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vendredi 4 novembre 2022

« Qu’ils retournent en Afrique » : la grande manip ?


 Marc Eynaud 3 novembre 2022

« Dehors », ont hurlé de concert NUPES et majorité présidentielle, cet après-midi, à l’Assemblée nationale.

Alors que le député LFI Carlos Bilongo interpellait le gouvernement sur le sort des bateaux de migrants, le député RN du Médoc Grégoire de Fournas s'est manifesté depuis son siège. « Qu’ils retournent en Afrique », dit-il avoir crié. « Qu'il retourne en Afrique » ou « retourne en Afrique », prétendent avoir entendu les députés NUPES. La saillie a fait se lever dans les rangs et contraint la présidente de l’Assemblée nationale à demander une suspension de séance.

Profitant de la pause, les députés NUPES ont enchaîné les tweets rageurs. « "Retourne en Afrique" lancé par un député nazillon du RN lorsque mon collègue a fait sa question au gouvernement. DEHORS le facho qui a osé dire cette horreur ! DEHORS ! Il n’a plus rien à faire à l’Assemblée », réagit David Guiraud. « En plein Hémicycle, alors qu'il est en train de poser une question au gouvernement, voilà comment est interrompu notre collègue. La haine raciste, crasse, débridée qui s'exprime au cœur de la République », tweete, de son côté, Danièle Obono. Sandrine Rousseau, Benjamin Lucas… alliance d'opportunité, même condamne : « d’un député à l’Assemblée nationale : du FN au RN, le nom change, mais les références hideuses et les habitudes ignobles restent. Quelle honte. »




Mais qu'en est-il, en fait ?

La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a déclaré : « Nous avons du personnel qui est en charge du compte rendu, qui a des enregistrements. Nous allons pouvoir établir la matérialité des faits. » Du côté du RN, on crie au coup monté. « Mon collègue a crié "Qu’ils retournent en Afrique" en parlant des bateaux de migrants et non de notre collègue de La France insoumise », s’agace un élu du groupe RN. En tout cas, le compte rendu officiel de l’Assemblée, qui note par écrit tous les propos officiels et hors micro, est formel, rapporte LCP dans un tweet supprimé depuis (le compte rendu n’est pas encore public à l’heure où nous écrivons ces lignes) : Fournas a dit « Qu’ils retournent en Afrique ». Une phrase politiquement forte, mais à aucun moment la question des origines et de la couleur de peau de son collègue ne se pose. « L'alliance de l'extrême malhonnêteté entre La France insoumise et le gouvernement est pitoyable et ne trompera personne », s’est ému Jordan Bardella. « Grégoire de Fournas a évidemment parlé des migrants transportés en bateaux par les ONG qu’évoquait notre collègue dans sa question au gouvernement. La polémique créée par nos adversaires politiques est grossière et ne trompera pas les Français », a réagi pour sa part Marine Le Pen.

Le député Carlos Bilongo et ses collègues de la NUPES maintiennent en tout cas le caractère raciste et personnel de l’intervention du député Fournas : « On m’a insulté moi et tous les citoyens français qui ont cette couleur de peau. »

Grégoire de Fournas, le principal intéressé, a réagi sur BFM TV : « Je regrette la manipulation de LFI qui cherche des incidents de débat pour ne pas parler du fond [...]. J’assume totalement que les bateaux de migrants n’ont pas à venir dans les ports européens. » Quoi qu’il en soit, il sera difficile de prouver quoi que ce soit : « il » et « ils » se prononcent identiquement. Le dernier mot appartiendra à la présidente du palais Bourbon. Cela risque d’être une affaire de bonne foi. Dans tous les cas, demander à ce que les bateaux de reviennent à leur point de départ, c'est une opinion politique (que chacun a le droit de combattre). Le reste, c’est de la chienlit.

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