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lundi 4 janvier 2016

Manif pour tous : le ministère de l'Intérieur encore rappelé à l'ordre



Publié le | lepoint.fr


Une seconde décision du Défenseur des droits soulignant des "mesures manifestement disproportionnées" face aux manifestants opposés au vote de la loi Taubira.  © DR

Dans une nouvelle décision, le Défenseur des droits condamne l'usage disproportionné de la force à l'encontre de manifestants opposés au mariage pour tous.

Ils n'avaient donc pas rêvé...
 Plus de deux ans après les faits, le Défenseur des droits vient de rendre un nouvel arrêt condamnant les excès de répression policière dont ont été victimes les militants de la Manif pour tous, le mouvement d'opposition au vote de la loi sur le mariage homosexuel, en 2013.
Dans cet arrêt daté du 25 novembre 2015, mais étonnamment rendu public en pleine trêve des confiseurs, fin décembre, Jacques Toubon tranche sur le recours introduit par les « mères veilleuses », une quarantaine de mères de famille « encagées » durant plus de deux heures le 9 décembre 2013, alors qu'elles manifestaient de façon pacifique près du mur pour la Paix, au Champ-de-Mars, à Paris.
Le Défenseur des droits a conclu que « la mesure était manifestement disproportionnée, au regard de sa durée et du risque quasi inexistant de trouble que les manifestantes étaient susceptibles de causer à l'ordre public. »
 « Le ministère de l'Intérieur doit s'expliquer et en tirer les conséquences, souligne l'avocat du collectif, maître Henri de Beauregard.
L'État est rappelé à l'ordre et tenu de fournir des explications et des éléments sur ce qu'il envisage de mettre en oeuvre pour que les choses changent à l'avenir. »

Éviter les recours abusifs à l'encagement

Il s'agit là de la seconde décision rendue dans le même sens par le Défenseur des droits, après celle de l'an passé concernant une manifestante interpellée pour avoir agité des fanions de la Manif pour tous sur l'avenue des Champs-Élysées, sur le passage de François Hollande, le 14 juillet 2013.
 Les forces de l'ordre étaient allées jusqu'à fouiller la poussette de son enfant.
  Le Défenseur des droits avait alors rappelé que « l'interdiction générale faite au public de détenir tout autre support portant une revendication qui ne représente pas une menace avérée et sérieuse pour la sécurité du public n'est pas admissible ».
Avec cet arrêt relatif au recours introduit par les « mères veilleuses », Jacques Toubon a une nouvelle fois appelé à ce « qu'une réflexion soit engagée sur la mise en oeuvre de cette technique de maîtrise des foules pour éviter tout recours abusif à cette pratique qui pourrait donner lieu à des limitations abusives à des libertés publiques. »
 Le ministre de l'Intérieur a deux mois pour rendre compte des suites données aux recommandations.
« De fait, cette décision vient évidemment tard, mais elle permet de dire aux gens que ce qu'ils ont ressenti était vrai, estime maître Henri de Beauregard.
Ce sont des événements dont ont été victimes plusieurs milliers de personnes.
 Plusieurs centaines ont fait l'objet de mesures injustifiées ou totalement disproportionnées.
On leur dit : Vous n'avez pas rêvé, et ce dont vous avez été victime était anormal.
Même s'il ne s'agit pas d'une décision judiciaire, mais du Défenseur des droits, ce n'est pas anodin pour autant.
Il s'agit d'une autorité constitutionnelle, dont le rang n'est pas inférieur à celui d'un tribunal de grande instance.
Je trouve par ailleurs intéressant que ce mouvement que ses opposants ont taxé d'adversaire des libertés soit celui par lequel auront été obtenues les décisions les plus nettes en termes de définition des libertés publiques.
Comme quoi les meilleurs défenseurs des droits et libertés ne sont pas toujours ceux qui les brandissent et les arborent à longueur de journée… »

Une question de principe et de libertés

« Je ne désespère pas non plus que cela s'inscrive dans un mouvement, qui amène d'autres décisions et condamnations. Je pense notamment aux veilleurs, victimes d'une répression particulièrement disproportionnée », confie l'avocat du collectif.
Deux plaintes sont encore en cours d'examen pour des « encagements » de sympathisants LMPT, en marge de déplacements présidentiels à La Roche-sur-Yon, où trente personnes avaient été encagées plusieurs heures durant par un cordon de CRS, et à Nancy.
« Indépendamment de la cause défendue se posent des questions de droit : comment arbitrer entre la légitime défense de la dignité de la fonction présidentielle et l'expression libre des opinions ?

 Pendant que le président se faisait photographier prenant le café chez Lucette à Nancy, le 29 octobre dernier, un homme avait été retenu au commissariat durant deux heures.
Soit on tolère que les déplacements présidentiels ne soient que des événements de communication, avec des acteurs et des militants, soit on accepte l'expression des citoyens. »

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