S’ils pouvaient le traîner sur la claie à travers le village, comme on le faisait au temps où les ancêtres de notre député de la Marne roulaient carrosse, ils le feraient volontiers.
Charles-Amédée de Courson est désormais la bête noire de la Macronie.
De la Macronie, mais aussi un peu des députés LR qui n’ont pas de mots assez durs pour ce vétéran de la vie parlementaire française. Une véritable chasse à courre. Taïaut !
D’abord, les troisièmes couteaux se sont mis à la basse besogne. Sorte de prémices d’une grande contre-attaque face à cette nouvelle bête du Gévaudan. Ainsi, un certain Maxime Boudet, membre du cabinet du ministre du Logement et du parti présidentiel, tweetait, dimanche, en mode vulgaire : « Charles de Courson a décidé de consacrer son dernier mandat à mettre le bordel et provoquer. En bonus aider le Rassemblement national à monter. Quand il n’est pas d’accord avec l’extrême gauche, il l’est avec l’extrême droite. » Rappelons tout de même à ce jeune homme que s’il est en France une personne qui a aidé le RN à monter, c’est bien Emmanuel Macron, lui qui s’était engagé, bravache, en 2017, à ce qu’il n’y ait « plus aucune raison de voter pour les extrêmes en 2022 ». Ce serait injuste envers le président de la République de ne pas lui rendre cet hommage.
Dans la série des couteaux suisses de la Macronie, bien évidemment, il ne faut pas oublier Élisabeth Borne – une épée, en politique – qui estimait, dimanche, que le texte de la proposition de loi du groupe LIOT pour abroger les retraites était « dangereux et irresponsable ». Dangereux pour qui ? La réponse est sans doute dans la question. Irresponsable ? Évidemment, l’emploi de cet adjectif qui renvoie au lexique de ceux qui savent et « sont en responsabilité » n’a rien de nouveau dans la bouche d’une technocrate accomplie.
Mardi, dans l’Hémicycle, Olivier Dussopt, ministre du Travail, s’adressait ainsi à M. de Courson : « Vous bataillez depuis des décennies pour assainir les comptes publics. Votre proposition de loi dégraderait ces derniers de 15 milliards d'euros. Vous ne pourrez plus jamais venir dans cet Hémicycle nous faire la leçon. » Stéphane Séjourné, député européen, secrétaire général de Renaissance, lui, s’interroge : « Je ne comprends pas les ambiguïtés de Charles de Courson. Il a fait partie de la campagne de Valérie Pécresse : il était même son conseiller politique. Dans son projet, il défendait la retraite à 65 ans. Je ne sais pas s’il a menti à la candidate LR ou s’il a menti à ses électeurs. Dans les deux cas, il n’y a aucune gloire à tirer de ce genre de reniement. Il y a même une forme de lâcheté à l’assumer. » M. de Courson s’est peut-être renié, mais que dire alors d’Olivier Dussopt, cité plus haut, qui, lorsqu’il était député socialiste en 2010, s’opposait farouchement à François Fillon, porteur de la loi reculant l’âge de la retraite à 62 ans.
Même la girl-scout de l’équipée gouvernementale, Sarah El Haïry, secrétaire d’État au Service national universel, y est allée de sa petite analyse : « Charles de Courson s’est perdu. » Puisque c’est tendance, actuellement, on croirait qu’on parle d’un socialiste du Front populaire qui se serait jeté dans l’aventure de la Collaboration.Du côté des LR, Éric Ciotti, mardi soir, sur le plateau de « C à vous », y allait de sa petite pointe d'humour : « Quand je vois Charles de Courson, qui a été l'apôtre d'une rigueur budgétaire totale, devenir le Che Guevara de Jean-Luc Mélenchon, je regarde ça avec un peu d'ironie. » Pourquoi tant d'ironie ? Imaginons que le 8 juin, la proposition de loi soit votée. Ce serait évidemment une défaite cuisante pour Macron et Borne. Dissolution ? Peut-être. Et dans ce cas, combien resterait-il de députés LR après de nouvelles élections législatives ? Si on peut s'éviter la curée...
Et ce mercredi 31 mai matin, en commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale, ç'a été l’apothéose avec l’intervention d’Aurore Bergé. « Que s'est-il passé pour que l'inoxydable Don Quichotte de nos finances publiques renonce à ce qu'il a toujours défendu ? Que s'est il passé pour que Charles de Courson soit fier des soutiens d'extrême gauche et droite ? Nous ne laisserons pas passer. » Magnifique. ¡No pasarán!
Bonne question : au fait, que s’est-il donc passé ? Il s’est passé que l’enjeu majeur de cette polémique autour de la proposition de loi du groupe LIOT n’est évidemment pas la réforme des retraites. Charles de Courson, dimanche dernier, évoquait, sur France 3, de la part du gouvernement, un « déni de démocratie », gouvernement qui, pour lui, « finira par tomber ». Là est la faute impardonnable pour la Macronie. Ce Charles de Courson qui devait, en toute logique, dans leur logiciel, faire partie du soi-disant « cercle de la raison », a osé se lever. Quoi qu'il en coûte ? Sous l’Ancien Régime, au temps où les ancêtres de M. de Courson roulaient carrosse, on renvoyait les parlementaires en province. Aujourd’hui, c’est plus compliqué et ça doit drôlement agacer le Château…
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