Jean-Louis Chollet
Médine au Bataclan, non, cela ne passe pas, et c’est évident aussi bien pour des gens simples que pour des intellectuels autrement cohérents que les disciples de Médine.
Le Point nous livre un entretien dans lequel Nicolas Gardères, avocat de la « liberté d’expression », défend le rappeur Médine.
En fait, Hugo Domenach et l’« avocat d’extrême gauche qui défend l’extrême droite » n’ont fait que se ranger sur la ligne de défense adoptée, dès le début de la polémique, par le rappeur controversé lui-même.
Médine a donné le la et, dès le lendemain, le Premier ministre lui-même était au diapason, reprenant son argument.
Certains aboient et la caravane de la liberté d’expression conduite par Médine, à laquelle Édouard Philippe a accroché son chameau, va le mener tranquillement au Bataclan ?
Dans cette interview du Point, le journaliste et l’avocat ont cependant tenu à rajouter quelques arguments de poids.
Ainsi, nous dit-on, « c’est la censure, le danger, pas Médine qui reste fondamentalement un saltimbanque, qui remplit son rôle social, antisocial et cathartique ».
Simple saltimbanque, Médine ?
Un peu plus que cela, tout de même, vu ses liens avec l’association Havre de savoir.
Et on appréciera cette dénonciation de la censure, surtout dans cette période où l’on se préoccupe de voter des lois, de fermer des comptes sur les réseaux sociaux qui ont le malheur de déplaire aux puissants de l’heure.
Quand la censure fonctionne dans le sens unique voulu par le pouvoir en place pour appuyer son programme politique, sociétal et culturel, elle est porteuse de « liberté d’expression ».
Mais quand cette censure devrait être légitimement actionnée pour interdire le prosélytisme d’une religion dont certains aspects ou concepts sont, à juste titre, discutés car porteurs de violence, ou pour interdire des textes ouvertement haineux, qui plus est dans un lieu hautement symbolique, elle ne l’est pas car, alors, elle deviendrait « oppression des libertés » ?
Médine, c’est le nom de la deuxième capitale de l’islam, en Arabie saoudite.
C’est la période, entre les années 622 et 632, qui vit le prophète Mahomet se « radicaliser » (par opposition à la période « mecquoise », pacifique, entre les années 610 et 622).
Mahomet devient alors chef d’État et chef guerrier.
Il quitta sa robe de bure pour endosser son armure et vouer aux gémonies de l’enfer islamique tout à la fois les juifs, les chrétiens et tous ceux qui ne se convertissaient pas à la religion qu’il entendait – et entend toujours, puisqu’il semble éternel dans le cœur de ses adeptes – répandre.
C’est un premier message d’importance que de porter le nom de cette capitale comme un étendard.
Le deuxième message – « Jihad » – écrit en toutes lettres sur l’habit de ce « rappeur-saltimbanque » évoque une guerre sainte prônée dans les revendications terroristes islamistes et qui, dans la réalité historique et dans l’esprit de beaucoup de musulmans, n’a rien d’un doux effort sur soi-même.
Le mot et le concept sont terriblement connotés, et les voir applaudir dans la personne de Médine dans ce lieu qui n’est quand même plus tout à fait une simple salle de spectacle lambda, mais un lieu de mémoire, cela pose problème (litote).
Le summum intervient quand on tente de nous vendre la présence médinoise du saltimbanque au Bataclan comme une catharsis qui, selon Aristote, est une façon de « purger les passions » !
130 morts, dont 90 au Bataclan et plus de 350 blessés à Paris : oui ce fut une tragédie sanglante, une vraie.
Mais il faudrait conseiller aux sieurs Domenach et Gardères d’aller relire la Poétique d’Aristote et de voir quelques tragédies grecques.
Le rap de Médine ne rentre absolument pas dans le concept.
Il faut arrêter le délire pseudo-intello qui devient aussi indécent que le problème de départ.
Médine au Bataclan, non, cela ne passe pas, et c’est évident aussi bien pour des gens simples que pour des intellectuels autrement cohérents que les disciples de Médine.
Et le déluge d’arguments juridiques, littéraires, philosophiques, sociaux dont on on nous inonde depuis trois jours, plus foireux les uns que les autres, ne montre qu’une chose : la cause est indéfendable.
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