Publié par Gabriel | Fév 26, 2021 |
Ce que nous apprend la récente méta analyse de l’IHU de Marseille (IHU- Million & Coll)
A la suite de la parution d’articles frauduleux dans des revues prestigieuses comme The Lancet et le New England Journal of Medecine, (NEJM), une équipe de l’IHU s’est intéressée à l’étude des facteurs pouvant influencer les résultats d’études sur les protocoles thérapeutiques utilisés dans la Covid-19 (HCQ, HCQ /AZT et Remdesivir – source n°1).
Parmi tous les facteurs habituellement analysés (voir paragraphe 2), l’originalité de cette méta analyse est d’avoir ajouté le facteur « conflits d’intérêt », à savoir les liens financiers entre les médecins auteurs et le laboratoire Gilead souhaitant promouvoir le Remdesivir.
Le laboratoire Sanofi, qui vend l’HCQ en Europe, n’était pas financièrement intéressé par l’utilisation de ce traitement dans la Covid-19. En effet, le coût du traitement à base d’HCQ/AZT ne dépassait pas les 10€ pour 10 jours de traitement versus plus de 5000€ pour le Remdesivir.
L’objectif de cette méta analyse était de déterminer les biais les plus influents sur les résultats des études thérapeutiques cliniques dans le délicat contexte qui oppose les études randomisées aux études observationnelles et l’HCQ au Remdesivir.
Les résultats sont édifiants.
On dénombre :
- 18 études observationnelles sans conflits d’intérêt avec le laboratoire Gilead. Elles sont TOUTES FAVORABLES à l’utilisation de l’HCQ en traitement pour la COVID-19.
- 4 études randomisées et 3 méta-analyses de datas dirigées et défendues par des experts recevant des fonds de GILEAD, directement ou par le biais d’institutions. Elles sont TOUTES défavorables au protocole HCQ/AZT et bien sûr TOUTES favorables au Remdesivir.
Ainsi le facteur le plus prédictif de résultats en faveur du Remdesivir est la présence ou non d’un conflit d’intérêt :
- Pas de conflits d’intérêt => indicateur associé aux études observationnelles => études favorables à l’HCQ
- Conflits d’intérêt => indicateur associé aux études randomisées => études défavorables à l’HCQ et favorables au Remdesivir
Mis en lumière avec l’épidémie actuelle, ce phénomène n’est pas nouveau du fait de l’importance croissante des laboratoires dans le financement de la recherche médicale (plus de 60%) et de la diminution des fonds institutionnels (CNRS, INSERM etc.).
À noter qu’après un an de polémique, le Remdesivir a été déclaré inefficace et toxique par l’OMS, puis non recommandé par les agences du médicament de nombreux pays. Malheureusement l’Union Européenne a acheté à Gilead pour 1,5 milliards d’euros de traitement quelques jours avant la déclaration de l’OMS, ce que Gilead ne pouvait ignorer puisqu’il a été averti de l’avis défavorable à paraître. Mais malgré tout cela, nous apprenons par la presse (Challenges) que l’agence européenne du médicament (EMA) souhaite encore évaluer un usage étendu du Remdesivir aux patients n’ayant pas besoin d’assistance respiratoire (source n°2) !
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Études cliniques observationnelles et randomisées pour « les Nuls »
Pour étudier l’efficacité d’un médicament, il existe 2 grandes méthodologies :
a/ Études observationnelles, principalement utilisées par des médecins.
Les plus anciennes. On étudie sur des patients atteints d’une maladie les effets d’un traitement. On compare ces patients traités à des patients non traités, autrement dit à l’évolution naturelle de la maladie. Par exemple en maladie infectieuse, on administre un antibiotique à des patients atteints d’infections pulmonaires, de tuberculose, etc. et on observe si avec le traitement antibiotique les patients guérissent mieux, plus vite, s’ils meurent moins, s’ils ont des séquelles moins importantes, etc.
b/ Études randomisées, initiées et utilisées par les groupes pharmaceutiques.
Beaucoup plus récentes. Elles sont censées éviter les biais (risques d’interprétation) que l’on pourrait faire à partir de données non comparables. L’idée est donc de créer des groupes (traités et non traités ou placébo) homogènes en termes d’âge, de comorbidités, de genre, etc. L’affectation des participants dans les groupes se fait de manière aléatoire par tirage au sort. Ce choix peut se faire uniquement à l’insu des participants (simple aveugle) ou également à l’insu des chercheurs et des cliniciens (double aveugle). La finalité des méthodes « en aveugle » est d’écarter un éventuel effet placebo. On ne traitera pas ce point ici pour simplifier au mieux les comparaisons. Pour information l’essai Discovery est un essai « ouvert », c’est-à-dire ni « simple aveugle », ni « double aveugle » (source n°3). En effet, patients et médecins connaissaient le traitement administré.
Avant de démarrer une étude randomisée on doit :
- Faire une étude prospective pour définir les critères d’inclusion des patients et constituer ainsi deux groupes, traités et non traités ou placebo, équivalents en termes d’âge, de comorbidité, etc.
- Définir le protocole thérapeutique (molécule utilisée, posologie, dosage, mode d’administration, etc.) ainsi que les critères retenus pour évaluer l’efficacité (létalité, amélioration clinique, amélioration de marqueurs biologiques, etc.).
Une fois l’étude démarrée, on ne peut absolument pas changer un seul des paramètres ainsi définis dans la méthode.
Or, comme vous pourrez le constater en lisant la source n° 4 (extraits photos 1 & 2 ci-après), les indicateurs de mesure d’efficacité de l’essai Discovery ont été modifiés environ un mois après le démarrage des essais (fin avril) au moment où des études menées par ailleurs commençaient à constater que non seulement le Remdesivir était inefficace, mais aussi dangereux (photos 3 & 4 ci-après et source n° 5). En effet les 5 premiers indicateurs principaux, et les « plus graves », devant être mesurés à J15 ont été relégués aux rang d’indicateurs secondaires. Les 3 « moins graves » ont été conservés et les délais d’observation ont été changés de J15 à un intervalle de 1 à 29 jours :
- N°1 : Décès
- N°2 : Hospitalisés, avec ventilation mécanique invasive ou oxygénation des membranes extracorporelles (ECMO)
- N°3 : Hospitalisés, avec ventilation non invasive ou sur des appareils à oxygène à débit élevé
- N°4 : Hospitalisés, nécessitant de l’oxygène supplémentaire
- N°5 : Hospitalisés, ne nécessitant pas d’oxygène supplémentaire – nécessitant des soins médicaux continus (apparentés ou non au COVID-19)
Quelle est l’étude clinique la plus efficace ?
Ce qui est intéressant, c’est que la comparaison des deux méthodes dans l’histoire de la médecine n’a pas permis de trancher sur l’avantage de l’une ou l’autre, notamment dans les maladies infectieuses où traiter par un antibiotique ou un antiviral permet de rapidement observer un bénéfice ou pas.
Comment comprendre la pertinence d’une publication clinique ?
Lorsque l’on souhaite évaluer la pertinence d’une publication clinique, on va s’intéresser aux différents points évoqués :
- Type de méthodologie : observationnelle ou randomisée.
- Puis dans les deux cas :
- L’homogénéité des groupes (nombre, âge, sexe, score de gravité etc.)
- Les protocoles thérapeutiques que l’on veut analyser/comparer :
- Groupe traité et groupe témoin (efficacité du traitement)
- Groupe traitement A et groupe traitement B (quel traitement est le plus efficace)
- Définition des critères cliniques d’évaluation d’efficacité du traitement: diminution ou disparition des symptômes, modifications biologiques comme par exemple la charge virale, la létalité (ratio décès/malades), etc.
- La robustesse des analyses statistiques :
- Les tests utilisés sont-ils compatibles avec le nombre de patients ?
- S’agit-il d’analyse mono variée (évaluation d’un seul critère) ou multi variée (évaluation de plusieurs critère) pour tester leur influence sur les résultats (traitement versus pas de traitement, traitement A versus traitement B, âge et comorbidités, etc.)
Il conviendra enfin d’évaluer si les conclusions sont bien en accord avec les résultats énoncés et leur « significativité statistique ». On peut ainsi observer une tendance, mais les statistiques ne permettent pas de conclure, pour des raisons très diverses comme par exemple un nombre insuffisant de patients dans les groupes (cas des essais des vaccins à ARNm de Pfizer pour les personnes de plus de 75 ans) ou des effets cliniques ou biologiques pas assez différents.
N’oublions jamais que les plus grands progrès de la médecine, y compris actuels, se font grâce à l’observation, au contact direct avec le patient, au réel.
Pour conclure, nous rendrons ici hommage à Hippocrate ainsi loué par Ménuret de Chambaud (médecin et encyclopédiste français – 1739-1815) dans son article « Observateur » de l’Encyclopédie :
« Hippocrate a été le premier et le meilleur de tous les médecins observateurs ; nous n’hésitons pas à le proposer pour modèle à quiconque veut suivre une semblable route, c’est-à-dire, s’adonner à la partie de la médecine la plus sûre, la plus utile et la plus satisfaisante. »
SOURCES :
- Méta analyse IHU – Million & Coll : https://www.mediterranee-infection.com/wp-content/uploads/2020/04/MS-4.pdf
- Article Challenges : https://www.challenges.fr/top-news/coronavirus-l-ema-va-evaluer-d-ici-l-ete-un-usage-etendu-du-remdesivir_752377
- INSERM descriptif Discovery essai ouvert : https://www.inserm.fr/actualites-et-evenements/actualites/covid-19-demarrage-essai-clinique-discovery
- Changements indicateurs Discovery : https://clinicaltrials.gov/ct2/history/NCT04280705?A=10&B=15&C=Side-by-Side#OutcomeMeasures
- Article Express : https://www.lexpress.fr/actualite/societe/sante/echec-apparent-d-un-essai-clinique-de-l-antiviral-remdesivir-contre-le-covid-19_2124531.html
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