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dimanche 22 juin 2014

Port du niqab: une audience presque ordinaire au tribunal de police de Roubaix .


Publié le
PAR YOUENN MARTIN


Elle ne compte pas montrer son visage. Même au moment de payer son amende pour dissimulation de visage dans l’espace public.
Rachid Nekkaz s’est fait une spécialité de payer les amendes infligées aux femmes qui portent un voile intégral.



C’est sa manière de combattre la loi interdisant de dissimuler son visage dans l’espace public, qu’il juge liberticide.
Le jour où il s’est rendu à Roubaix, nous avions suivi l’audience du tribunal de police de proximité.


Elles sont trois, ce jour-là, à se présenter au tribunal, vêtues de leur niqab.
 Deux l’ont baissé pour laisser apparaître leur nez et leur bouche en entrant, pas la troisième.
 Il faudra que l’huissier insiste pour qu’elle accepte de montrer son visage.

Il est pile 14 heures quand débute l’examen des affaires.
La grande horloge au-dessus de la juge est en retard, Rachid Nekkaz aussi.
 Régulièrement, les maris des deux prévenues qu’il doit « défendre », longue barbe noire et djellaba, sortent de la salle, portable en main, inquiets.
En attendant, le tribunal traite ses affaires courantes. Une bagarre un peu confuse dans laquelle les coups n’ont pas entraîné d’ITT (incapacité totale de travail), une automobiliste verbalisée pour stationnement gênant deux fois en trois heures qui voudrait n’en payer qu’une, un autre qui conteste un PV pour absence de clignotant et non-port de ceinture…
À 14 h 40, Rachid Nekkaz arrive enfin.
Il peut assister au procès de Sarah*, une Croisienne qui n’a pas fait appel à ses services.
 Elle a été contrôlée à Roubaix, dans la station Eurotéléport le 13 mars.
 Elle a accepté de dévoiler son visage aux policiers et leur a dit qu’elle venait de passer un an en Tunisie et ne savait pas qu’il était interdit de porter un niqab.
 La loi n’est pourtant plus si récente et il était difficile d’ignorer le débat qui a entouré son vote, en 2011.
 «  Ce n’est pas une loi contre le niqab, prend la peine de rappeler la juge. On a eu ici à verbaliser un homme qui portait une cagoule.  »
La jeune femme repart avec une amende de 150 €…

« Récidiviste »…

Arrive le tour de Saïda, la femme qui rechignait à montrer son visage dans l’enceinte du tribunal.
 «  C’est ma façon de vivre, je ne peux pas faire autrement  », dit-elle d’ailleurs à la juge.
Elle habite le quartier du Moulin-Potennerie et a été verbalisée le 24 janvier rue des Fossés, à deux pas de chez elle.
 Convoquée le 3 mars au commissariat, elle s’y est présentée intégralement voilée et risque donc deux amendes.
Mais les policiers ont mis l’adresse du commissariat central au lieu de celui de la Potennerie, le tribunal la relaxera pour la deuxième infraction.
Le temps de juger – coupable – un homme pas d’accord sur le sens de l’expression « usage au volant d’un téléphone portable » et arrive la troisième et dernière femme voilée.
Sandy affirme vouloir respecter la loi, mais son voile aurait tendance à remonter.
La juge semble convaincue par la thèse « accidentelle » et lui dit de faire attention.
Elle ne suivra pas les réquisitions de la représentante du Ministère public et limitera l’amende à 120 €.
À la sortie, Saïda s’empresse de remonter son voile.
«  La France est le pays des Droits de l’homme, le pays de la laïcité, de la liberté de culte  », plaide son mari, approuvé par Rachid Nekkaz.
Ensemble, ils se rendent à la trésorerie générale de Roubaix, sur la Grand’Place, pour régler immédiatement l’amende.
Une fois sur place, Rachid Nekkaz se fait filmer par le président de son association.
Les fonctionnaires sont, du coup, bien plus gênés par l’intrusion d’une caméra que par le fait qu’une femme intégralement voilée soit face à eux… pour régler une amende pour dissimulation de visage dans l’espace public.

(*) Les prénoms des trois femmes ont été changés.


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