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lundi 6 janvier 2025

Le pharaonique projet architectural du royaume saoudien, qui accumule surcoûts et retards, est de plus en plus critiqué pour sa catastrophique gestion des ouvriers qui travaillent sur les différents sites


 The Line : 170 km entre mer, désert et montagne, à parcourir en 20 minutes en train à grande vitesse. Photo SIPA/Neom

 The Line : 170 km entre mer, désert et montagne, à parcourir en 20 minutes en train à grande vitesse. Photo SIPA/Neom
 
 
Publié le 04/01/2025

Neom, utopie architecturale à 500 milliards de dollars en plein désert de l’Arabie saoudite, semble s’enfoncer dans des sables mouvants qui pourraient gravement ternir sa réputation et remettre en cause son ambition architecturale démesurée.
 
 Initiée dès 2017 par le prince héritier et Premier ministre du pays Mohammed Ben Salmane, le projet consiste en plusieurs réalisations pharaoniques parties de la mer rouge et s’enfonçant dans les arides et accidentées terres du nord ouest du royaume : port de commerce construit sur la mer, station balnéaire pour ultras riches sur une île, station de ski dans des montagnes qui ne voient presque jamais la neige et surtout The Line, ville futuriste et centre technologique de plus de 150 km de long construits comme un immense mur de verre de 500 mètres de haut coupant le désert.

Mais malgré l’inauguration en octobre dernier de l’île balnéaire de grand luxe Sindalah, premier maillon du projet, Neom a depuis drastiquement baissé la voilure et tente d’étouffer les scandales.

Les responsables du projet phare, The Line, qui avaient prévu d’atteindre les 170 km construits en 2023, ont en effet annoncé que la longueur achevée serait finalement à cette date de… 2,4 km. 

Soit un peu plus de 1 %. La principale raison est le coût astronomique des différents sites, obligeant les concepteurs à faire des choix par élimination.


« Le Far West »

Bien pire, selon le Wall Street journal, l’immense chantier serait devenu un coupe-gorge pour les près de 100 000 travailleurs Pakistanais, Bangladais ou Philippins qui y sont employés, logés sous un soleil de plomb au sein de camps construits selon des normes sanitaires douteuses. Le quotidien new-yorkais rapportant des cas de « viols collectifs, tentative de meurtre et trafic de drogue », les stupéfiants vendus aux ouvriers leur servant à tenir les cadences infernales qui leur sont imposées dans la très sévère monarchie islamique.

La croissance trop rapide des infrastructures et le manque de contrôles provoqueraient également de nombreux accidents de la route dans ce qui serait devenu « le Far West », avec des enfants de 8 ans aperçus au volant de camions de chantier.

Dernier signe de malaise, le PDG de Neom, Nadhmi Al-Nasr, a brusquement quitté son poste fin 2024 en raison de « retards, surcoûts et rotations du personnel qui ont empoisonné le projet », selon le Wall Street Journal. Son remplaçant, le PDG par intérim Aiman Al-Mudaifer, après avoir mis ces incidents sur le compte du déracinement, a déclaré que Neom « entre dans une nouvelle phase ». Le documentaire britannique « Kingdom Uncovered : Inside Saudi Arabia » rapporte que selon les autorités indiennes, bangladaises et népalaises, 21 000 de leurs ressortissants travaillant en Arabie saoudite sont morts depuis 2016, année du lancement du projet économique Vision 2030, cadre de Neom.

 

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