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lundi 16 juin 2014

La réforme territoriale, une injure au bon sens.

Lundi 16 Juin 2014 à 14:00 (mis à jour le 16/06/2014 à 13:59)
Par Denis Tillinac 










Quand l'addition de l'inculture énarchique et de la combine politicarde offre une région sur mesure à Ségolène Royal. Photo © SIPA

Vu de ma fenêtre. Loin de simplifier l’administration française, la réforme territoriale renforce les maux qu’elle prétend combattre.
De ma fenêtre je vois le massif du Sancy et la ville de Mauriac mais la Corrèze se trouvant dans l’actuelle région Limousin, l’étrange cubisme improvisé par Hollande et les siens prétend ériger une frontière qui nous sépare de nos voisins.
Pourtant l’histoire-géo pencherait pour un rapprochement des Limousins et des Auvergnats ; nous sommes cousins à tous égards.
 Or l’addition de l’inculture énarchique et de la combine politicarde bazarde le Limousin dans une entité innommable qui englobe les pays chartrains et rochelais.


Sans doute a-t-on voulu tailler un fief à Ségolène Royal pour ménager sa susceptibilité : ils en ont tous la trouille à l’Élysée.


Les Auvergnats seront reclus dans une entité qui s’étendra de Saint-Flour aux rives du Léman.
Les voilà alpins, comme nous allons être océaniques et beaucerons : les mânes de Vercingétorix ne méritaient pas cette farce à la Alphonse Allais.
 Celles des ducs de Bretagne se demandent pourquoi on leur soustrait le pays nantais.
 Sans doute un coup de fil de Ayrault à Hollande.
 Sans doute aussi Martine Aubry a-t-elle exigé que l’on préserve sa minirégion, fédération du PS oblige.
Elle aussi leur fait peur.
Le reste à l’avenant : cette réforme de notre carte administrative est un brouillon de potaches qui heurte le bon sens, fleure l’électoralisme bas de gamme et ne résoudra rien.
Elle laisse en plan le sort des départements, censés disparaître en 2020, encore que l’on fasse miroiter aux présidents de conseils généraux le maintien d’un “niveau départemental” sans en préciser le contenu.
On n’a pas osé déplacer tels départements en exil dans telles régions ni regrouper les communes surabondantes et dépeuplées de nos campagnes.
Au fond, le pouvoir socialiste voulait surtout régler son compte à la réforme de Sarkozy, qui péchait certes par timidité, mais pouvait se prévaloir d’un minimum de cohérence.
 Il a refusé le débat de fond exigible pour un chamboulement aussi fondamental.
 En pleine fièvre révolutionnaire, les constituants avaient été autrement avisés et courageux : la gauche actuelle souffre de la comparaison avec celle de ses ancêtres.
Il fallait repenser la notion de proximité, et définir soigneusement les prérogatives respectives des collectivités et de l’État, avec le souci d’éviter les doublons et de ne pas fractionner un pays somme toute exigu en féodalités rivales.
 Il fallait subordonner la réforme à un objectif fondamental : réduire au moins de moitié le nombre de fonctionnaires territoriaux.
Il fallait prendre son temps, respecter l’Histoire, et poser les vraies questions.
La décentralisation de 1982 à la mode Mitterrand-Defferre a-t-elle vraiment favorisé le dynamisme économique de notre pays et amélioré le sort de nos concitoyens ?
 Entre le département sans doute obsolète et la région qui gonfle ses biceps dans ses palais néroniens, une instance médiane serait peut-être opportune, voire suffisante
Personne n’a envisagé cette solution.
Incombe-t-il aux élus régionaux de s’occuper des CHU et des universités ?
 La définition et la mise en oeuvre d’une politique du territoire ne relèvent-elles pas nécessairement du pouvoir central ?
 Peut-être succombons-nous à un mimétisme sans pertinence en nous référant aux Länder allemands ou aux généralités espagnoles.
Rien ne nous prédispose à une forme quelconque de fédéralisme et par le fait, l’utilité de l’échelon régional est sujette à caution.
Ce qui n’implique nullement un retour au jacobinisme d’antan.
C’est d’un allégement de la fiscalité et d’un écrémage de la bureaucratie que la France a besoin.
 Les régions vont coûter cher, surajouter des pesanteurs et la mégalomanie de leurs élus menacera l’unité nationale : ça fait beaucoup de nuisances pour un bénéfice plus qu’aléatoire.
Mais à quoi bon épiloguer ?

 Cette réforme tournera court et au fil du temps, hélas, marquisats, baronnies, comtés, duchés et principautés vont continuer de s’empiler, de se rengorger et de nous ruiner.

 Nos éminences ne cessent de gloser sur leurs “valeurs républicaines” alors qu’elles nous concoctent à leur seul profit ce que l’Ancien Régime avait de pire.




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