Annie Lacroix-Riz (Capture Youtube)
Dans son dernier ouvrage « Les origines du Plan Marshall », l’historienne Annie Lacroix-Riz remet en cause le récit dominant sur le Plan Marshall, y voyant un instrument de la mainmise américaine sur l’Europe d’après-guerre.
Le Plan Marshall, lancé en 1947, est généralement présenté comme un
effort de reconstruction massif de l’Europe par les Etats-Unis après la
Seconde Guerre mondiale. Prêts et dons américains auraient permis de
relever le continent de ses ruines.
Mais cette vision est contestée par l’historienne Annie Lacroix-Riz,
spécialiste reconnue des relations internationales contemporaines. Dans
son dernier ouvrage, elle démonte cette « propagande » et y voit au
contraire un outil d’asservissement de l’Europe à la puissance
américaine.
Selon Annie Lacroix-Riz, le Plan Marshall s’inscrit dans une
stratégie globale des États-Unis après 1945 pour prendre le contrôle
économique et politique de l’Europe, facilitée par leur position
dominante à la sortie de la Seconde Guerre mondiale.
Dès les années 1930, les élites politiques et économiques européennes
ont été courtisées et financées par les Américains pour devenir les
relais de leurs intérêts sur le continent. L’historienne montre par
exemple comment les fondations Carnegie et Rockefeller ont financé la
recherche à Sciences Po Paris avant-guerre.
Le Plan Marshall aurait servi avant tout à écouler les énormes surplus
agricoles et industriels américains d’après-guerre, en contraignant les
Européens à importer massivement des produits américains. Les prêts
accordés alimentaient cette dépendance obligée.
Les accords de Bretton Woods en 1944 ont verrouillé cette mainmise économique en imposant le dollar comme monnaie internationale et en limitant drastiquement la souveraineté des pays européens.
Sur le plan culturel, Hollywood et les fondations américaines ont investi massivement pour contrôler la production cinématographique et noyauter les élites intellectuelles et artistiques européennes.
Annie Lacroix-Riz dénonce également les accords Blum-Byrnes de 1946, très défavorables à la France, comme une manifestation de la subordination française aux intérêts américains.
En France, l’acceptation du Plan Marshall se serait faite au détriment des intérêts économiques nationaux et avec la complicité des milieux d’affaires et politiques ralliés à Washington.
Le général De Gaulle est présenté comme la seule figure politique ayant tenté, avec ses faibles moyens, de résister à cette mainmise américaine.Le débat reste ouvert
Les travaux d’Annie Lacroix-Riz offrent un contre-point radical à
l’histoire officielle du Plan Marshall et de la politique américaine
d’après-guerre. Ils ouvrent un débat historiographique essentiel, même
si certains de ses jugements peuvent sembler excessifs ou sujets à
discussion. Reste que cette analyse documentée jette un doute sérieux
sur la générosité désintéressée prêtée aux États-Unis dans les années
d’après-guerre.
Qui pourrait en douter ?
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