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jeudi 5 décembre 2019

Alexis Poulin : « On a l’impression que le préfet Lallement joue avec le feu »

 
 


Analyse des raisons profondes de la colère et de la gestion de la manifestation par le pouvoir : « ils annoncent des casseurs, mais ils ne font rien. »
 




Nous sommes à la veille d’une énorme manifestation à l’échelle nationale.
Pas moins de 245 points de rassemblement sont déclarés dans le pays.
Les pouvoirs publics et la presse laissent entendre que plusieurs centaines de milliers de manifestants seront présents.
Quel est l’enjeu de la manifestation de demain ?


Le premier enjeu est de montrer que les forces syndicales sont encore mobilisées.
Cela n’avait pas été le cas lors des dernières grandes manifestations.
Il y a une certaine fierté syndicale.
L’autre enjeu est plus large.
La manifestation du 5 décembre est peut-être le vrai anniversaire de cette première grande manifestation de ras-le-bol des Gilets jaunes.
Cette politique doit cesser et doit répondre aux attentes des Français.
Il y a une demande de justice fiscale et sociale et d’un meilleur futur plutôt que la politique de moins-disance sociale permanente d’Emmanuel Macron.

Les gens vont-ils manifester uniquement contre la réforme des retraites ?

Ils ne vont pas seulement manifester contre la réforme des retraites en effet.
Derrière, il y a l’envie de manifester contre toute cette politique du moins-disant social, avec la réforme de l’assurance chômage notamment.
Les gens attendent plus de considération.
Et ils sont aussi préoccupé par le pouvoir d’achat.
Cette revendication première des Gilets jaunes n’a pas été entendue, malgré les milliards mis sur la table.
Les gens voient encore leur pouvoir d’achat baissé parce que le logement et les produits coûtent de plus en plus cher et que les salaires n’augmentent pas.

Le préfet Lallement a mobilisé énormément de forces de l’ordre pour cette manifestation.
Il a annoncé qu’ils attendaient 1000 casseurs dans les rangs des manifestants.
A quoi peut-on s’attendre vis-à-vis de la gestion de la manifestation ?


C’est incroyable qu’ils aient les chiffres et qu’ils ne fassent rien.
Lors des manifestations des Gilets jaunes, ils ont pu mettre de manière préventive beaucoup de gens en garde à vue.
Alors, pourquoi ne font-ils pas cela avec les casseurs ?
Cela commence à poser question…
Lors de la marche pour le droit des femmes et la marche contre l’islamophobie, il n’y avait pas de casseur.
Dès qu’il est question d’une grande manifestation sociale, les casseurs réapparaissent et on dirait qu’on ne va rien pouvoir faire.
On a l’impression que le préfet Lallement joue un peu avec le feu et que l’idée est de décrédibiliser le mouvement, comme avec les Gilets jaunes, par la violence.
Cela pose un problème puisque les syndicats ont des services d’ordre et qu’ils ne vont pas se laisser faire, comme cela a pu être le cas avec les Gilets jaunes.

Contrairement aux manifestations des Gilets jaunes, ce sont des syndicats qui organiseront la manifestation.
L’État aura un interlocuteur plutôt que des personnalités.
Il y aura de vrais encadrants avec de vraies revendications formées.
Mais s’agit-il vraiment d’une force ?
Si le patron de la CGT décide d’arrêter la manifestation, est-ce que ces mouvements ne vont pas s’arrêter d’eux-mêmes ou vont-ils se passer des syndicats ?

Il faut bien séparer deux aspects.
Tout d’abord, la manifestation du 5 décembre.
C’est une manifestation de force.
Or, le droit de manifester est attaqué de toute part en France par les gardes à vue abusives par la violence des forces de l’ordre et par cet empêchement physique de manifester.
Y aura-t-il beaucoup de monde demain dans la rue ? Nous verrons demain.
L’autre aspect est que ce mouvement a pour but, pour les organisations syndicales, de renégocier la réforme des retraites, préserver pour certains des régimes particuliers.
Ils vont évidemment jouer la division pour mieux régner.
Cela ne veut pas dire que cela va fonctionner.
Cela fait des semaines voire des mois que les organisations syndicales négocient avec le gouvernement.
Elles ont quitté la table à plusieurs reprises car elles ne voyaient rien avancer ».
Même la CFDT a du mal à voir les choses avancer.
Pourtant, elle milite pour cette réforme des retraites.
La durée est quelque chose qui va poser question.
La base syndicale va peut-être désavouer les organes de direction et continuer un mouvement contre l’avis de la direction qui souhaiterait retourner à la table de négociation.

Alexis Poulin

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