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vendredi 6 octobre 2017

Le « bordel » selon Macron

 



 
Emmanuel Macron vient d’administrer une nouvelle fois la preuve du mépris qu’il éprouve à l’endroit de ces « Français qui ne sont rien ».
 
« Certains, au lieu de foutre le bordel, feraient mieux d’aller regarder s’ils ne peuvent pas trouver des postes là-bas ! »
Ceux qui « foutent le bordel », ce sont les salariés de GM&S.
« Là-bas », c’est à près de cent cinquante kilomètres de leur usine menacée.

Et celui par qui le scandale – et le « bordel » – arrivent, c’est évidemment Emmanuel Macron.
Cette sortie n’en finit plus d’agiter le microcosme des hommes et commentateurs politiques.
Elle n’a pourtant rien d’officiel, ayant été « volée » par les journalistes de BFM TV, alors que le Président s’entretenait en privé avec Alain Rousset, lui-même président socialiste de la région Nouvelle-Aquitaine.
Était-il licite de jouer ici avec le « off » ?
Les médias n’en sont plus à ça près.
En revanche, il est sûr qu’Emmanuel Macron livre là ce qu’il a sur le cœur, avec les mots que tout un chacun emploie généralement loin des caméras et des micros.
On notera encore que ce n’est pas la première fois qu’il s’exprime, en privé ou pas, dans un langage que les plus indulgents tiendront pour « fleuri ».
Il est tout aussi sûr qu’il y a vulgarité et vulgarité ; celle des mots et celle de la pensée.
En l’occurrence, sa copie est exemplaire, que ce soit dans le fond et la forme ; et son épouse ne pourrait faire moins que de lui coller un vingt sur vingt, même en notant vache.
Sur le fond, donc, et quoiqu’il s’en défende, Emmanuel Macron vient d’administrer une nouvelle fois la preuve du mépris qu’il éprouve à l’endroit de ces « Français qui ne sont rien », « illettrés », « alcooliques », « fainéants » et autres petits mots doux.
Plus frappante encore demeure sa conception de ce que devrait devenir la France de demain : mobile, connectée, ouverte, tournée vers les technologies de demain ; bref, une France qui bouge et donne le tournis, telle une start-up trépignant dans son incubateur.
L’usine en question, où il y a du travail, se trouve à deux heures de route du domicile des chômeurs en puissance ?
La belle affaire !
Il s’agit d’un tout autre métier pour lequel il faudrait repartir presque de zéro ?
La splendide occasion que voilà !
De tels changements de vie pourraient mettre en péril la vie de famille, voire la vie sociale des principaux intéressés ?
Mais la vie, qu’elle soit ou non de famille, est sans cesse à réinventer !
C’est bien la peine de se vanter d’avoir été l’assistant du philosophe chrétien Paul Ricœur, contempteur « d’individualisme libéral », pour se faire aujourd’hui le chantre du déracinement, non point conjoncturel – il peut arriver de devoir déménager pour conserver sa situation professionnelle –, mais éminemment structurel, l’exception ayant avec lui vocation à devenir mode de vie.
Ce n’est pas pour rien qu’Emmanuel Macron fut rapporteur général adjoint de la Commission pour la libération de la croissance française, commandée en 2008 par Nicolas Sarkozy à un certain Jacques Attali ; commission que Marine Le Pen avait fort justement rebaptisée « Commission Attila », tant elle entendait faire table rase de toute forme de tradition française en la matière.
Ces temps derniers, il est beaucoup question d’insécurité.
Laquelle peut recouvrir de multiples visages.
Il y a évidemment celle des corps et des biens.

Mais il en existe une autre, aux effets autrement plus insidieux, celle consistant à voir disparaître, pan par pan, le capital immémorial de cette nation plus que millénaire qu’est la France.

C’est l’insécurité culturelle, spirituelle, civilisationnelle.

En effet, notre patrimoine immatériel n’a pas de prix : c’est ce qui en fait tout le sel.


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