Je me suis libéré de cet esclavage. Il y a presque un quart de siècle.
Je me suis libéré de cet esclavage.
Il y a presque un quart de siècle.
J’y fus soumis durant presque un quart de siècle.
Le maître esclavagiste se nommait Nicot et, bien que des centaines de millions d’enfumés soient morts de sa tyrannie en crachant bronches et poumons, nul n’a encore réussi à lui faire endosser son habit de criminel contre l’humanité qu’il est en réalité.
En renonçant à mon statut d’esclave, j’ai compris, en lisant le papier de Nicolas Gauthier, que je suis devenu l’ennemi mortel des buralistes.
Le plus impitoyable ennemi de ces derniers n’étant pas l’État maquereau et ses augmentations du prix du paquet, contrairement à ce qu’il pense, mais le non-fumeur.
Pendant toute ma vie d’enfumé, je me demandais avec angoisse comment, un jour, je pourrais m’arrêter si la nécessité s’en faisait sentir, mais c’était sans oublier une lâcheté naturelle qui me fait tenir à la vie.
Un jour, en effet, mon corps adressa un message sans équivoque à mon esprit, que l’on peut résumer comme suit : tu arrêtes ou je démissionne.
Ma lâcheté naturelle fit le reste.
Je devins ainsi, du jour au lendemain, l’ennemi le plus mortel des buralistes, de l’État maquereau, complice du criminel contre l’humanité et de l’industrie du tabac, l’outil de travail dudit criminel (non de monsieur Gauthier, j’espère).
Bien m’en prit sans doute, et nul ne peut dire si je taperais ces lignes aujourd’hui si j’avais continué à empuantir l’atmosphère avec mes deux paquets quotidiens de cette merde – appelons les choses par leur nom.
De peur de bientôt ne plus vivre, donc, j’arrêtai du jour au lendemain en nourrissant une sourde haine contre mon désormais ex-maître esclavagiste (et non pas contre mes compagnons d’infortune, enfumés et covictimes), le susnommé Nicot : elle me permit de définitivement m’affranchir de sa merde sans nom.
Je me suis enfumé pendant à peu près vingt-trois années, dont les dix dernières à raison de quarante clopes quotidiennes.
Mon aventure tabagique avait commencé au sortir des Trente Glorieuses, dans la campagne française bénie, au fin fond de l’Yonne – un bled du nom de Marchais-Beton.
L’on y trouvait encore ces sortes de cavernes d’Ali Baba dans les arrière-boutiques des bistrots, au rayon tabac, ces petites BD de Blek, Panache, Ivanhoe, Oliver ou Jim Canada.
C’est là que mes bronches découvrirent bientôt le charme si désuet autant que clandestin des Gauloises Caporal sans filtre ou autres Celtique Caporal Ordinaire.
Bien entendu, Monsanto, ce n’est pas forcément bon pour la santé non plus, ni se faire rouler dessus par une bagnole, ou se prendre un platane, ou se choper une cirrhose, ou que sais-je, et bien sûr « vivre tue », comme dirait Nicolas Gauthier…
Avec Nicot, Monsanto, les platanes et la cirrhose, vivre tue sans doute plus vite encore ?
Passons de façon pragmatique aux chiffres.
Sur mes vingt-trois années tabagiques, je puis dire avec certitude avoir fumé au moins un paquet par jour durant dix ans et deux paquets par jour durant une autre décennie.
Soit respectivement 3.650 et 7.300 paquets pour un total de 10.950 paquets, ce qui fait un total de 219.000 cigarettes.
Si l’on fixe le prix moyen du paquet de clopes sur vingt ans à – je ne sais pas, moi – cinq euros (?), j’aurai donc dépensé à vue de nez 10.950 x 5 = 54.750 euros (359.136 francs, pour les nostalgiques) pour cette merde.
Que dire de plus ?
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