Le 21/07/2017
20 juillet 2017
Nous avons appris ce mercredi 19 juillet que le général de Villiers avait remis sa démission.
Une heure plus tard, la nomination du Général Lecointre pour le remplacer était annoncée.
Seuls les naïfs croiront que le choix du Chef d’État-major des Armées s'effectue en une heure, et que toutes les chaînes d'information diffusent, spontanément, au mot près, et avec les mêmes qualificatifs (le général Lecointre est un héros), le résumé de carrière de cet officier général, sans orchestration.
Cela n'a, évidemment, rien d'improvisé, et a fait l'objet d'une longue préparation.
C'est absolument normal.
Mais cela veut aussi dire que le Président avait reçu auparavant la démission du Général de Villiers, et qu'il attendait que le moment opportun soit venu de faire savoir qu'il l'acceptait.
La question se pose alors de savoir à quelle date le Général de Villiers lui a remis réellement sa démission.
Faute d'être dans le secret des Dieux, commençons par déterminer les raisons qui empêchaient que cette annonce ait lieu plus tôt.
Il y avait d'abord des impératifs techniques de commandement : le déclenchement du feu nucléaire nécessite la participation du CEMA et de son état-major.
Le poste de CEMA ne peut rester vacant, ne serait-ce que quelques minutes.
Il y avait ensuite le 14 juillet, la réussite du défilé, la commémoration de l'entrée des États-Unis dans la première guerre mondiale, la présence du Président Trump, ….
La fête nationale sans Chef d' État-major des Armées, ce n'était pas possible.
Si le problème du 14 juillet n'avait pas existé, le Président aurait dû démettre le CEMA le 13 juillet, au lieu de le fustiger tout en le maintenant en place.
C'est ce sentiment d'impuissance temporaire qui est vraisemblablement à l'origine de son comportement inconséquent.
Le 13 juillet, la décision de Macron de renvoyer le Général de Villiers était prise, mais devait être différée de quelques jours.
D'où sa fureur.
Car la veille, le 12 juillet, devant la Commission de la Défense de l'Assemblée, le Général de Villiers avait prononcé des mots qui consommaient son divorce d'avec le Président : « je ne vais pas me laisser baiser comme ça ».
Il ne s'agissait pas là de budget, mais de tromperie.
En clair, que ce soit de façon informelle ou officielle, le CEMA avait remis depuis plusieurs jours sa démission au Président.
Selon toute vraisemblance, il a dû la déposer entre le 4 juillet (jour du discours de politique générale du Premier ministre) et le 12, mais sans doute à une date plus proche du 4 que du 12, car il fallait qu'à cet instant il ait pris suffisamment conscience que le président le faisait lanterner à des fins politiques. C’est alors que le Général de Villiers a utilisé les mots qui ont obligé son supérieur à prendre la décision qui lui répugnait, car elle représentait pour lui un échec personnel.
En effet, lorsque Le Drian était Ministre de la défense, il avait réussi à contrer les exigences de Bercy de rogner le budget des Armées.
Le Président l'a rappelé ce matin, « c'est au ministre » de s'occuper des budgets.
Or la conjoncture était trop belle : Le Drian écarté, Sylvie Goulard remerciée, Florence Parly en train de prendre ses fonctions, il n'y avait que le CEMA pour « faire le job », et celui-ci devait lui être « reconnaissant » (dans des situations comparables, E. Macron avait dit « qu'il n'était pas l'obligé de Hollande ! ») de l'avoir prolongé dans son poste et dans ses fonctions pour un an.
En somme, E. Macron pensait faire passer en douceur le coup du budget des Armées, en manipulant de Villiers comme il avait manipulé Bayrou : on l'utilise, puis on le jette – c'est une affaire qui avait fait ses preuves : Bayrou s'était retiré, déconsidéré et content.
Mais de Villiers ne s'est pas laissé faire, et la « manip » qui devait passer comme une lettre à la poste cause des dégâts considérables.
Ils auront nécessairement des conséquences politiques.
D'où la grosse colère de Macron.
Quand on utilise la force et que l'on perd, ça fait mal.
Tous les militaires le savent.
Le Président, lui, fait ses classes.
Hervé Le Bideau 20 juillet 2017
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