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samedi 15 juin 2024

[LIVRE] « La face cachée des JO », chronique d’un désastre annoncé


 

Dix-huit petits jours : c'est le laps de temps très court qui s'écoulera entre la nomination du futur gouvernement, au lendemain du 7 juillet, et le début de la grande « fête populaire » des Jeux olympiques 2024. Un événement à haut risque sur tous les fronts, si l'on en croit les révélations de Sébastien Chesbeuf, qui a œuvré pendant six ans au sein du Comité d'organisation Paris 2024 avant de s'en faire congédier (licenciement reconnu comme « abusif et sans cause réelle et sérieuse » par le conseil des prud'hommes) pour avoir trop alerté et trop posé de questions demeurées sans réponses. Avec Thierry Vildary, journaliste d'investigation au service des sports de France Télévisions, et Jean-François Laville, journaliste sportif, il signe une inquiétante enquête sur les coulisses de l'événement : La Face cachée des JO. Âmes inquiètes s'abstenir !

Des décisions erratiques

Au fil des pages, le lecteur découvre que les nuages s'amoncellent autour de l'organisation de l'événement : désorganisation des équipes du Comité Paris 2024, opacité des décisions, inertie des pouvoirs publics, manque de personnels pour sécuriser, absence d'études d'impact (en Polynésie pour les épreuves de surf), choix incongrus et coûteux (la délocalisation des épreuves de handball et de basket dans un stade lillois partiellement à ciel ouvert, mais climatisé malgré tout, pose question) - la coupe est rapidement pleine. D'autant que les risques sécuritaires qui pèsent sur la cérémonie d'ouverture pourraient bien, de l'avis des auteurs, transformer la grande fête en « affaire d'État ».

Cérémonie d'ouverture : une affaire d'État ? 

Preuve qu'au départ les organisateurs ont eu les yeux plus gros que le ventre et que même Emmanuel Macron n'écarte plus le pire, la jauge a été revue à la baisse. Ils ne seront, finalement, plus que 320.000 invités « triés sur le volet » (ils devaient être un million, puis 600.000) à s'entasser sur les douze kilomètres de berges de la Seine (dont la solidité, aux dires des trois auteurs, est motif d'inquiétude car les berges sont destinées à supporter le poids des tribunes et celui des spectateurs) pour assister à la grand-messe. Un défi pour les équipes chargées de la sécurité, hantées par une menace terroriste estimée « sérieuse » . Les témoignages d'experts sécurité interrogés sur la faisabilité de la cérémonie d'ouverture rapportés dans l'ouvrage laissent pantois : « Entre très compliqué et impossible », estime l'un, tandis que l'autre avoue : « De toute façon, j’ai interdit à ma famille d’assister à la cérémonie d’ouverture. » À quelques jours du coup d'envoi des JO, l'angoissante déclaration d'Alain Bauer - « La cérémonie d'ouverture des JO de Paris 2024 est une folie criminelle » -, entendue il y a déjà deux ans, n'a pas pris une ride.

De toute évidence, les JO ont déjà trahi bien des promesses : peu écologiques (voir les dommages irréparables causés à la précieuse barre de corail polynésienne pour le surf), entourés d'un halo de soupçons de corruption et trafic d'influence (qui ont mené le parquet national financier à perquisitionner le siège du Comité Paris 2024 à deux reprises, en juin et octobre 2023) et, contrairement à ce qu'annoncé par Anne Hidalgo ( « aucun impact sur la vie des Franciliens »), un cauchemar dès le mois de juin pour les Parisiens.

Les vrais perdants : les contribuables

Une certitude : la facture sera salée, les budgets ayant explosé. Le coût est estimé à plus de 9 milliards d'euros (il était annoncé à 6 milliards) au bas mot, car « pour l'heure, tout n'a pas encore été compté, facturé et additionné », explique  Capital . Outre sa participation convenue à hauteur de 3 milliards d'euros (« a minima », estime la Cour de comptes, Pierre Moscovici, son président, évoquant une fourchette plutôt large allant jusqu'à 5 milliards), l'État devra se débrouiller pour trouver les financements pour la sécurité, les transports et une compensation pour les commerçants.

Ce n'est pas tout : l'affaire a été bouclée fort discrètement par une poignée de députés à l'Assemblée nationale. Par un amendement à la loi de Finances 2022 (art. 158), les parlementaires ont fixé la garantie de l'État, pour l'emprunt contracté par le Comité olympique en cas de dépassement de budget, à la modeste somme de 3 milliards d'euros. Un chiffre quasiment triplé en une nuit, car l'engagement initial était de 1,2 milliard.

Quel que soit le gouvernement choisi par les Français dans un mois, avec les JO 2024 ce sera le baptême du feu. La planche JO a été bien savonnée par Anne Hidalgo et Emmanuel Macron.

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