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mercredi 17 juillet 2024

[POINT DE VUE] Ces parents de gauche dont le fils vote RN…


© Jordan Florentin 
 © Jordan Florentin

 

Isabelle n'en revient toujours pas. 

Elle a 53 ans, est professeur de français et vit en banlieue parisienne. Elle a deux enfants. Rien ne manque à un simple et calme bonheur. Seulement voilà : depuis quelques mois, Isabelle ne dort plus. Elle semble n'avoir plus goût à rien.

 C'est que, depuis les dernières élections européennes, et plus encore depuis les législatives, l'état de son fils aîné la plonge dans une profonde détresse. Charles n'est pourtant pas atteint d'un cancer, il n'est pas fiché à la Banque de France ni dealer au pied d'une barre d'immeubles. C'est pire : Charles vote pour le Rassemblement national.


 

Des parents qui tournent en rond en se grattant la tête

« J’ai déjà croisé des électeurs, des connaissances lointaines et sans importance qui ont voté Le Pen, mais jamais dans la famille. Jamais, souffle Isabelle. C’est la première fois et c’est douloureux. » Voilà comment Libération raconte ce drame familial. Décidément, les journalistes de gauche sont beaucoup plus à l'aise avec la pédophilie ou les Khmers rouges qu'avec les libertés fondamentales. Malheur à l'enfant qui, issu de la caste mandarinale des profs de gauche, s'obstine pourtant à voter pour Marine le Pen. Libé compatit à la détresse d'Isabelle, pensez donc : avec elle, c'est presque tout le lectorat du journal qui souffre mille morts. Rachid Laïreche, l'auteur de l'article, le confirme d'ailleurs : « En juin, j'ai échangé avec plusieurs personnes dans la même situation. Des parents qui tournent en rond en se grattant la tête. » Un enfant facho, c'est une blessure intime. Une brûlure au cœur. Qu'est-ce qui a pu se passer ? Ils ne comprennent pas.

C'est tout de même amusant. Quand des parents de droite ont un enfant qui vote à gauche, ils continuent à l'aimer. Peut-être regrettent-ils une forme d'aveuglement, et encore. En revanche, quand ce sont des parents de gauche, des parents du camp du bien et du parti de la tolérance qui découvrent, médusés, que leur enfant ne pense pas comme eux, là, c'est pas pareil.

En réalité, le plus drôle, dans cette histoire, ce sont les dialogues. Ceux des parents d'abord, évidemment :

- Il ne faut pas se presser [dit Isabelle]. Nous avons un peu de temps devant nous, les prochaines élections se dérouleront au plus tôt l’an prochain en cas de nouvelle dissolution. Nous devons, en tant que parents, faire notre examen de conscience pour essayer de savoir les raisons qui ont poussé notre fils vers le Rassemblement national.

- Je suis d’accord [répond Paul, le mari]. On doit peut-être refaire un peu le film, tout reprendre, et essayer de trouver le moment où nous avons raté quelque chose. […]

Que de gravité ! C'est délicieux. Laissons le mot de la fin au jeune Paul, décidément très lucide :

[Question du journaliste]

- Pourquoi refuses-tu de parler de politique avec tes parents ?

- Ils ne veulent pas discuter mais me faire changer d’avis.

- Ils cherchent aussi à comprendre ton vote.

- Peut-être, mais il n’y a rien à comprendre. Depuis que je suis tout petit, mes parents me disent que je suis libre de faire ce que je veux, qu’ils m’accompagneront. Et aujourd’hui, parce que mon vote ne leur convient pas, ils se braquent.

Bravo à ce jeune homme et longue vie aux enfants qui sont plus intelligents que leurs parents !

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