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dimanche 29 octobre 2017

L’Histoire bégaie en Catalogne

 
 




C’est tellement beau et romantique, une jeunesse qui fiche le bazar dans l’auberge espagnole – pardon, catalane.
 
« L’Histoire ne se répète pas, elle bégaie. »
On connaît cette phrase prêtée à Karl Marx.
Et pour la Catalogne, il semble bien que cela soit le cas puisque c’est la cinquième fois, en moins de quatre siècles, que la république y est proclamée !
Bien étrange proclamation, du reste, que celle de ce vendredi 27 octobre 2017.

« Nous constituons la République catalane comme un État indépendant et souverain, de droit, démocratique et social. »

De quel droit ?
Sur celui tiré d’un référendum contestable à tous égards.
Démocratique ?
Sur 135 députés, 70 ont voté pour l’indépendance, 10 ont voté non, deux se sont abstenus, les autres ayant préféré quitter les lieux pour ne pas se prêter à ce qu’ils ont sans doute considéré comme une mascarade.
C’est quand même court et un peu gonflé pour décider de se séparer du royaume d’Espagne après des siècles de vie commune !
Car, on semble l’oublier, ce n’est pas d’hier que date l’union de la Catalogne avec Madrid.
Le pacte dynastique entre le roi Ferdinand d’Aragon, comte de Barcelone, et la reine Isabelle de Castille fut conclu en 1472.
Notre Bretagne, elle, ne fut définitivement rattachée à la France qu’en… 1532.
Et c’est donc dans un Hémicycle à moitié vide qu’a été proclamée cette République catalane.
Les médias préfèrent s’attarder longuement sur les rassemblements de foule dans des plans serrés bien commodes.
C’est tellement beau et romantique, une jeunesse qui fiche le bazar dans l’auberge espagnole – pardon, catalane.
L’Histoire bégaie, donc.
En effet, la première République de Catalogne fut proclamée en 1641.
À l’époque, les troupes castillanes stationnaient dans la province car l’Espagne était en guerre contre la France.
Cette occupation provoqua une révolte, que l’on appela la guerre des faucheurs.
S’ensuivit une répression.
L’assassinat du vice-roi par les émeutiers fut, en quelque sorte, le point de rupture.
Un certain Pau Claris (1586-1641), ecclésiastique de son état, élu président de la députation générale de Catalogne en 1638, s’en alla alors chercher de l’aide du côté français.
Le 12 décembre 1640, une alliance fut signée avec la France et, le 16 janvier 1641, la République catalane fut proclamée : une république placée sous souveraineté française.
Les Franco-Catalans emportèrent, le 26 janvier de la même année, une bataille sur les Espagnols à Montjuïc et la Catalogne resta sous domination française jusqu’en 1652.
Par la suite, le roi Philippe IV d’Espagne s’engagea à respecter les institutions catalanes et la Catalogne revint dans le giron espagnol.
Lorsque la monarchie constitutionnelle espagnole fut renversée en 1873, que la première république fut proclamée, un État catalan s’installa.
Les députés catalans négocièrent une certaine autonomie avec le pouvoir républicain de Madrid. Mais, en 1874, un pronunciamiento renversa la république et rétablit la monarchie des Bourbons. Cela mit fin aux aspirations d’autonomie et, a fortiori, d’indépendance de la Catalogne.
Au XXe siècle, la République catalane fut proclamée par deux fois.
Le 14 avril 1931, une heure avant la proclamation de la République espagnole, par Francesc Macià (1859-1933), membre de la Gauche républicaine de Catalogne, « dans l’attente que les autres peuples d’Espagne se constituent comme républiques, afin de former la confédération ibérique ».
Le 6 octobre 1934, par Lluís Companys (1882-1940), successeur de Macià comme président du gouvernement autonome catalan.
Il attendait un soulèvement populaire pour soutenir sa démarche.
En vain.
La Généralité fut suspendue et Companys fut condamné à trente ans de réclusion – la même peine qui menace aujourd’hui Puigdemont…

Le 10 octobre 2017, Carles Puigdemont signait une déclaration d’indépendance pour la suspendre immédiatement.

Faisons les comptes : ce n’est donc pas cinq mais six fois que la République catalane a été proclamée.


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