Lorsque Donald Trump se branche sur Twitter, on se demande souvent à qui le tour?
Visiblement, le tour était à Emmanuel Macron aujourd’hui.
Comment jugez-vous les trois tweets assez hallucinants envoyés par le président des États-Unis directement au président de la République française ?
La première chose est qu’il vante les mérites œnologiques de la France et il a bien raison.
Ensuite, il considère que le peuple français est le plus nationaliste du monde.
Je n’en suis pas certain.
Les Américains n’ont pas beaucoup à nous envier sur ce plan.
Je pense surtout qu’au-delà d’une espèce d’interprétation hâtive de la culture et de l’esprit ou de l’âme français, le président Trump règle la note d’un week-end diplomatique absolument catastrophique d’Emmanuel Macron.
Il a voulu d’une certaine manière régler ses comptes en utilisant la commémoration du 11 novembre 1918 comme support.
Si une manifestation de cette nature s’était déroulée sur le sol des États-Unis, le président américain n’aurait probablement pas convié une opposante ou un opposant politique de tout premier rang pour chanter devant le président français.
C’est pourtant ce qu’a fait Emmanuel Macron en invitant cette chanteuse africaine qui est une des animatrices du mouvement anti-Trump aux États-Unis.
Je pense que le président Trump n’aurait pas autorisé la tenue de manifestations anti Macron aux États-Unis.
Les autorités françaises ont autorisé les manifestations anti-Trump le jour même du 11 novembre à Paris.
Bref, il y avait là un signe d’indélicatesse insupportable pour le président américain.
Il l’a vécu comme une forme d’affront personnel.
Et si j’avais été à sa place, j’aurais eu la même interprétation.
On ne va pas se scandaliser du mode opératoire du président des États-Unis puisqu’il s’agit de son mode opératoire habituel.
Au-delà de la manière, cela va-t-il selon vous changer les relations diplomatiques entre Emmanuel Macron et Donald Trump ?
Je ne sais pas. Je n’ai pas de boule de cristal.
Chez vos confrères d’Europe 1, le président Macron a expliqué qu’une armée européenne était nécessaire compte tenu de la menace que représentait la Russie et les États-Unis d’Amérique. Lorsqu’on est président américain, on ne peut pas écouter cela sans réagir et sans ressentir une forme de profond mécontentement.
Je vois une fragilisation assez nette des relations diplomatiques entre la France et les États-Unis.
Les relations entre nos pays sont sinueuses et variables.
N’oublions jamais que la France et les États-Unis sont les deux seules grandes puissances à n’avoir jamais été en guerre l’une contre l’autre.
Ce n’est pas un détail.
Pourvu que cela dure.
Dire que les Américains sont toujours nos alliés, ce n’est pas certain.
Dire qu’ils défendent toujours nos intérêts, ce n’est pas sûr du tout non plus.
Néanmoins, personne n’a intérêt à cette tension entre ce qui demeure les deux plus grandes armées du monde occidental.
Même si la nôtre est beaucoup plus petite que celle des Américains, c’est une réalité que nous sommes les derniers en Europe à avoir une force de projection qui permet de rendre des services au monde entier.
Les États-Unis sont dans la même situation que nous avec des moyens, bien sûr, plus importants.
Lors de la journée du 11 novembre, le président a mis à l’honneur le président du Kosovo, un État mafieux inventé par l’Union européenne avec la bénédiction de Clinton à l’époque.
Le président serbe, lui, a été tout à fait mal traité, alors même que les Serbes étaient nos alliés au moment de la Première Guerre mondiale, probablement parce qu’ ils sont pro russes.
Il y a dans ce traitement double de Trump et des Serbes un message, à mon avis, de non-alignement envoyé au monde entier.
Cependant, le non-alignement de De Gaulle était un peu plus classe, certainement plus réfléchi et beaucoup moins irrévérencieux à l’égard de ses partenaires.
C’est donc, encore une fois, une conséquence terrible de la diplomatie de Macron ce week-end.
Nous sommes en train de payer une forme d’immaturité en matière de diplomatie.
Lorsqu’on s’adresse à des ours puissants comme le président américain, et bien on prend des retours de bâton.
Il montre ses muscles de manière inappropriée…
Lorsqu’on est président français, il ne faut pas se tromper d’ennemis.
L’ennemi de la France n’est pas la Russie.
C’est une bêtise.
L’ennemi de la France, ce n’est pas non plus la Hongrie, l’Italie, la Pologne et ce ne sont pas non plus les États-Unis d’Amérique.
C’est le monde islamique, sa volonté d’expansion et les États du golfe.
On ne peut pas être moins sévère avec l’Arabie Saoudite qu’avec les États-Unis.
Ce n’est pas possible.
C’est incompréhensible.
Ce défaut de ligne et de vision et cette carence terrible dans l’interprétation des rapports de force dans le monde produisent les résultats que nous voyons aujourd’hui.
Malheureusement, cela n’est pas le dernier.
Cela confirme qu’Emmanuel Macron ne réussit pas davantage sur la scène nationale que sur la scène internationale.
C’est ce que rappelle justement le président Trump dans ses tweets.
Jean-Frédéric Poisson
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Ici, les commentaires sont libres.
Libres ne veut pas dire insultants, injurieux, diffamatoires.
À chacun de s’appliquer cette règle qui fera la richesse et l’intérêt de nos débats.
Les commentaires injurieux seront supprimés par le modérateur.
Merci d’avance.