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samedi 16 mars 2019

ADP : Dieu nous garde des énarques !

 
 



Dominique de Villepin, Premier ministre de Jacques Chirac entre 2005 et 2007, avait procédé à la désastreuse privatisation des autoroutes en 2006.

La même faute est commise, aujourd’hui, par un autre énarque, Édouard Philippe, avec la privatisation d’ADP, la société qui gère les aéroports de Paris.

D’ailleurs, une procédure administrative menace la décision prise encore par un autre énarque, en tant que ministre de l’Économie, un certain Emmanuel Macron, lorsqu’il avait cédé les parts de l’État à hauteur de 49,99 % de l’aéroport de Toulouse-Blagnac à un consortium chinois, Casil, accusé par la Cour des comptes et un rapport parlementaire de siphonner les caisses de la société pour verser trente millions d’euros à ses actionnaires, dont 16,7 tirés des réserves !
Le rapporteur public devant la cour administrative d’appel de Paris demande l’annulation de cette vente, et voilà que la même bande remet ça !
La privatisation, ou plutôt la concession des autoroutes par le gouvernement Villepin, considérée à l’époque par le sémillant Premier ministre comme une bonne affaire, apparaît maintenant comme une bévue, un choix à court terme fait au mauvais moment.
L’affaire a été excellente pour les sociétés qui gèrent désormais les autoroutes.
Leurs bénéfices ont augmenté, en dix ans, de 20 %, la hausse des péages de 20 % aussi.
1,5 milliard d’euros de dividendes ont été versés aux actionnaires.
C’est autant de perdu pour notre État impécunieux.
La Cour des comptes a estimé que la cession à hauteur de 14,8 milliards d’euros avait été sous-évaluée de 10 milliards !
L’Autorité de la concurrence a dénoncé la « rente » que constitue la gestion des autoroutes au profit des actionnaires et au détriment des utilisateurs.
L’expérience semble ne rien avoir appris à cette caste prétentieuse qui conduit notre pays d’échec en échec depuis des décennies en confirmant le jugement d’Einstein : « La folie, c’est de se comporter de la même manière et de s’attendre à un résultat différent. »
ADP a augmenté ses bénéfices de 6,9 % en 2018.
Pour le coup, il ne s’agit pas de « bijoux de famille », mais bel et bien d’un excellent placement familial qui vient, chaque année, compenser quelque peu les dépenses excédentaires de l’État.
Le gouvernement, comme ses prédécesseurs, use en fait d’un expédient : sur une année, obtenir une rentrée importante pour réduire la dette afin de financer un fonds pour l’innovation.
En fait, il perd la proie pour l’ombre et sa solution consiste à léguer le problème amplifié à ses successeurs.
La seule réponse aux déficits et à l’accroissement de la dette réside dans la diminution des dépenses.
Cette décision est un mélange de recette technocratique et d’idéologie.
La privatisation n’est ni un monstre ni une idole.
Elle n’est pas bonne en soi, mais seulement de manière empirique.
L’un des motifs logiques, et d’ailleurs constitutionnels, qui la motivent est l’existence d’un marché et d’une concurrence.
Lorsqu’une activité jouit d’un monopole de fait, comme un aéroport, elle n’a pas vocation à être privatisée.
Or, c’est le cas d’ADP, qui n’a pas de vrai concurrent.
Si la privatisation des banques et des entreprises de production était légitime et intelligente, notamment celle conduite par Édouard Balladur, après la stupide vague de nationalisations des années Mitterrand, la suite a montré que la prudence était de mise.
Si l’État est, en général, moins bon gestionnaire que l’entreprise privée, il est nécessaire qu’il préserve une marge stratégique pour éviter que des entreprises ne s’évanouissent à l’étranger ou que des ressources quasi automatiques ne lui échappent et, à travers lui, aux contribuables alors que les clients, en partie les mêmes, c’est-à-dire des citoyens, vont être pénalisés.

La conclusion est terrible : nos grands serviteurs de l’État, formés dans le moule de l’ENA, loin d’être les spécialistes du gouvernement, sont des amateurs qui font le plus souvent preuve de légèreté.

Christian Vanneste

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