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dimanche 19 novembre 2017

Affaire Ramadan : François Bayrou est vraiment devenu un personnage de Houellebecq

 


Le 19/11/2017
Pascal Célérier

Après Juppé et Borloo, il ne manquait plus que lui, dans le dispositif macronien de l’automne : François Bayrou.

Sorti de sa pénitence d’une saison pour une délicate affaire d’emplois fictifs pesant sur son parti, il revient dans une interview tonitruante au Parisien, au sujet de « l’affaire » (Ramadan), qui lui permet de donner toute la mesure et du catholique et de l’agrégé de lettres. Qu’il fut.

Il se place d’emblée « au-dessus de la mêlée ».
Mais pas de la seule façon qui aurait convenu, celle de notre confrère Nicolas Gauthier renvoyant dos à dos gauche extrême et extrême gauche.
Non, M. Bayrou a choisi le mauvais angle, celui de la laïcité et de l’islam, dont il est un expert patenté, comme chacun sait.
Et, comme toujours quand on choisit un mauvais angle, il s’y pique, s’y cogne et vise mal.
« Cette violence [du débat Mediapart–Charlie] est un symptôme : c’est le malaise exaspéré d’une partie de la société française, y compris dans les milieux intellectuels, à l’égard de l’islam. Or, la définition même de la laïcité fait que ce malaise ne devrait pas exister. »
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On aime particulièrement cette dernière phrase, son « or », son intellectualisme et son conditionnel. Un irréel du présent ? Un potentiel ?
Car oui, ce malaise ne devrait pas exister, et pourtant il existe.
C’est même un très très gros malaise…
Et ni la laïcité ni sa définition n’y peuvent rien…
À moins qu’elles ne l’accroissent…
 
Continuons la docte démonstration.
 
« Bien que de convictions religieuses différentes, ou sans conviction religieuse, nous appartenons à la même société. Cette séparation entre la conviction religieuse et notre situation de concitoyens est fondamentale. Elle signifie que personne ne peut forcer l’autre à suivre sa propre loi religieuse ou philosophique ! […] Autrement, il n’y aura au bout du chemin que la guerre de religion, les attentats, la haine et l’horreur.
 
Ici encore, même ébahissement devant l’emploi des temps dans la dernière phrase.
« Les attentats, la haine, l’horreur », pour M. Bayrou, c’est de l’« il y aura ».
Du futur.
Quelqu’un pourrait-il décongeler notre Hibernatus ?
Lui dire que tout cela, c’est déjà du passé récent, et du présent…
Notre professeur de lettres ne maîtrise plus les valeurs des temps…
Et, enfin, dernier volet, attendu, de la démonstration. « Pas d’amalgame ! »
 
« Mais contaminer le débat sur l’islam au nom de l’islamisme, le débat sur la religion du plus grand nombre au nom de l’extrémisme religieux, je ne le partage pas. De même que ni le christianisme ni le judaïsme ne se définissent par les pratiques les plus intégristes et les plus agressives. »
 
Pas d’amalgame entre islam et islamisme.
Mais gros amalgame entre islamisme et intégrismes juif et catholique !
On appréciera tout particulièrement le choix du verbe « contaminer »…
Ce catéchisme que plus personne n’ose aujourd’hui débiter, pas même un catholique de gauche, M. Bayrou, lui, le récite encore.
M. Bayrou est un catholique comme on n’en fait plus.
Dieu merci !
Qu’a-t-il donc fait durant sa traversée du désert pour en arriver à ce stade suprême d’aveuglement ?
 
Une petite idée : il a dû lire Soumission, de Houellebecq.
 
L’Histoire retiendra qu’en novembre 2017, François Bayrou s’identifia totalement à François Bayrou.
 
 Puissance de la fiction

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