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lundi 20 janvier 2020

Les violences policières sont toutes des violences illégitimes.




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La reconnaissance du bout des lèvres, à la fois par le pouvoir et les médias qui le servent, de l’existence de « violences policières » nous a encore offert une séquence intéressante.
 
Quiconque suit les réseaux, s’est penché sur le travail remarquable du journaliste David Dufresne, ou a lu les articles du Monde sait à quoi s’en tenir.
 
Encouragée par le pouvoir à utiliser une violence débridée, protégée par une justice refusant de la contrôler et de la sanctionner, la police française s’est transformée en une milice qui par la violence et l’intimidation porte gravement atteinte à la liberté constitutionnelle de manifestation.
Chez les soutiens du président et en particulier les « journalistes militants » du macronisme deux sortes d’arguments ont été avancés pour le justifier.
Tout d’abord que très rares (!), ces violences policières n’étaient que la réponse aux « effroyables » violences des manifestants, et ensuite que la police n’utilisait à cette occasion que la « violence légitime » dont l’État est dépositaire.
C’est simplement une manipulation, les « violences des manifestants » abondamment et systématiquement filmées et photographiées par la presse du pouvoir ont été celles de groupuscules provocateurs parfaitement identifiés et utilisés pour justifier la « riposte » policière.
Ensuite on nous a servi la légitimité juridique de la violence policière, les forces de l’ordre usant d’un « droit républicain » de frapper, d’amputer, d’éborgner et de détenir.
C’est un dévoiement complet du principe de légitimité dans toutes ses définitions.

Tartufes et menteurs
 
Avant de revenir sur la question de la légitimité pour l’État d’utiliser la violence, on se permettra quelques remarques.
Sur la tartuferie de ces « journalistes militants » soutiens acharnés de l’aventure Macron, occultant soigneusement pendant plus d’un an une réalité que l’étranger regardait et commentait avec effarement, d’une police transformée en milice de nervis, et qui font maintenant semblant de découvrir ce que tout le monde voyait et savait.
Un ban pour Anne Sinclair qui avec son tweet publié au spectacle de la fameuse vidéo du « croche-pattes », faisait semblant de découvrir la lune.
Il y a aussi les inepties proférées par la macronie, gouvernementale ou pas.
L’Oscar revenant comme souvent à Sibeth Ndiaye proférant une nouvelle énormité et nous confrontant comme toujours à la question obsédante : est-elle à ce point parfaitement niaise, ou s’agit-il d’un cynisme d’acier ?
« Je ne pense pas qu’on puisse dire dans un État de droit, dans une démocratie extrêmement solide comme celle de notre pays, qu’il y a des violences policières, comme s’il y avait de manière générale chez les forces de l’ordre une attitude consistant à aller tabasser des manifestants systématiquement ou à violenter des personnes sans raison».
Si, si Madame c’est bien le cas, et il y a des centaines de vidéos et des milliers de témoignages qui en attestent.
Et lorsque vous dites « quand il y a eu des fautes, elles sont systématiquement sanctionnées », c’est simplement un de ces mensonges grossiers que vous revendiquez pouvoir proférer « pour protéger le président ».
La justice depuis le début, dans le même temps où elle lançait une répression de masse sans précédent contre le mouvement social des gilets jaunes, a refusé de remplir sa mission de contrôle de la violence policière.
Il y a eu une condamnation à trois mois de prison avec sursis (quelle sévérité !) pour un policier qui avait lancé un morceau de béton de la taille d’une brique sur des manifestants.
Et c’est tout !
Pas une suspension, pas une garde à vue, pas une révocation, pas une suspension, pas de jugement, juste une poignée de mises en examen pour des centaines de violences avérées.
Et parallèlement des dizaines et des dizaines de classement sans suite scandaleux.
Comment pouvez-vous à ce point vous moquer du monde ?
 
Le monopole de violence qu’est que c’est ?
 
Alors comment comprendre l’utilisation par les amis du pouvoir du concept de « violence légitime » dont disposerait la police, pour répondre à l’émotion de l’opinion publique devant les exactions policières qui se déroulent depuis un an et dont l’évidence a fini par s’imposer ?
C’est tout simplement un abus de langage avançant l’idée d’une d’une « autorisation juridique » donnée aux forces de l’ordre de violenter les corps dans l’intérêt de l’État.
D’abord il y a une impropriété des termes puisqu’il s’agit en fait de ce que Max Weber appelait « le monopole de la violence » que seul l’État sur un territoire donné est autorisé à utiliser.
Cette violence qui se caractérise par le « pouvoir sur les corps » est déléguée à la police à l’armée et ce qui est essentiel à la Justice.
Pour deux raisons, d’abord c’est celle-ci qui punit les délinquants et qui si nécessaire les prive de leur liberté et enferme leur corps entre quatre murs (et auparavant pouvait le couper en deux).
Mais elle doit aussi exercer son contrôle sur l’utilisation de la violence par les agents armés de l’État.
Il est important de rappeler pour que cette violence dont l’État a le monopole soit « légitime », deux conditions indispensables doivent être réunies : d’abord que son usage en soit défini et réglementé par la Loi.
En nature, en intensité, et en proportionnalité, pour que ceux qui vont en disposer sachent les limites de leurs pouvoirs et les risques de sanctions qu’ils encourent.
Et qu’ensuite le caractère légal et régulier de cet usage soit contrôlé par le juge.
La première condition est réalisée : user de la violence physique dite « légitime » par les forces de l’ordre est strictement encadré et le Code pénal prévoit une répression spécifique pour les agents publics titulaires par délégation de l’État du pouvoir sur les corps.
Si l’auteur d’une violence illégale parce qu’excessive et non proportionnelle commise à l’égard de ses concitoyens, est un agent public, c’est une circonstance aggravante et elle devra être plus sévèrement punie que celle commise par un simple citoyen.
Cette situation juridique et institutionnelle est fondamentale dans la mesure où l’État doit pouvoir conserver la totale maîtrise de l’usage qui est fait de ses pouvoirs par son personnel armé.
 
Sans le contrôle de la Justice toute violence est illégitime
 
Mais l’absence de la deuxième condition, celle du contrôle juridictionnel prive « le monopole de la violence » dont dispose l’État de sa légitimité juridique et démocratique.
Car, force est de constater que si la loi a bien créé les outils légaux d’encadrement, la défaillance quasi totale de la justice française dans l’accomplissement de cette mission de contrôle a complètement déréglé le dispositif républicain et démocratique.
La responsabilité du pouvoir exécutif est évidemment lourdement engagée qui a laissé faire quand il ne l’a pas directement organisé, mais celle de la Justice est première.
Emmanuel Macron utilisant à l’égard des policiers et gendarmes de l’expression de « forces de sécurité intérieure » caractérise un glissement sémantique à la fois troublant et inquiétant.
Les « forces de sécurité extérieures et intérieures » ce sont les forces armées.
Gendarmes et policiers sont des forces de l’ordre.
On ne peut malheureusement que constater qu’aujourd’hui les conditions institutionnelles et juridiques indispensables à l’usage du « monopole de l’État sur la violence » ne sont plus réunies.
Ce qui veut dire que de ce point de vue notre pays a basculé dans une forme d’arbitraire, tout simplement.
Un pouvoir minoritaire a décidé de ne plus respecter les libertés démocratiques fondamentales pour traiter un mouvement social profond.
Il a pour cela donné carte blanche à une police dont une partie est dévoyée.
 La nomination de Didier Lallement  au poste de préfet de Paris, l’attitude des syndicats de policiers vis-à-vis du pouvoir multipliant les chantages, l’invraisemblable brutalité des forces de l’ordre sur le terrain dont témoignent des centaines de vidéos, tout cela augure mal de la capacité d’Emmanuel Macron à rétablir l’autorité républicaine sur la police.
 
Si jamais lui prenait l’envie de le faire, ce qui est malheureusement très improbable.

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