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vendredi 16 décembre 2022

Ukraine : la menace d’une guerre totale


Frédéric Lassez 15 décembre 2022

Le 14 décembre 2021, le Times rapportait les propos d’un ancien commandant général des Royal Marines, Robert Magowan, qui reconnaissait que les prestigieux commandos britanniques avaient mené des opérations spéciales en Ukraine dans un « environnement extrêmement sensible » comportant « un niveau élevé de risque politique et militaire ».

Une guerre secrète qui vient s’ajouter à celle menée bien plus ouvertement par les milliers de combattants étrangers qui ont rejoint l'Ukraine pour se battre contre l’armée russe. Au printemps et en septembre derniers, le New York Times avait également évoqué le rôle joué par les services de renseignement américains pour planifier la contre-offensive ukrainienne et pour aider à tuer des généraux russes. Une accumulation de révélations qui avait contribué à renforcer, en Russie, le sentiment que cette guerre n’était plus menée contre le régime de Kiev mais contre l’OTAN.

Les récentes déclarations du secrétaire général de l’Alliance atlantique ne risquent pas de remettre en question cette perception. Lors d’une interview accordée à la chaîne de télévision norvégienne NRK, Jens Stoltenberg a en effet déclaré que la guerre en Ukraine pouvait potentiellement se transformer « en une guerre majeure entre l' et la Russie ». Le 11 octobre dernier, à l’occasion d’une conférence de presse au siège de l’organisation à Bruxelles, il avait déjà insisté sur le fait que, de son point de vue, une victoire de la Russie serait non seulement une défaite pour les Ukrainiens mais aussi pour les membres de l’Alliance.

À quelles conditions cette guerre pourrait-elle alors se transformer en une guerre plus large impliquant directement l’OTAN ? Mystère. Pour autant, la menace a été brandie et nous aurions tort de ne pas prendre au sérieux ce risque d’escalade.

En octobre dernier, dans les colonnes de L'Express, David Petraeus, ancien général de l'armée américaine à la tête de la Force internationale en et ancien directeur de la CIA, évoquait une autre option possiblement sur la table à Washington : l’engagement direct en Ukraine d’une « force multinationale dirigée par les États-Unis ». À quelles conditions ? Là encore, mystère. Cette « coalition of the willing » (coalition de volontaires) évoquée outre-Atlantique permettrait cependant de contourner la frilosité de certains membres de l’ et de prendre appui sur ses éléments les plus bellicistes.

L’annonce, en juin dernier, de l’établissement d’un quartier général permanent des forces américaines en et le déploiement de la 101e division aéroportée américaine, les « Screaming Eagles », en Roumanie, près de la frontière avec l'Ukraine, avaient déjà alimenté bien des conjectures aux États-Unis. En Europe, les médias ne sont pas en reste. Le journal Le Monde n’hésitait pas à écrire, le 11 décembre dernier, que le déploiement par la France de chars Leclerc en Roumanie s’inscrivait « dans la volonté de prévenir une extension du conflit, tout en se préparant à une éventuelle confrontation "de haute intensité" avec la Russie ».

Politique fiction ? Peut-être pas, si l'on considère qu’actuellement, aucun camp n’est prêt à faire de concessions territoriales et surtout que, du point de vue russe, la conquête des quatre oblasts ukrainiens revendiqués ne résoudrait pas le fond du problème : le maintien à Kiev d’un régime hostile « antirusse », armé par l’OTAN, reconstituant progressivement ses forces et susceptible de reprendre plus tard les combats. Une sorte de « Minsk 3 », alors que l’ancienne chancelière allemande, Angela Merkel, reconnaissait récemment que les accords de Minsk avaient permis à l’Ukraine de gagner du temps et de se renforcer.

Dans ces conditions, qui semblent fermer la porte à la négociation, que feraient les Américains et leurs alliés face à une contre-offensive russe couronnée de succès qui mettrait en péril le régime de Zelensky ? La tentation ne serait-elle pas grande d’entrer en Ukraine afin de sécuriser sa partie occidentale ? Peut-être pas pour engager directement les Russes, mais plutôt pour s'établir comme une sorte de force d’interposition et imposer un cessez-le-feu. Une hypothèse à très haut risque.

Le 29 novembre dernier, le vice-ministre de la Défense polonais, Marcin Ociepa, lors d'une conférence à Cracovie, s’interrogeait : « Quelle est la probabilité d'une guerre à laquelle nous participerons ? Très élevée. Trop élevée pour que nous ne traitions ce scénario que de manière hypothétique. » Du côté de l’OTAN, la guerre, paraît-il, personne n’en veut mais tout le monde y pense.

1 commentaire:

  1. Rien que de l'avoir dit se serait un risque politiques ,imaginer les forces françaises en condition d'engagement direct ? On peut être sur que tous les citoyens sortiront contre la guerre qui n'est pas la leur , quand je me suis engagés dans les troupes aéroportées nombres de familles étaient contre pour Kolwezi et c'était le 2ième REP qui nous a remplacé, après en 82, c'était le Liban, idem des gens nous demandaient qu'est ce que vous allez faire là bas ? Alors imaginons aujourd'hui !!! de nombreuse familles perdant à nouveau leurs membres ,leurs fils ,leurs filles ? On n'a la mémoire courte me semble t'il les soldats français mort au combat en Afghanistan et les cérémonies aux invalides !!! avez vous vu la foule a ces cérémonies funéraires ? On est pas en Irak ,au Mali ,en Afghanistan là !!! En face c'est une armée fidèle à son pays patriotique eux !!! avec de nombreux faits de guerres historiques à leurs actifs faut il le rappeler

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