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mercredi 13 mai 2020

Covid-19 : des chiffres trompeurs





EDITION N°3449 - PARU LE 08/05/2020 - ECRIT PAR Chistian Authier
 
Présentations biaisées, statistiques hors contexte, éléments occultés : la crise du Covid-19 offre un exemple peu commun de désinformation.

«Je ne crois aux statistiques que lorsque je les ai moi-même falsifiées», disait Winston Churchill. 

On prête une autre phrase sur le sujet à l’ancien Premier ministre qui aurait déclaré, qu’à l’instar des bikinis, ce que les statistiques montrent est intéressant, mais que ce qu’elles cachent est essentiel… On ne saurait mieux dire à propos des statistiques et des chiffres dont nous sommes abreuvés avec la crise du Covid-19 à l’image en France des points-presse du directeur général de la Santé Jérôme Salomon. 
Chaque soir, ou presque, une litanie macabre est égrenée avec le nombre de pays touchés et le «hit-parade» des nations comptant le plus grand nombre de décès avant un décompte hexagonal mêlant personnes infectées, personnes étant entrées à l’hôpital, personnes admises en réanimation, lits libérés, etc. 
Une somme d’informations qui doit plus à la «communication politique» au sens large du terme qu’à la présentation la plus objective possible des faits.

Présentations biaisées 

En réalité, l’absence de mise en perspectives de certains chiffres sert à valider les choix opérés par l’Etat, dont au premier lieu le confinement strict de la population. 
Il s’agit donc de faire peur, notamment pour pousser les individus à suivre le confinement, de mettre en avant les éléments les plus inquiétants, de minimiser ou d’occulter ceux qui pourraient relativiser l’ampleur du péril. 
Dans ce que l’on pourrait qualifier de manipulation ou du moins de présentation biaisée, placer les Etats-Unis en tête des pays les plus touchés en terme de victimes est justifié en chiffre absolu, mais n’a guère de sens. 
On ne peut pas comparer un pays de près de 330 000 millions d’habitants avec, par exemple, la France et ses 67 millions d’habitants ou avec la Belgique et ses 11,4 millions d’habitants… 
Or, si l’on considère le nombre de décès en proportion de la population (le seul critère qui ait du sens), la France, à ce jour, s’en tire beaucoup plus mal que l’Amérique du tant honni Donald Trump. Nous comptions ainsi (chiffres du 3 mai) 37,2 morts pour 100 000 habitants contre 20,5 aux Etats-Unis tandis que c’est la Belgique qui détient depuis un moment le triste record mondial de plus forte mortalité avec 68,7 décès pour 100 000 habitants.

Autre présentation fallacieuse : nous sommes face à une pandémie mondiale touchant 195 pays. 
Là encore, c’est factuellement vrai, mais cela cache l’essentiel. 
Si l’on considère encore une fois le nombre de décès, selon le décompte effectué par l’OMS le mardi 5 mai (à 11h GMT), on dénombrait 251 000 victimes à travers la planète. 
Cependant, en observant de plus près les chiffres, on se rend compte que cinq pays représentent à eux seuls plus des deux-tiers des victimes : Etats-Unis (69 000), Italie (29 000), Royaume-Uni (28 700), Italie (25 400) et France (25 200), soit 180 000 au total
Par ailleurs, si l’on ajoute les dix autres nations les plus touchées en chiffres absolus – soit la Belgique (7900), l’Allemagne (6900), les Pays-Bas (5100) et la Suède (2800) en Europe ainsi que le Brésil (7100), l’Iran (6300), la Chine (4600), la Turquie (3400), le Canada (3800) et le Mexique (2100) pour le reste du monde –, nous arrivons à 230 000 victimes pour un chiffre total de 250 000. Ce qui signifie que 15 pays uniquement concentrent environ 92 % des décès… 
On imagine donc ce que pèse la létalité du Covid-19 pour les 180 autres pays. 
En résumé, on peut dire que la très grande majorité des nations n’est pas ou peu touchée.
Mais ces réalités pèsent peu face au rouleau compresseur médiatique et politique, aux projections apocalyptiques des uns et des autres, aux discours sur une épidémie telle que l’humanité n’en avait pas connue depuis la grippe espagnole. 
Faux encore. 
En 1968, un virus respiratoire venu de Hong Kong tua un million de personnes dans le monde et fit 31 000 victimes en France.
Dix ans auparavant, la «grippe asiatique» causa plus d’un million de décès dans le monde (au moins 15 000 en France).

Age moyen des décès : plus de 80 ans

Par ailleurs, quand les chiffres réels font défaut, il suffit d’en inventer – pardon de «modéliser» comme l’on dit en termes «scientifiques». 
Ainsi, le 12 mars, le Conseil scientifique – groupe de dix experts mis en place par Emmanuel Macron le 11 mars – présentait dès le lendemain à l’Elysée une modélisation établissant que la France compterait entre 300 000 et 500 000 victimes du Covid-19 en l’absence de mesures radicales. 
C’est donc notamment sur cette projection, particulièrement catastrophiste et ne faisant nullement l’unanimité dans la communauté scientifique, qu’a été décidé le confinement quasi intégral de la population. 
Par la suite, d’autres études ont estimé le nombre de vies qui auraient été «sauvées» chez nous grâce au confinement. 
Ainsi, fin avril, l’Ecole des hautes études en santé publique affirmait que le confinement avait évité 61 739 décès dans les hôpitaux. 
Il faut saluer la remarquable précision de ces scientifiques capables de chiffrer à l’unité près les vies virtuellement sauvées… 
D’autant qu’au même moment, le ministre de la Santé était incapable de faire preuve d’une telle précision à propos du nombre de tests disponibles après le confinement : entre 500 et 700 000 par semaine.
En revanche, il y a un autre chiffre – pourtant bien réel celui-ci et relativement facile à établir – sur lequel les autorités politiques et sanitaires ne communiquent pas : l’âge moyen des victimes du Covid-19 en France. 
Il faut chercher, fouiller, ne pas se décourager, mais les études officielles disponibles offrent les mêmes données. 
 L’âge moyen du décès pour cause de Covid s’établit à plus de 80 ans (de 80,5 à 84 selon les études). 
On retrouve d’ailleurs ce même âge moyen à l’étranger. 
Plus précisément, entre le 1er mars et le 21 avril, 71 % des personnes décédées en France avaient plus de 75 ans, 18 % entre 65 et 74 ans (donc 89 % de plus de 65 ans), 10 % entre 45 et 64 ans, 1 % entre 15 et 44 ans et les moins de 15 ans se situaient à 0 %… 
A la lumière de ces chiffres, certaines communications officielles paraissent relever du bourrage de crâne et de la propagande (des fake news, dirait Sibeth Ndiaye). 
Ainsi, le 10 avril, lorsque Jérôme Salomon annonça à la télévision lors de son point presse le décès en Île-de-France d’un enfant «de moins de dix ans» ayant été testé positif au Covid-19. 
De quoi effrayer légitimement la population. 
Et peu importe que le directeur général de la Santé indique ensuite que la mort de cet enfant avait des causes «multiples» (sic) et que ce dernier souffrait d’autres pathologies. 
Outre l’indécence du procédé (instrumentaliser la mort d’un enfant) et l’absence de toute rigueur scientifique (aucune certitude que le décès soit dû au Covid), on a ici un exemple de la désinformation d’Etat la plus cynique qui soit. 

Une fois cette crise sanitaire passée viendra l’heure des comptes. 

Il n’est pas impossible que certains à en rendre.

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