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mardi 6 octobre 2020

Santé présidentielle : pourquoi demander plus à Trump qu’à Mitterrand ou Kennedy ?


À moins d’un mois de l’élection présidentielle, le coronavirus a rattrapé  ; ce qui pourrait bien lui permettre de faire de même de son retard sondagier vis-à-vis de Joe Biden. 

Une mauvaise nouvelle, donc, pour le Parti démocrate qui voit les cartes rebattues de manière inattendue, tel qu’analysé en ces colonnes par André Archimbaud, qui évoque « le mouvement empathique » créé par ce diagnostic.

Les médias auront tôt fait de stigmatiser, si ce n’est déjà fait, l’opportunisme et la rouerie d’un président n’hésitant pas à jouer de sa maladie, à la mettre en scène même, afin de resserrer les rangs de son électorat et d’émouvoir les indécis. On rappellera que ce ne serait pas la première fois qu’un président agirait de la sorte.

John Fitzgerald Kennedy n’avait-il pas fait de sa bonne santé et de son énergie juvénile des arguments électoraux ? En fait, c’était tout le contraire. Il portait un corset dorsal et, en privé, devait souvent s’aider de béquilles pour marcher. Souffrant de la maladie d’Addison, il était en permanence gavé de corticoïdes, de cortisone, de novocaïne et d’amphétamines. À côté, Keith Richards, des Rolling Stones, c’était un mormon.

On notera encore qu’il se prétendait père de famille modèle, alors qu’il était un cavaleur priapique, qu’il portait son honnêteté en bandoulière, alors qu’il était issu d’une dynastie de mafieux. Donald Trump n’a donc rien inventé et il est au moins à mettre à son crédit qu’il ne s’est jamais fait passer pour enfant de Marie.

Plus près de nous, dans le temps et la géographie, il y a évidemment François Mitterrand qui, avant le 10 mai 1981, jurait ses grands dieux n’avoir jamais consulté de médecins pour des maladies graves, alors que le cancer commençait déjà à le ronger. Un cancer qu’il n’hésita pas à, lui aussi, mettre en scène en 1992, lors du référendum de Maastricht.

Il savait que le résultat du vote serait serré et que celui des personnes âgées serait décisif, puisque généralement plus assidues aux urnes et sensibles à la fois à la construction européenne et aux misères de la vieillerie. D’un point de vue éthique, c’était assez moyen, quoique politiquement fort efficace.

On ne sait si Donald Trump connaît ses classiques, mais il paraît emprunter les chemins de traverse de ces deux devanciers en jouant, à son tour, du mal qui le frappe. Et Le Monde de ce lundi 5 octobre de pointer du doigt un « optimisme affiché brouillé par une communication erratique ». Il est vrai que cette dernière semble alterner le chaud et le froid. Mais il n’est pas non plus impossible que, derrière une improvisation de façade, tout cela soit parfaitement scénarisé.

Ainsi, samedi dernier, Mark Meadows, secrétaire général de la Maison-Blanche, évoque de « légers symptômes », ce qui est tout d’abord confirmé par le médecin attitré de Donald Trump, Sean Conley, qui affirme que « tout va très bien » et que les symptômes en question se « réduisent et s’améliorent ». Puis, le lendemain, le même Mark Meadows se fait nettement plus alarmant : « Les signes vitaux du président, ces dernières 24 heures, ont été très inquiétants et les 48 prochaines heures seront critiques en termes de soins. Nous n’avons toujours pas emprunté une voie claire vers le rétablissement. » Suspense…

Dans le même temps, Donald Trump se fait photographier en train de travailler dans le Bureau ovale, la mine pénétrée de sa fonction tout en assurant, dans une vidéo : « J’ai beaucoup appris sur le Covid, je l’ai appris en faisant l’expérience moi-même, c’est l’école de la vie. » Coupez ! Elle est en boîte, comme on dit à Hollywood.

Résultat : les Américains, démocrates, républicains et abstentionnistes confondus, sont désormais suspendus à la santé de ce président qui lutte contre le mal. On ne parle plus du reste, mais seulement de sa geste. C’est le héros du jour et, aux USA, on aime les héros. Surtout lorsqu’ils gagnent à la fin du film. Pas mal joué, Donald !

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