d’être impuissante… mais oublie de dire que l’élargissement à marche forcée de l’Union a toujours trouvé un soutien massif auprès des gouvernements britanniques successifs, qui se réjouissaient de l’impuissance européenne que ce mouvement artificiel engendrerait.
Donc, pour garder la Grande-Bretagne dans l’Union, il faut lui concéder le droit de mener une politique migratoire dérogatoire et exorbitante du droit commun.
Deuxième conséquence de la même prémisse: il faut sauver Schengen, car remettre Schengen en cause, c’est aller vers moins d’Europe, et nous, nous voulons plus d’Europe.
Le maintien de Schengen, comme le dit François Hollande, permet de ne pas noyer ni torpiller la Grèce qui reçoit des dizaines de milliers de migrants chaque mois.
« Si les frontières intérieures ferment, si Schengen n’est plus appliqué, ces réfugiés vont rester en Grèce, un pays qui a déjà des difficultés économiques considérables, qui va en faire quoi? »
Hollande et la finance européenne
Sur ce point, François Hollande ne dévoile pas le fond de la position européenne dictée par l’Allemagne et la très gracieuse Angela Merkel:
« Pas question de raisonner comme cela : on ne veut pas de ces murs qui risquent d’isoler la Grèce, de l’empêcher de faire ses réformes et d’effecteur ses remboursements à ses créanciers internationaux [dont l’Allemagne] », insistait une source diplomatique.
Autrement dit, le maintien de Schengen n’a rien à voir avec un calcul philanthropique.
Il est seulement destiné à éviter le torpillage de la Grèce, sas d’entrée des migrants, car la Grèce doit continuer à rembourser ses dettes.
Il faut donc lui maintenir la tête hors de l’eau.
Comprenez bien la logique ici: sauver Schengen, c’est éviter l’étouffement de la Grèce, c’est-à-dire rembourser les créanciers allemands de la Grèce.
Le politique migratoire européenne et sa politique d’ouverture des frontières intérieures est donc dictée par l’intérêt particulier des créanciers, notamment allemands, de la Grèce, et non par des considérations politiques.
Le candidat Hollande avait déclaré la guerre à la finance.
Il en est aujourd’hui un brillant mercenaire.
Hollande et la politique migratoire allemande
Autre prémisse du raisonnement, annoncée par Hollande au micro de France Inter:
« L’Allemagne ne pourra pas accueillir encore des dizaines de milliers de réfugiés. »
Autrement dit, Merkel a ouvert les vannes, mais c’est aux autres de les refermer aujourd’hui.
Face à l’afflux de migrants provoqué par les propos irresponsables d’Angela sur son million de réfugiés en 2015, l’Allemagne est dépassée et touche ses limites.
Il faut ici revenir aux prémisses du raisonnement pour suivre la logique en creux.
L’Allemagne ne peut plus accueillir de migrants, mais il faut plus d’Europe, donc on ne peut pas contraindre la Grande-Bretagne à en accepter (notamment ceux de Calais), sinon c’est le Brexit.
Mais les pays sur la route de l’Allemagne ne doivent pas fermer leurs frontières, puisqu’il faut plus d’Europe et surtout ne pas torpiller la Grèce dont les remboursements sont vitaux pour les banques allemandes en difficulté.
Donc, la question subliminale qui n’est pas posée mais dont on comprend peu à peu la réponse est: qui va soulager l’Allemagne de tous ces migrants qu’on ne peut stocker en Grèce?
Hollande et ses non-dits sur les migrants
La France pardi, mais aussi l’Autriche, la Hongrie, et tous les autres…
L’Allemagne ayant payé son tribut, la Grande-Bretagne n’en voulant plus, tous les autres pays européens doivent participer à l’effort.
Et tant pis si, comme la France, la minorité arabo-musulmane est déjà la plus importante d’Europe, en pourcentage et en nombre.
Il en va de la doxa imposée par le gouvernement profond.
Bien entendu, cette politique va faire l’objet d’une approche scientifique de haute volée qui n’a rien à voir avec les vieux spectres qui ont failli tuer l’Europe dans les années 40.
On lira par exemple avec effroi cette phrase en apparence sybilline:
Jeudi, les polices de Macédoine, de Serbie, de Croatie, de Slovénie et d’Autriche ont, en tout cas, décidé de mettre en place un enregistrement commun de réfugiés arrivant de Grèce en Macédoine et d’organiser leur transport vers l’Autriche. Il s’agira notamment de déterminer, à partir de données biométriques, s’ils viennent de pays considérés comme dangereux (Afghanistan, Irak ou Syrie).
Traduction: les pays limitrophes de la Grèce vont revenir aux bons critères raciaux pour trier ceux qui ont le droit d’entrer sur leur territoire, et ceux qui restent en Grèce.
Mais bien entendu, tout ceci se fera au nom des droits de l’homme et du progrès bienfaiteur qui inspire les pays européens.
Bref, les premiers jalons d’une arrivée massive de migrants triés sur le volet en France sont posés, au nom de la doxa européiste.
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