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dimanche 16 novembre 2014

Marseille : aux Puces, l'autre parking volé.

 Samedi 15/11/2014 à 15H14 Marseille 

 
Faits divers - Justice - Actualités - Marseille : aux Puces, l'autre parking volé  - 1
 
Le dimanche, les "placiers" de la place Tarquin ne se cachent pas. "Aujourd'hui, c'est 3€ pour se garer"... Photos DTA

 
 Qu'est-ce qui se passe si je ne paye pas ? On va casser ma voiture ?" "Ah, ça, je ne sais pas"...
 
 
Le dimanche au marché aux Puces, le stationnement se monnaye illégalement.
 Comme à la Porte d'Aix en 2011
On le repère facilement.
 Assis sur son banc, capuche de sweat-shirt relevée pour se protéger de la pluie, Bilel (1) "attend le client".
C'est comme ça tous les dimanches, depuis "deux, trois ans peut-être".
Il a 15 ans, un visage poupon de gamin un peu trop gourmand.
Une voiture entre sur l'anneau de la place Tarquin (15e), il se lève lourdement et hèle le conducteur : "Tu veux te garer ? C'est 3."Celui-ci râle un peu : "Eh, la dernière fois c'était 2 !" Bilel hausse les épaules. "C'est comme ça."
Ce dimanche matin, dans le quartier du marché aux Puces, on peut choisir : tenter sa chance -infime- et chercher une place de stationnement libre entre la place Cazemajou et celle des Abattoirs, à Saint-Louis.
Ou donner ses 3€ au petit placier de Tarquin.
Une place tout ce qu'il y a de publique, sans barrières ni rien : le bureau de Bilel. "J'ai commencé en regardant les grands faire, raconte-t-il.
 Quand ils sont partis, parce que c'était plus assez intéressant pour eux, je suis venu reprendre le parking."
Là, c'est un "mauvais jour" pluvieux, mais il espère se faire "100 quand même. L'été, c'est facilement 150".

Un marché sauvage de l'occasion

Il empoche la monnaie dans sa petite sacoche. Un copain plus âgé, en doudoune bleu canard, vient faire l'appoint : les garçons sont organisés.
 Lui "tient" le petit parking situé un peu plus bas, boulevard Oddo, un site délaissé par Vinci et MPM. "Qu'est-ce qui se passe si les gens veulent pas payer ?" "Ah, ça, je sais pas", glisse Bilal avec un sourire entendu.
L'autre se marre.
"En gros tu te fais casser la voiture, c'est ça ?" Les minots s'envoient des clins d'oeil.
Il faut savoir créer le besoin...
Tout près de là, à côté de la petite cité-jardin du chemin de la Madrague-Ville, sur un autre parking "gratuit-payant" la réponse, sous forme de verre brisé au sol, est limpide.
Des Crottes à la Cabucelle, cette privatisation de l'espace -fut-il lui-même public ou privé, mais vacant- est chose commune le week-end.
Certes, le terrain situé près de Renault, sur lequel s'est tenu durant des années un marché sauvage de l'occasion, a bien été clos et réservé ces dernières années à Eiffage, qui y stockait le matériel nécessaire à la construction des voies du BHNS.
Lundi, il est revenu officiellement dans le giron de MPM et de son délégataire, Vinci Park, dans l'attente d'une affectation pérenne par Euroméditerranée.

"Tu donnes 2, 3€, comme tu veux"

Mais un peu plus loin, ce serait le parking, pourtant clos le dimanche, du magasin Dia, qui servirait souvent de gagne-pain aux jeunes du quartier, selon les témoignages recueillis.
"Allez voir vers Cap Pinède, y en a d'autres encore", nous indique le copain de Bilel.
Là, c'est la foire d'empoigne.
Joyeuse, la foire : "Tu cherches une place ? J'ai ce qu'il faut", nous lance un homme barbu dépenaillé, près du terrain du loueur Hertz, comme il nous vendrait des tomates.
"Tu donnes 2, 3, comme tu veux", tente-t-il pour nous convaincre.

"Son" parking est un renfoncement entre deux entreprises clôturées.
 Il y reste des places, chose incroyable un dimanche à 11h .

 Alors que les Puces attirent chaque week-end des dizaines de milliers de visiteurs, rappelons qu'il n'existe aucun parking digne de ce nom dans le secteur.

Sous la passerelle du bd Capitaine-Gèze, deux policiers semblent dépassés par l'ampleur du flux : les vendeurs à la sauvette étendent leurs stands de misère jusqu'à l'usine Haribo.
 Du jamais vu.
Dans ce chaos, le racket au stationnement est une goutte d'eau.
 Bilel le confirme, "la police ne s'occupe jamais de nous".

Impuissant, l'adjoint de secteur PS Rachid Tighilt soupire : "S'ils mettaient cette énergie, cette ingéniosité dans quelque chose de légal, au moins, ces gamins. La misère est vraiment en train de tout emporter dans nos quartiers."

(1) Le prénom a été changé.



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