« Il n’ y a pas de pénurie. ». Depuis les débuts de l’épidémie de Covid-19, il est commun, lorsque Olivier Véran prend la parole, de prendre les vérités du moment en futurs mensonges, du moins en vérité relative.
Car si la fin de semaine a vu des problèmes d’approvisionnement et de ruptures dans près de 30 % des stations-essence, les Hauts-de-France et l'Île-de-France se retrouvent dans une situation plus tendue encore : ces deux départements affichent respectivement,54,8 % et 44,9 % de leurs stations en rupture de stock. V
oilà qui oblige l’État à puiser dans ses réserves stratégiques et les services d’urgence et de sécurité à privatiser, par intervention des forces de l’ordre, les accès aux pompes...
Une grève des raffineurs
En réalité, le contexte international chahuté n’est pour rien dans la rupture des approvisionnements en carburant. En cause, les mouvements de grève dans les raffineries appartenant aux groupes TotalEnergies et ExxonMobil. Chez Total, les syndicats exigent une augmentation des salaires afin de faire face à l’inflation. Les grévistes demandent une revalorisation de 10 % de leurs émoluments et rappellent le bénéfice exceptionnel de plus de 13 milliards d’euros réalisé par le groupe pétrolier. Lancé depuis une dizaine de jours et gagnant la plupart des infrastructures, le bras de fer entre le siège et les salariés a fini par impacter le pays tout entier. En guise de réponse, le groupe TotalEnergies a détaillé les salaires touchés par ses employés en raffinerie. « La rémunération mensuelle moyenne d’un opérateur de raffinerie de TotalEnergies en France en 2022 est de 5.000 euros par mois, intéressement-participation compris (4.300 euros par mois hors intéressement) », précise le groupe dans un communiqué. L'entreprise ajoute que, « pour aider les salariés à faire face à l’inflation », elle a versé « un avoir de 150 euros en mars 2022 pour les salariés français abonnés au gaz et à l'électricité chez TotalEnergies » et « une prime énergie de 200 euros nets en juillet 2022 pour tous les salariés ». De quoi agacer les Français qui attendent devant des stations vides pour se rendre au travail...
La classe politique s’en mêle
Comme il fallait s’y attendre, cette situation met l’exécutif dans une situation délicate. Un mouvement social à deux doigts de paralyser le pays est fort malvenu dans un contexte national tendu. Alors que les députés s’attellent aux débats autour du budget de l’État, le gouvernement, quant à lui, prépare une réforme des retraites déjà annoncée comme sanglante avec, en sus, une menace d’utilisation du 49-3, soit un passage en force de l’examen parlementaire.
L’opposition, quant à elle, s’en donne à cœur joie. « La panique de la bourgeoisie est totale », se réjouit, sur Twitter, le député insoumis Antoine Léaument. Le Monsieur Numérique de Jean-Luc Mélenchon a bien vite oublié que ce mouvement social paralysait surtout les travailleurs modestes, bien en peine de gagner aussi bien leur vie que les raffineurs du groupe TotalEnergies.
Vers une sortie de crise ?
Du coté des dirigeants de TotalEnergies, on se dit prêt à avancer la réunion de négociation salariale annuelle. À l’Élysée, Emmanuel Macron a coupé court à toute intervention officielle de l’État : « On ne va pas rentrer dans une situation où c'est le président de la République qui va faire les négociations salariales chez Esso et Total, parce que là, on va partir "cul par-dessus tête". »
Emmanuel Macron: "On ne va pas rentrer dans une situation où c'est le président de la République qui va faire les négociations salariales chez Esso et Total, parce que là, on va partir 'cul par dessus tête'" pic.twitter.com/Gwhr5M2U6X
— BFMTV (@BFMTV) October 10, 2022
Pourtant, à l’Élysée comme à la NUPES, on a conscience de ce qui se joue et on craint que les raffineurs n'aient un rôle de détonateur. Comme un tour de chauffe syndical avant un automne brûlant qui commencera le 16 octobre avec la manifestation des Insoumis contre la vie chère. La chef du groupe Insoumis au palais Bourbon ne s’y trompe pas : « Cette Marche du 16 octobre est une réponse à Emmanuel Macron. C’est lui qui empêche les gens de marcher et de circuler en refusant l’augmentation des salaires. Soutien plein et entier aux salariés de Total et Exxon en grève », a tweeté Mathilde Panot. Force est de constater que le sort de millions de travailleurs vivant dans des zones sans transports en commun intéresse peu La France insoumise : ces gens-là ne votent pas pour eux. Il est plus rentable pour l’aile gauche de soutenir des grévistes à 5.000 euros mensuels. C’est à peu près le salaire d’un député NUPES (indemnité de frais de mandat excepté), cela doit rapprocher...
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