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vendredi 19 avril 2019

Le pactole à 15 milliards d’euros offert par François Hollande aux autoroutiers


 


En 2015, les sociétés d’autoroutes se sont engagées à réaliser pour 3,2 milliards d’euros de travaux d’amélioration du réseau d’ici 2024. Illustration LP/Olivier Boitet

|Vincent Vérier| 19 avril 2019
 
La Cour des comptes a calculé que le plan de relance autoroutier signé en 2015 entre l’Etat et les sociétés d’autoroutes va leur rapporter cinq fois plus que leurs mises.
 
Les magistrats recommandent un rééquilibrage.
 
Un jackpot de 15 milliards d’euros pour les concessionnaires d’autoroutes.
Le référé de la Cour des comptes, publié ce jeudi, épingle l’Etat et son plan de relance autoroutier (PRA).
Signé en 2015 entre François Hollande et son gouvernement d’un côté et les concessionnaires autoroutiers de l’autre, déjà très contesté à l’époque, il consent un allongement d’un à plus de trois ans de la durée des concessions.
En échange, les sociétés d’autoroutes, comme Vinci, Eiffage et Abertis, doivent réaliser pour 3,2 milliards d’euros de travaux d’amélioration du réseau d’ici 2024.
Pour l’Etat, ce plan doit relancer l’économie et notamment le secteur du BTP.
À la clé, la création de plusieurs milliers d’emplois.
Sauf que la Cour des comptes a fait ses calculs.
Aux 3,2 milliards d’euros d’investissement pour élargir certains tronçons autoroutes, rénover des ouvrages d’art ou reconfigurer des échangeurs, les concessionnaires vont récupérer une quinzaine de milliards d’euros de recettes supplémentaires grâce à des concessions plus longues.
Soit un euro investi pour presque cinq euros gagnés.
 
L’Etat a payé deux fois les mêmes travaux !

Si la Cour reconnaît que « cette formule (NDLR : travaux contre allongement de la durée des concessions) présente l’attrait évident de permettre un démarrage rapide des travaux, notamment dans le cadre de plans de relance, sans mobiliser de nouvelles ressources publiques ni augmenter dans l’immédiat les péages pour les usagers », elle pointe ses nombreux défauts.

En premier lieu, elle estime que l’Etat a tendance à surcompenser ces travaux.
Et pour cause, ces compensations « sont l’objet de négociations difficiles dans lesquelles les pouvoirs publics sont souvent apparus en position de faiblesse », relève la Cour.
Ainsi, ils constatent que les sociétés d’autoroutes ont tendance à présenter de manière trop pessimiste les risques réels qu’elles vont supporter dans ces investissements.

Par ailleurs, la Cour relève que plusieurs chantiers auraient dû être réalisés dans le cadre des contrats de concession initiaux et non à travers le fameux plan de relance.
En clair, l’Etat a payé deux fois les mêmes travaux !
Des doublons présents dans deux autres contrats du même type : le « paquet vert » (1 milliard d’euros) signé en 2010 et le plan d’investissement autoroutier (PIA) (700 millions d’euros) signé en 2016.
Pis, la Cour a découvert un cas de travaux programmé dans le cadre du plan de relance alors que le concessionnaire s’était engagé à financer le chantier auprès des collectivités territoriales concernées. Afin de rééquilibrer les accords en faveur de l’Etat et des usagers, et de limiter ces errances du fait de textes trop flous, la Cour des comptes fait trois recommandations : d’abord de définir par décret, en Conseil d’Etat, quels travaux peuvent être compensés.
Dans la seconde, elle suggère que les compensations soient encadrées par un organisme indépendant. Enfin, pour éviter les surcompensations, elle propose de préciser le dispositif qui modère les péages ou/et réduit la durée de concession lorsque les résultats des autoroutiers excèdent les prévisions initiales.
Des recommandations qui ont peu de chance d’aboutir.
Dans leurs réponses aux magistrats, les ministres de l’Environnement et des Transports, François de Rugy et Élisabeth Borne, se montrent sceptiques.
Ils rappellent que le dispositif évitant les surcompensations existe déjà depuis 2015 et ne peut être rétroactif.
Quant à solliciter un organisme indépendant pour encadrer les compensations, les ministres craignent un alourdissement du processus.

Contactée pour réagir à ce référé, l’Asfa (Association des sociétés françaises d’autoroutes) n’a pas répondu.

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