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jeudi 5 décembre 2019

« J’veux pas travailler jusqu’à 70 ans… 5 décembre. » L’édito de Charles SANNAT

 
par | 5 Déc 2019 |
 
Mes chères impertinentes, chers impertinents,
 
Vous connaissez l’histoire pour enfant « Cornebidouille » ?

Moi oui, ma femme doit la lire une fois par semaine depuis par loin de 10 ans à l’un de nos futurs révolutionnaires en culottes courtes de la maisonnée.
 
Quand il était petit, Pierre ne voulait pas manger sa soupe et ça faisait des tas d’histoires.
Ça faisait des histoires avec sa mère :
« Pierre, mange ta soupe ! »
« Nan, j’veux pas ! »
Ça faisait des histoires avec sa grand-mère :
« Pierre, mange ta soupe ! »
« Nan, j’veux pas ! »
Ça faisait des histoires avec son grand-père:
« Pierre, mange ta soupe ! »
« Nan, j’veux pas ! »
Ça faisait des histoires avec son père :
« Pierre, mange ta soupe ! »
« Nan, j’veux pas ! »
Cornebidouille c’est la sorcière qui veut forcer le petit Pierre à manger sa soupe…
Mais évidemment, le petit Pierre, va réussir à s’occuper de la sorcière.
De là, dire que Philippe et Macron sont les sorcières de cette petite fable, il n’y a qu’un pas que je vous invite à franchir allègrement !
 
… Parce que, ben moi travailler jusqu’à 70 ans, « Nan, j’veux pas ! »
Je sais c’est injuste.
 
Ce méchant cheminot qui part trop tôt à la retraite, ou ce vilain agent de la RATP qui ne travaille pas assez vieux.
Mais en fait, je vais partager avec vous, aujourd’hui non pas deux vérités – ce qui serait fort prétentieux – mais deux considérations qui me semblent essentielles pour alimenter notre débat actuel, autour de ces méchants retraités qui gagnent trop !
Car au-delà des 3,5 % de retraités que représentent les crapules de cheminots et de ratépistes, c’est bien toutes les retraites qui seront diminuées de 10 à 25 % et ça… pour les 96.5 % de pas privilégiés, qui le seront encore moins après cette réforme !
 
On veut donner moins à ceux qui ont travaillé toute une vie, et donner plus à ceux qui ne fichent rien !

Ce à quoi, et c’est ma première considération, ma belle-mère répond toujours courroucée « mais je n’ai rien volé, j’ai travaillé toute ma vie ».
Et disons-le, je suis d’accord avec ma belle-mère, elle a travaillé toute sa vie.
Or, aujourd’hui, nous voulons, enfin le gouvernement veut, réduire l’ensemble des retraites (et pas uniquement les régimes spéciaux, qui ne sont qu’un argument spécieux, pour réduire tout le monde), c’est-à-dire donner moins à tous ceux qui ont travaillé pendant 40 ans !
De l’autre côté, les mêmes donnent – avec notre argent à des milliers et des centaines de milliers de gens en âge de travailler et qui ne travaillent pas beaucoup pour ne pas dire pas du tout – des montants sous forme de RSA, d’APL et autres CAF qui permettent à des générations entières… de vivre de l’assistanat !
Je ne vous parle pas ici des accidents de la vie et de la nécessaire assistance collective pour ceux qui trébuchent et nous pouvons tous en faire partie.
Fort aujourd’hui, faible demain.
Ne l’oublions jamais.
 
Je vous parle d’une réalité, froide, où par centaines de milliers,  les gens ne travaillent pas, parce que travailler n’est pas rentable par rapport aux aides reçues.
Tout le monde le sait c’est une réalité.
Pourquoi voulez-vous, en tant qu’agent économique rationnel (et j’insiste sur le rationnel), aller travailler pour 1 200 euros nets alors que vous touchez 900 nets avec les aides sociales ?
Il va falloir faire garder vos enfants, payer la cantine des gosses, et le transport pour aller jusqu’à l’usine, se faire casser les pieds par un chefaillon pour un travail sans intérêt et physiquement difficile… pendant 40 ans pour avoir une retraite équivalente au minimum vieillesse que vous auriez eu en remplacement de votre RSA à vie dans 40 ans… Rationnel.
Vous vous souvenez ?
 
Conclusion les jeunes et un peu moins jeunes restent à ne rien faire chez eux, tandis que l’on demande à ceux qui travaillent de travailler encore plus longtemps, de payer encore plus d’impôts, de verser encore plus de taxes sur les carburants, pour payer ceux qui ne font rien et qui comptent surtout continuer à ne rien faire, ce qui est rationnellement parfaitement compréhensible et pertinent (les plus imbéciles étant ceux qui continuent à travailler pour le SMIC en dehors de toute notion de fierté ou dignité).
Ne me dites pas que ce n’est pas vrai, dans ma petite ville normande, j’ai la moitié des résidents ici qui vivent de cette solidarité nationale.
Au resto du cœur locaux, nous voyons arriver la troisième génération qui considère les restos du cœur comme le supermarché local de droit.
 C’est valable partout dans notre pays.
Vous pouvez me dire que c’est bien, et c’est faux.
Le raisonnement me semble erroné.
Ce pays n’a pas besoin d’une réforme des retraites, mais d’une réforme de l’assistanat, pour passer de l’assistanat passif, à une aide active et constructive pour nos plus faibles et nos plus fragiles.
Certes il n’y a pas de travail pour tous, et je suis le premier à le dire, mais il y en a un paquet qui pourrait travailler tout simplement.
Et quand il n’y a pas de travail, il faut en inventer, parce que nous avons d’immenses besoins non couverts.
Il faut donc revoir notre conception même de ce qu’est aider.
Assurer. Soutenir. Un RSA oui, vous savez revenu de solidarité active… il faut juste réactiver l’idée d’active… genre activité !
 
J’veux pas travailler jusqu’à 70 ans !

Ensuite, la deuxième considération que je voulais soumettre à votre réflexion et ce cri du cœur. « Je ne veux pas bosser jusqu’à 70 ans ! » et d’ailleurs, pas plus jusqu’à 65 ans.
Je ne vous parle pas de moi, j’ai l’immense chance de ne pas travailler à l’usine, j’ai la chance de travailler dans mon grenier qui, même mal isolé, me permet quand même de pouvoir faire les choses comme je le souhaite.
Je ne travaille pas à l’usine, loin, je ne fais pas des chantiers loin de la maison, je ne suis pas en extérieur sur une toiture.
Je ne dois pas me faufiler dans des gaines techniques pour poser des câblages en rampant dans la poussière, je ne suis pas en haut d’un pylône à 30 mètre de hauteur pour remettre une ligne de haute tension.
Je ne suis pas infirmière en Ephad, ou en soins palliatifs où chaque jour les patients partent pour le grand voyage.
Je ne suis pas prof dans le 9-3 comme l’était ma belle-mère, comme l’est mon cousin.
Alors, oui, j’accepte, j’entends, ceux qui disent « je ne veux pas travailler jusqu’à 70 ans ».
Cette affirmation est respectable.
Je n’ai pas envie de travailler en déambulateur.
Dans un pays normalement constitué, où la démocratie veut encore dire quelque chose, l’action publique doit être orientée vers les gens et pour les gens.
Il y a un « disponible » financier.
Comment dépense-t-on notre argent ?
Voilà la question.
Si les gens préfèrent payer des retraites à ceux qui ont travaillé toute une vie et moins payer ceux qui ne travaillent pas, vous trouveriez cela choquant ?
Moi non.
Mais au delà de mon avis, sans grande importance à vrai dire, l’essentiel est de remettre les citoyens au cœur des choix et c’est tout le sens de la démocratie participative !
 
Devenir un « élu » ne vous donne pas les pleins pouvoirs pour emmerder la population !

C’est aux gens de choisir les impôts qu’ils veulent lever et la manière de les répartir.
C’est cela la démocratie.
C’est cela le sens des élections et des campagnes électorales.
Nous avons oublié l’essentiel.
Mais il est vrai que si l’on demande aux gens ce qu’ils pensent, les mamamouchis pourraient avoir de bien mauvaises surprises.
Pour éviter cela ils ne le font pas et imposent leurs propres choix de caste, qui ne sont en aucun cas des choix pour et par le peuple.
Cela se terminera donc mal.
Et nos Cornebidouilles gouvernementaux vont finir par disparaître au fonds de la chaussette qui pue… (pour lire l’histoire de Cornebidouille c’est ici).
 
Demain, nous parlerons de la grève des moutons, un autre de nos livres pour enfants, un grand classique de l’apprentissage de la lutte des classes dès le plus jeune âge !!
D’ici-là j’ai pas envie de travailler jusqu’à 70 ans, et c’est une raison largement suffisante.
Et quand les Cornebidouilles des palais nous disent « travaille jusqu’à l’épuisement », d’un seul homme (mais les femmes ont le droit aussi), nous devons répondre « Nan, j’veux pas » !
 
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !
 
Charles SANNAT

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