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lundi 5 octobre 2020

 
 
 

Samedi 3 octobre, le juge du tribunal civil de Catane, en Sicile, a rendu une décision de renvoi du procès intenté à . Ce geste, fréquent et technique, revêt ici une singulière importance.

Rappelons que l’ancien ministre de l’Intérieur italien est poursuivi, suite à des plaintes de diverses organisations politiques de gauche pour séquestration de personnes après l’interdiction signifiée au navire militaire Gregoretti de débarquer les envahisseurs africains qu’il avait chargés à son bord.

Le parquet, se fondant sur des éléments de droit, avait demandé l’abandon des poursuites, ce qui fut refusé. L’accusé étant sénateur, il a donc fallu lever son immunité parlementaire, geste politique s’inscrivant dans la perspective des élections qui viennent d’avoir lieu et des autres à venir, législatives mais aussi municipales, le dimanche 4 octobre. Autant dire que le contexte se prêtait à une instrumentalisation maximum.

Afin de rééquilibrer la pression médiatique, la Lega a organisé des réunions publiques dans tout le sud-est de l’île. Pour ajouter à la tension, le gouvernement avait dépêché 500 hommes des forces de l’ordre, ce qui est un déploiement assez rare en . L’extrême gauche, de son côté, s’était mobilisée. Chacun retenait son souffle, Salvini pouvant être condamné à quinze ans de prison.

Insensible au battage, le juge de l’audience préliminaire (GUP), , a renvoyé tout le monde chez soi, considérant que la décision avait dû être entérinée par d’autres membres du gouvernement de l’époque, et qu’il désirait les entendre. Ainsi, l’actuel président du Conseil Giuseppe Conte, l’actuel ministre des Affaires étrangères Luigi Di Maio et quelques autres opposants à Salvini sont convoqués, fin novembre et début décembre.

Qui est donc ce juge de 68 ans, à la carrière finissante, qui ajoute un épisode inattendu à la série ? C’est un local, né sur les pentes de l’Etna, gravissant tous les degrés de la magistrature en Sicile, connu pour avoir été le premier à utiliser de nouvelles incriminations contre les mafieux, y compris l’artificier de la bombe qui tua le juge Falcone ; autant dire que c’est un solide. Il a aussi instruit contre l’État italien défaillant lors d’une éruption de l’Etna, puis contre des « cols blancs » et des politiciens (y compris du PCI) pour des affaires de concussion et de liens mafieux. Bref, un homme qui n’a pas peur de se faire des ennemis ! Tant et si bien qu’on l’envoya réfléchir à sa curiosité maladive à Trieste, à 1.000 km de sa Sicile natale, et là, qu’arriva-t-il ? Il enquêta sur les liens entre terroristes, groupes anarchistes et mafia italo-albanaise… On prétexta que sa sécurité n’était plus assurée pour le renvoyer à Catane.

Nunzio Sarpietro agit-il sur ordre pour gagner du temps et pourrir la situation lors des prochains scrutins ? Il ne semble pas correspondre au profil des juges politisés auquel nous sommes habitués en France, d’autant que Salvini a, durant son passage à l’Intérieur, fortement accentué la lutte anti-mafia.

Très finement, Matteo Salvini, à la question du juge lui demandant si ses anciens collègues (ministres centre gauche et M5S) étaient « coupables comme lui », a répondu « Sono innocenti anche loro » (« Ils sont aussi innocents »).

Mais le répit pourrait être de courte durée, un autre procès identique à Palerme se profile.

 

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