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vendredi 3 mai 2019

Macron, ou l’art d’être le saint patron des bonimenteurs…

 
 
 
La « Conférence de presse à l’issue du Grand Débat national » du Président Macron, le 25 avril, dix jours après l’incendie dévastateur de la cathédrale de Paris, fut un chef-d’œuvre de vacuité, de sfumato (l’art de l’estompe)… mais, hélas, sans le chromatisme flamboyant d’un Turner !

En un mot, l’art de parler pour ne rien dire, d’enfoncer des portes ouvertes et d’enfiler des perles d’inculture… « Cet art d’être français, c’est un attachement particulier à notre langue, notre culture, et à quelques permanences. »

Mais quelles sont ces improbables « quelques permanences » ?
Le problème, chez cet homme, n’est pas seulement qu’il ne dise rien, mais qu’en outre, il le dise mal… ce dont personne ne semble apparemment s’apercevoir.
Ce qui interpelle quant à l’excessive emprise de la pensée dominante et pose, accessoirement, la question de savoir jusqu’où peut aller l’adhésion à certaines rationalisations ?
Comme, par exemple, la version péremptoire de la cause accidentelle dans l’incendie de Notre-Dame. Explication qui mériterait d’être confrontée aux lois de la physique ordinaire (nature de la charge thermique nécessaire à l’embrasement de la charpente et vitesse de propagation du feu)…
Une négation du réel tombée verticalement de l’Olympe (ou de son annexe, place Beauvau) entraînant une stupéfiante et immédiate soumission de la plupart des cerveaux – pourtant réputés cartésiens – peuplant la Macronie (autrement appelée « start up nation »).
Au reste, Maître Macron a la syntaxe embarrassée (qui ne s’en aperçoit ?), est par ailleurs un retoqueur de première : pas de référendum d’initiative citoyenne, pas de mandat impératif, surtout pas de proportionnelle intégrale, mais beaucoup de super radars et un 80 km/h pour tous, très égalitaire (exception faite, bien sûr, des ayants droit).
Bref, malgré la crise des gilets jaunes, inédite par sa durée en dépit des annonces régulières de sa mort prochaine (on a vu ce qu’il en était, ce 1er mai), Macron ne s’est pas privé de balayer d’un revers de main toute idée de consultation des Français à brève échéance : « Est-ce que j’ai […] une idée précise de telle ou telle décision qui serait soumise à référendum ? Non. C’est une liberté que je conserve et qui, à certains moments, peut permettre de clarifier les choses, un débat. »
Mais n’est-ce pas, justement, ce que lui demande le pays réel, depuis le 17 novembre 2018 ?
Clarifier d’urgence une situation d’asphyxie économique devenue ubuesque pour les petits revenus et alléger les infernales contraintes bureaucratiques multipliées sous couvert de sécurité routière ou de transition écologique ?
Cela, pendant que la France bat tous les records mondiaux en matière d’épandages de pesticides* ? Serions-nous devenus chèvres pour tourner ainsi en rond au sortir d’un grand débat dont rien, nada, n’est valablement sorti ?
Malgré tout, au sein du discursus présidentiel, derrière une syntaxe disloquée à la Picasso, subsistent des parties dures, à l’instar de l’os dans la seiche : celles, entre autres, de refuser toute concession et de maintenir le cap ne varietur… même si, à chaque instant, l’orateur semble vouloir donner, par ses paroles, raison à la grogne populaire.
Ce champion du déconstructivisme verbal est, à ce titre, un as de l’emballage façon Christo, promis, pour sa part, à exercer bientôt, après le pont Neuf, son art sur l’Arc de Triomphe.
Quel programme !
In fine, le plus surprenant reste que si peu osent dénoncer le procédé.
Souligner à quel point le roi est nu et ses méthodes insultantes pour l’esprit.
Dès les premiers mots de sa conférence, n’a-t-il pas, selon sa vieille habitude, craché son mépris de caste vis-à-vis de cette France profonde, celle des gilets jaunes récupérés par les violences de la société : l’antisémitisme, l’homophobie, les attaques contre les institutions, les journalistes parfois, les forces de l’ordre…

Le style, c’est l’homme, n’est-ce pas ?

* La France est le troisième consommateur mondial de pesticides agricoles, avec 90.000 tonnes environ par an. Soit quelque 3 kg de pesticides (fongicides, herbicides et insecticides) déversés chaque seconde.

Jean-Michel Vernochet

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