À 18 h 04, Emmanuel Macron, devant trois cents journalistes, s’assied à son bureau, placé sur une estrade.
Pour une fois, il arrive presque à l’heure.
Son discours préliminaire doit durer, selon son entourage, une vingtaine de minutes.
Ensuite, place aux questions.
Mais le temps passe. Et quand, au bout de 56 minutes, il achève son exposé, on s’aperçoit qu’il n’a pratiquement rien dit qu’on ne savait déjà et qu’après de longues semaines de « grand débat », il joue les prolongations.
Notre Président commence par expliquer ce qu’il a appris de ce « grand débat » : sur l’injustice fiscale, territoriale, sociale, sur l’absence de confiance envers les élites, le sentiment d’abandon et le manque de considération qu’éprouvent beaucoup de Français.
Il a beaucoup réfléchi.
A-t-il fait fausse route ?
Non, répond-il, catégoriquement.
À bien des égards, les « fondamentaux » de son action étaient justes : ils doivent être poursuivis, fortifiés, accélérés.
Regardez, les résultats commencent à venir !
Il faut juste placer « l’homme » un peu plus « au cœur de notre projet », retrouver davantage « la maîtrise de notre destin » par le projet national et européen.
Il faut aussi demander à chacun « le meilleur de lui-même » et cultiver « l’art d’être Français ».
Que c’est beau ! Mais encore ?
Il passe en revue, avec un débit toujours aussi rapide, comme s’il avait peur de ne pas pouvoir tout dire, ce que l’on sait déjà.
Il veut réhabiliter les « élus » de la République, notamment les maires, il veut défendre « la démocratie représentative », qui est essentielle, instaurer une « part significative » de proportionnelle, limiter le nombre de mandats dans le temps.
Bref, tout ce qu’il y avait dans la réforme constitutionnelle, qu’il n’a pu faire adopter.
Le vote obligatoire ou le vote blanc, ce n’est pas la bonne solution.
Il faut savoir choisir, même si c’est « le moindre mal ».
Il pense à lui, sans doute, dont le score à la présidentielle aurait été encore plus réduit si l’on avait compté le vote blanc.
Il rejette aussi le référendum d’initiative citoyenne, mais on pourrait faciliter le référendum d’initiative partagée.
On a le droit, ensuite, à une série de propos, toujours vagues, sur la nécessité de changer le mode d’organisation de la République, sur la proximité des services publics, sur la réforme de la haute fonction publique, sur la gestion des carrières…
Au passage, il justifie la suppression de l’ISF, annonce une baisse (imprécise) des impôts « pour ceux qui travaillent ».
Mais les vraies inégalités ne sont pas fiscales, elles sont de naissance, d’origine : il faut corriger tout cela.
Le gouvernement ne va pas manquer de boulot.
Il va quand même rétablir, tout de suite, la réindexation des retraites de moins de 2.000 euros et les autres à partir de 2021.
La dépendance ? Il faut définir une stratégie pour « le grand âge ».
D’ailleurs, la réforme des retraites par points permettra plus de justice.
Il revient, à la fin, qu’on attend avec impatience, sur « l’art d’être Français », sur la laïcité, sur la politique migratoire, demande d’être « intraitable » avec l’« islamisme politique » et le « communautarisme » : il veut rebâtir « un patriotisme inclusif » !
Ah, qu’en termes galants ces choses-là sont mises !
Si vous n’êtes pas convaincu de son amour de la France, après ces déclarations !
Il affirme même qu’il « se fiche de la prochaine élection [présidentielle] ».
Il ne pense qu’à la réussite de son pays !
Ses partisans ont la larme à l’œil ou sont béats d’admiration.
Les autres, plus nombreux, se disent qu’une fois de plus, il s’est moqué des Français.
Philippe Kerlouan
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