DÉCRYPTAGE - Soutenu par Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan, le cofondateur de Reporters sans frontières rebat les cartes de la politique au point d'apparaître comme un candidat sérieux à la mairie de Béziers.
Source Le Figaro Magazine.
Et tu vas m'expliquer qu'à Béziers, le problème, ce sont les Norvégiennes qui déambulent en short trop court et les Suédoises en topless?
Moi, je te le dis, à force de tourner autour du pot, à force de refuser de nommer les problèmes quand tu ne te mets pas carrément des œillères pour ne pas les voir, tu te mets hors course.
Ton discours, je te le dis, ne passe plus.»
L'homme à qui Robert Ménard fait la leçon à la terrasse d'un restaurant en plein cœur de l'été est un ami de longue date.
Il n'est autre que Jean-Michel Du Plaa, la future tête de liste du Parti socialiste pour les prochaines municipales.
Cinq mois plus tard, celui qui se fait fort d'«appeler un chat un chat, et de ne pas changer de discours en fonction de son interlocuteur» a déjà en partie gagné son pari.
Un sondage crédite la liste de Robert Ménard, soutenue par le Front national, de 35 % d'intentions de voix au premier tour quand Du Plaa (PS) plafonne à 18 %.
Ce sont 10 points de mieux que le score de Marine Le Pen à la présidentielle.
Le cofondateur de Reporters sans frontières fait encore plus fort: il talonne la liste UMP conduite par le député Elie Aboud, l'héritier de Raymond Couderc, l'inamovible maire de Béziers depuis 1995, qui était réélu en 2008 dès le premier tour avec plus de 52 % des voix.
Voilà pour l'état des lieux: «Une sorte de démenti, analyse Robert Ménard, à tous ceux qui prédisaient que notre alliance avec le FN serait le péché originel de notre liste.» Pour lui, ce n'est pas une surprise.
«Il n'y a plus que le mundillo politique pour s'en étonner.
A Béziers, il n'est presque plus personne pour tordre le nez à l'évocation du FN», assure encore le candidat.
Pas certain que Robert Ménard se reconnaisse totalement dans le portrait brossé par la benjamine de l'Assemblée nationale.
Ménard, de gauche?
Ce fils d'un ancien syndicaliste communiste, passé à l'OAS après son départ forcé d'Algérie, et d'une mère dévote qui s'est «opposée farouchement» à ce qu'il entre dans les ordres a bien milité à la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) dans les années 70 avant de rejoindre le Parti socialiste en 1979. Mais il y a bien longtemps qu'il est passé sur l'autre rive et prêche pour une autre paroisse.
Ses combats au sein de Reporters sans frontières (RSF) pour la liberté de la presse et la défense de la profession aux quatre coins du monde ont permis à Robert Ménard d'échapper à la vindicte des siens.
Il pouvait bien, seul contre tous, se scandaliser du traitement que la presse réservait à Jean-Marie Le Pen, il n'y avait encore aucun journaliste pour s'indigner de ses prises de position.
Le détenteur de la carte de presse 46234 était alors au faîte de sa puissance.
Il n'était pas encore, comme l'écrira plus tard un journaliste, «un convoyeur de front». On louait plutôt le courage, l'énergie et les coups d'éclat de cette tête brûlée qui n'hésitait pas à se suspendre dans le vide du haut de la tour Eiffel en dépit de son vertige pour protester contre l'attribution des Jeux olympiques à Pékin.
L'ancien avocat général près la cour d'appel de Paris ne fait pas partie de ceux qui lui ont tourné le dos et feignent de ne l'avoir jamais connu.
Mieux, il ne dédaigne pas à l'occasion de rappeler son amitié, «en éprouvant comme le frisson voluptueux de me mettre en danger en le répétant».
Pour lui, Ménard «a bénéficié de l'adhésion médiatique tant qu'il était encore à Reporters sans frontières».
En quittant l'ONG en 2008, il est devenu la cible de ses confrères.
Les prises de position tranchées du polémiste sur RTL et iTélé ont déclenché «une détestation acharnée» de la presse, qui ne lui pardonnera plus rien, dit encore Bilger, y voyant une réaction proche «du dépit amoureux».
Il faut dire que l'homme «ne fait pas dans le subliminal», comme le reconnaît volontiers Emmanuelle Duverger, son épouse.
Il s'assume de droite, «mais d'une droite qui refuse de se laisser caporaliser», analyse l'un de ses proches.
Finalement, la politique serait pour lui l'aboutissement d'une vie menée à tombeau ouvert.
Toujours en action. Et en réaction.
Comme le dit l'écrivain Dominique Jamet, qui s'est associé en 2012 à Robert Ménard pour lancer le site Boulevard Voltaire, «il n'a pas de plan de carrière.
Il ne cherche pas à préserver la cohérence de son parcours, mais son identité».
C'est le propre de ce déraciné.
A 60 ans, ce pied-noir ne cesse de se souvenir de l'enfant qui est né à Oran en 1953.
Il continue à placarder dans ses couloirs des cartes d'état-major qui datent de l'Algérie française.
Aujourd'hui, il ne se résigne pas à voir Béziers, où il a grandi dans le quartier pauvre de la Devèze, sombrer dans le déclin, désertée par les touristes qui ne la fréquentent plus qu'au pas de course, «par peur des agressions, quand ils ne s'arrêtent pas au Pont-Vieux plutôt que d'aller visiter la cathédrale Saint-Nazaire perchée au sommet de la ville».
Avec la même énergie qu'il a mise à faire de RSF une ONG incontournable, Ménard s'est lancé le défi de prendre la mairie de cette ville de 75 000 habitants.
Voilà maintenant plus d'un an que l'ancien patron de Reporters sans frontières s'est investi dans cette campagne.
Au début, les politiques ne le prenaient pas au sérieux.
Maintenant, ils craignent que ce «bleu» ne poursuive son atomisation des partis politiques et ne devienne un précurseur.
La dernière fois, alors qu'il faisait du porte-à-porte dans une HLM, un homme lui a lancé: «Moi, je suis un fils de résistant», avec l'air de dire qu'il ne pouvait pas discuter avec un homme qui a reçu le soutien du FN.
Du tac au tac, Ménard lui a répondu: «Parce que moi, je suis fils de collabo…», avant d'entamer une discussion.
L'insécurité galopante, la pauvreté, le chômage ont fait tomber des barrières.
«Ménard a fait le reste», reconnaît un médecin biterrois, longtemps désabusé au point de se réfugier dans l'abstention.
Aujourd'hui, il roule pour cet enfant de Béziers.
Robert Ménard ne se contente pas de jouer les trouble-fête.
Ce novice rebat les cartes de la politique locale.
Après avoir appris que la présidente du Front national s'apprêtait à investir une liste à Béziers, son sang n'a fait qu'un tour.
Ménard a décroché son téléphone.
«Tu ne peux pas me faire cela», lui a-t-il seulement dit.
Une manière de signifier à Marine Le Pen qu'il partage «à 80 % son diagnostic et ses solutions».
Il a finalement obtenu son soutien sans adhérer au FN ni même au Rassemblement Bleu Marine.
Il est, avec Jacques Bompard, le député-maire d'Orange, et sa femme, maire de Bollène dans le Vaucluse, le seul candidat à qui Marine Le Pen a accordé cette dérogation.
Son seul engagement: «Réserver une large place aux membres du FN, mais pas toute la place», précise-t-il.
Pour le reste, il est libre de son programme.
Il a depuis reçu l'appui de Nicolas Dupont-Aignan, le président de Debout la République, pourtant habituellement peu disposé à partager l'affiche avec Marine Le Pen, à qui il reproche volontiers des outrances et des provocations.
Mieux, l'ancien polémiste a su convaincre Annie Schmitt, la deuxième adjointe UMP de Raymond Couderc, le maire sortant de Béziers, de rejoindre sa liste.
Un ralliement de poids.
«Un signal colossal», jubile Ménard qui, en bon Méditerranéen, aime en faire des tonnes.
source
Et tu vas m'expliquer qu'à Béziers, le problème, ce sont les Norvégiennes qui déambulent en short trop court et les Suédoises en topless?
Moi, je te le dis, à force de tourner autour du pot, à force de refuser de nommer les problèmes quand tu ne te mets pas carrément des œillères pour ne pas les voir, tu te mets hors course.
Ton discours, je te le dis, ne passe plus.»
L'homme à qui Robert Ménard fait la leçon à la terrasse d'un restaurant en plein cœur de l'été est un ami de longue date.
Il n'est autre que Jean-Michel Du Plaa, la future tête de liste du Parti socialiste pour les prochaines municipales.
Cinq mois plus tard, celui qui se fait fort d'«appeler un chat un chat, et de ne pas changer de discours en fonction de son interlocuteur» a déjà en partie gagné son pari.
Un sondage crédite la liste de Robert Ménard, soutenue par le Front national, de 35 % d'intentions de voix au premier tour quand Du Plaa (PS) plafonne à 18 %.
Ce sont 10 points de mieux que le score de Marine Le Pen à la présidentielle.
Le cofondateur de Reporters sans frontières fait encore plus fort: il talonne la liste UMP conduite par le député Elie Aboud, l'héritier de Raymond Couderc, l'inamovible maire de Béziers depuis 1995, qui était réélu en 2008 dès le premier tour avec plus de 52 % des voix.
Voilà pour l'état des lieux: «Une sorte de démenti, analyse Robert Ménard, à tous ceux qui prédisaient que notre alliance avec le FN serait le péché originel de notre liste.» Pour lui, ce n'est pas une surprise.
«Il n'y a plus que le mundillo politique pour s'en étonner.
A Béziers, il n'est presque plus personne pour tordre le nez à l'évocation du FN», assure encore le candidat.
Fils d'un ancien syndicaliste communiste
Marion Maréchal-Le Pen, admirative de ce que l'ancien secrétaire général de Reporters sans frontières est parvenu à réaliser en quelques mois, en viendrait presque à jalouser cet «homme de gauche qui parvient à faire l'unité de toutes les droites».Pas certain que Robert Ménard se reconnaisse totalement dans le portrait brossé par la benjamine de l'Assemblée nationale.
Ménard, de gauche?
Ce fils d'un ancien syndicaliste communiste, passé à l'OAS après son départ forcé d'Algérie, et d'une mère dévote qui s'est «opposée farouchement» à ce qu'il entre dans les ordres a bien milité à la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) dans les années 70 avant de rejoindre le Parti socialiste en 1979. Mais il y a bien longtemps qu'il est passé sur l'autre rive et prêche pour une autre paroisse.
Ses combats au sein de Reporters sans frontières (RSF) pour la liberté de la presse et la défense de la profession aux quatre coins du monde ont permis à Robert Ménard d'échapper à la vindicte des siens.
Il pouvait bien, seul contre tous, se scandaliser du traitement que la presse réservait à Jean-Marie Le Pen, il n'y avait encore aucun journaliste pour s'indigner de ses prises de position.
Le détenteur de la carte de presse 46234 était alors au faîte de sa puissance.
Il n'était pas encore, comme l'écrira plus tard un journaliste, «un convoyeur de front». On louait plutôt le courage, l'énergie et les coups d'éclat de cette tête brûlée qui n'hésitait pas à se suspendre dans le vide du haut de la tour Eiffel en dépit de son vertige pour protester contre l'attribution des Jeux olympiques à Pékin.
Adepte d'une droite qui refuse de se laisser caporaliser
Pourtant, comme le reconnaît aujourd'hui Philippe Bilger, «il n'a jamais dissimulé, il en est même incapable».L'ancien avocat général près la cour d'appel de Paris ne fait pas partie de ceux qui lui ont tourné le dos et feignent de ne l'avoir jamais connu.
Mieux, il ne dédaigne pas à l'occasion de rappeler son amitié, «en éprouvant comme le frisson voluptueux de me mettre en danger en le répétant».
Pour lui, Ménard «a bénéficié de l'adhésion médiatique tant qu'il était encore à Reporters sans frontières».
En quittant l'ONG en 2008, il est devenu la cible de ses confrères.
Les prises de position tranchées du polémiste sur RTL et iTélé ont déclenché «une détestation acharnée» de la presse, qui ne lui pardonnera plus rien, dit encore Bilger, y voyant une réaction proche «du dépit amoureux».
Il faut dire que l'homme «ne fait pas dans le subliminal», comme le reconnaît volontiers Emmanuelle Duverger, son épouse.
Il s'assume de droite, «mais d'une droite qui refuse de se laisser caporaliser», analyse l'un de ses proches.
Finalement, la politique serait pour lui l'aboutissement d'une vie menée à tombeau ouvert.
Toujours en action. Et en réaction.
Comme le dit l'écrivain Dominique Jamet, qui s'est associé en 2012 à Robert Ménard pour lancer le site Boulevard Voltaire, «il n'a pas de plan de carrière.
Il ne cherche pas à préserver la cohérence de son parcours, mais son identité».
C'est le propre de ce déraciné.
A 60 ans, ce pied-noir ne cesse de se souvenir de l'enfant qui est né à Oran en 1953.
Il continue à placarder dans ses couloirs des cartes d'état-major qui datent de l'Algérie française.
Aujourd'hui, il ne se résigne pas à voir Béziers, où il a grandi dans le quartier pauvre de la Devèze, sombrer dans le déclin, désertée par les touristes qui ne la fréquentent plus qu'au pas de course, «par peur des agressions, quand ils ne s'arrêtent pas au Pont-Vieux plutôt que d'aller visiter la cathédrale Saint-Nazaire perchée au sommet de la ville».
Avec la même énergie qu'il a mise à faire de RSF une ONG incontournable, Ménard s'est lancé le défi de prendre la mairie de cette ville de 75 000 habitants.
Voilà maintenant plus d'un an que l'ancien patron de Reporters sans frontières s'est investi dans cette campagne.
Au début, les politiques ne le prenaient pas au sérieux.
Maintenant, ils craignent que ce «bleu» ne poursuive son atomisation des partis politiques et ne devienne un précurseur.
Ménard enregistre les ralliements de tous bords
Cela étant, à Béziers, «tout le monde ne nous embrasse pas sur la bouche», dit, avec l'une de ses formules dont il a le secret, le journaliste, qui ne craint pas d'aller partout, même dans les quartiers où il se sait le moins attendu.La dernière fois, alors qu'il faisait du porte-à-porte dans une HLM, un homme lui a lancé: «Moi, je suis un fils de résistant», avec l'air de dire qu'il ne pouvait pas discuter avec un homme qui a reçu le soutien du FN.
Du tac au tac, Ménard lui a répondu: «Parce que moi, je suis fils de collabo…», avant d'entamer une discussion.
L'insécurité galopante, la pauvreté, le chômage ont fait tomber des barrières.
«Ménard a fait le reste», reconnaît un médecin biterrois, longtemps désabusé au point de se réfugier dans l'abstention.
Aujourd'hui, il roule pour cet enfant de Béziers.
Robert Ménard ne se contente pas de jouer les trouble-fête.
Ce novice rebat les cartes de la politique locale.
Après avoir appris que la présidente du Front national s'apprêtait à investir une liste à Béziers, son sang n'a fait qu'un tour.
Ménard a décroché son téléphone.
«Tu ne peux pas me faire cela», lui a-t-il seulement dit.
Une manière de signifier à Marine Le Pen qu'il partage «à 80 % son diagnostic et ses solutions».
Il a finalement obtenu son soutien sans adhérer au FN ni même au Rassemblement Bleu Marine.
Il est, avec Jacques Bompard, le député-maire d'Orange, et sa femme, maire de Bollène dans le Vaucluse, le seul candidat à qui Marine Le Pen a accordé cette dérogation.
Son seul engagement: «Réserver une large place aux membres du FN, mais pas toute la place», précise-t-il.
Pour le reste, il est libre de son programme.
Il a depuis reçu l'appui de Nicolas Dupont-Aignan, le président de Debout la République, pourtant habituellement peu disposé à partager l'affiche avec Marine Le Pen, à qui il reproche volontiers des outrances et des provocations.
Mieux, l'ancien polémiste a su convaincre Annie Schmitt, la deuxième adjointe UMP de Raymond Couderc, le maire sortant de Béziers, de rejoindre sa liste.
Un ralliement de poids.
«Un signal colossal», jubile Ménard qui, en bon Méditerranéen, aime en faire des tonnes.
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