Dr. Jacques Michel Lacroix
Médecin
Les médecins ont vite remarqué que les patients bien équilibrés sous Levothyrox ne l’étaient plus lorsqu’ils prenaient le générique
Le Levothyrox contient une hormone de synthèse, la lévothyroxine, utilisée dans les cas d’insuffisance thyroïdienne ou comme traitement de substitution après ablation de la glande thyroïde. Cette hormone intervient dans de nombreux processus physiologiques, elle régule la production d’énergie, de chaleur, a une action sur les muscles, sur le cœur et sur l’humeur, pour ne citer que ses principaux effets ; c’est une hormone indispensable au bon fonctionnement de l’organisme.
Le traitement à base de lévothyroxine s’effectue sous contrôle du dosage sanguin afin de se maintenir dans un créneau optimum.
Après ablation de la thyroïde, la mise en place d’un traitement de substitution s’effectue généralement de manière assez simple et on arrive rapidement à trouver le bon équilibre mais, chez certaines personnes, cet équilibre est très difficile à obtenir et, malgré des différences minimes de dosage, on alterne les phases d’hypo ou d’hyperthyroïdie.
Lorsque, il y a quelques années, le générique du Levothyrox fut mis sur le marché, certains patients jusque-là bien équilibrés ont présenté des états d’hypo ou d’hyperthyroïdie lors de la prise de ce générique dont la substance de base était, bien sûr, la même, mais dont l’excipient était différent.
Les médecins ont vite remarqué que les patients bien équilibrés sous Levothyrox ne l’étaient plus lorsqu’ils prenaient le générique, ils ont donc pris l’habitude de noter en face de leur prescription la mention « non substituable » afin que le pharmacien délivre le médicament princeps et non le générique.
Le problème était réglé, il suffisait de ne pas utiliser le générique pour ne pas déséquilibrer certains malades.
Malheureusement, courant 2017, le laboratoire Merck, producteur du Levothyrox, a décidé de changer sa formule à la demande, dit-il, de l’Agence du médicament.
Si le produit de base, la lévothyroxine, est toujours le même, les excipients ont changé et le lactose a été remplacé par du mannitol et de l’acide citrique (excipients couramment utilisés par ailleurs).
Un certain nombre de patients présentèrent alors les mêmes troubles que ceux qu’ils avaient connus avec le générique, mais ils ne pouvaient plus revenir au produit de base puisque c’est celui-là même qui avait changé.
Problème facilement résoluble si l’on avait pu recourir à l’ancienne formule qui, malheureusement, n’est plus disponible.
On comprend, alors, le mécontentement des malades qui se sont vu, du jour au lendemain, refuser l’accès à un médicament avec lequel ils étaient bien équilibrés, et on peut se demander quelles sont les véritables raisons qui ont poussé l’Agence du médicament et le fabricant à modifier une formule qui convenait parfaitement aux usagers.
Raisons commerciales ?
Incompétence des responsables administratifs ?
En tout cas, absence totale de considération pour le « patient-consommateur ».
Rien d’étonnant, alors, si des patients se regroupent en association pour assigner le laboratoire Merck en justice, même si cela étonne le président du laboratoire, comme il le dit dans la presse, peu habitué à aller débattre de ses décisions en place publique.
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
RépondreSupprimerTrès bonne analyse de la situation
RépondreSupprimerQuelques remarques et questions en complément
- le lévothyrox nouvelle formule n'est rien d'autre en fait qu'un générique du princeps, non ? pourquoi ne pas appeler un chat un chat ?
- pourquoi dit-on q'il est meilleur et plus stable alors que l'AMM ne fait état d'aucune amélioration thérapeutique et que la limite de péremption est plus courte ?
- tout le monde s'interroge sur le véritable motif du changement effectué et la façon dont il s'est fait en catimini
- Est-il normal et légal que 2 produits différents portent le même nom Lévothyrox (sinon pour faire l'économie d'études cliniques complètes) et que le princeps soit commercialisé sous des noms différents comme Euthyrox ?
- les derniers chiffres de pharmacovigilance font état de 25000 déclarations, ce qui est déjà beaucoup, mais beaucoup de personnes concernées n'ont pas pu en faire une ou n'ont pas encore été enregistrés
- pourquoi les autorités de santé communiquent-elles sur la disponibilité d'alternatives depuis début octobre alors qu'on ne les trouve pas ou au compte-gouttes dans les pharmacies et que les patients désespérés doivent s'approvisionner à l'étranger ?
- le nombre des dossiers de plainte enregistrés par les avocats semble déjà approcher des 10000
Article clair et compréhensible pour les néophites. Cependant beaucoup de questions subsistent comme nous le rappelle FBDOC44...
RépondreSupprimer