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jeudi 10 octobre 2013

Opération Athènes : Seul manque un Catilina …

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La Grèce connait depuis 2008 une crise financière puis économique majeure.

En dehors du fait
que la corruption de la classe politique grecque soit évidente (article de RFI ici),
que la classe politique ait été disqualifiée internationalement après avoir sciemment menti sur l’état des finances du pays,
que le pays ait perdu sa souveraineté et ait été mis sous tutelle internationale,
qu’échapper à l’impôt est un sport national, ce qui est d’autant plus facile dans un pays où il n’y a pas de cadastre


Et de manière « fort étonnante », la Grèce est aujourd’hui confrontée à une crise politique majeure, dont les impacts en Europe pourraient ne pas être neutres.

Face à cette crise, une partie néo-nazi y fédère un mécontentement très légitime de la population : Aube Dorée.

Le gouvernement grec a récemment fait inculper et mettre en liberté conditionnelle 3 des 18 députés de ce parti : Nikólaos Michaloliákos, le leader du parti, Ilias Kassidiaris, porte-parole du parti, Ilias Panayotaros, député et Nikos Michos, député. Article le Parisien ici

Ils sont inculpés de participation à une organisation criminelle dans le cadre de l’assassinat de Pávlos Fýssas, « rappeur antifasciste grec », une sorte de red skin version sirtaki.

Le lien entre ces personnes, certes peu recommandables, et ce meurtre serait l’appartenance du tueur au parti. Les preuves de l’accusation sont donc pour le moins ténues…

C’est un peu comme mettre Mélenchon en garde à vue parce qu’il a aurait croisé Clément Méric avant qu’il n’agresse un skin head…

Cette opération apparait donc comme une opération politique visant à bloquer la progression de ce parti dans la population et non réellement comme une action de justice classique.

Cette manœuvre laisse transparaitre la peur réelle du gouvernement : une prise de contrôle par l’armée du pouvoir politique.

Une peur qui peut se comprendre si on considère l’historique des coups d’états en Grèce, pas moins de 21 coups d’état ou tentatives de puis 1831 (voir lien ici).

Une action contre l’armée avait été menée au plus fort de la crise en 2011 (article Libération ici).

De manière fort surprenante, la Grèce avait en effet renouvelé tout son état-major militaire, fait étonnant si l’on considère qu’un pays au bord de la guerre civile aurait plutôt intérêt à s’assurer de la stabilité et de la loyauté de son appareil sécuritaire, à moins que ça en ait été l’objectif…

Il est à noter que selon un sondage 75% de l’armée grecque voterait pour le parti aube dorée.

Parallèlement, à cette opération politique contre aube dorée, on apprend que des groupes de réservistes des forces spéciales de l’armée grecque font ce que l’armée en pourrait faire officiellement : appeler au renversement du gouvernement par les armes. (article Atlantico ici).

Cet appel peut difficilement ne pas être conçu comme un tir de semonce de l’armée grecque à son gouvernement. (Il est à rappeler qu’un facteur déclenchant de la révolution des colonels fut la volonté du gouvernement de l’époque « d’épurer l’armée », trop marquée à l’extrême droite.)

Le fait de décapiter un état-major ou un parti extrémiste ne changera hélas pas la réalité grecque.

En plus, de la crise financière et économique, un problème majeur d’immigration existe en Grèce et son absence de traitement par le gouvernement explique l’assise grandissante d’aube dorée.

Ce pays accueille aujourd’hui 2 millions d’étrangers dont un million de clandestins. En 1991, 200 000 étrangers vivaient sur le sol grec, principalement albanais. (article Slate ici)

Ne serait-ce que via la frontière turque, 300 immigrés arrivent illégalement en Grèce chaque jour.

La Grèce compte 10 Millions d’habitants, comment un pays en crise profonde pourrait-il absorber cela?

Face à ces défis, le gouvernement grec semble paniquer face à aube dorée. Ils mettent en prison sans réelle preuve des citoyens grecs et qui plus est des représentants du peuple grec.

Quoi qu’on puisse penser de ce parti et de ces méthodes, le gouvernement grec est en train de sortir du cadre légal et de victimiser ce parti, lui donnant ainsi un point d’ancrage dangereux pour ce gouvernement.

On peut réellement s’interroger sur la rapidité d’action de la justice grecque qui tourne clairement à la précipitation (Article RFI ici), au point que la Ligue hellénique des droits de l’homme a appelé les autorités à la prudence. On ne peut les supposer avoir la moindre accointance idéologique avec ce parti.

Comme l’explique le professeur de droit grecque Dimitris Christopoulos : «Si on ne fait rien pendant dix ans et que l’on décide, en trois jours, de réagir de la façon que l’on a vue hier ou avant-hier, peut- être que l’on aura des problèmes. On aura des problèmes de violations de principes constitutionnels, et on aura des problèmes de violations d’ordre procédural, qui peuvent nous amener dans des situations vraiment très difficiles… »

Le gouvernement grec panique et craint d’être renversé.

On ne peut encore une fois lui donner tort. Si l’on considère l’historique loyaliste de l’armée grecque, on peut penser que le blocage qui y dure depuis 3 ans n’a que trop duré.

Il est à craindre que ce qui se passe en Grèce ne soit qu’une anticipation de ce qui va se passer dans le reste de l’Europe si les pays européens ne parviennent pas à maitriser leur budget et à adopter une politique d’immigration rationnelle basée sur les besoins de la nation et la capacité des immigrés à créer de la valeur.

De plus, si le gouvernement grec est renversé dans les prochains mois, qu’adviendra-t-il de l’Europe ?

Elle condamnera logiquement la Grèce et l’exclura, en représailles et pour montrer qu’il est facile de juger quand on n’est pas dans une situation aussi délicate.

Il est probable que la Grèce repoussera hors de ses frontières les clandestins mais non pas vers leur pays d’origine mais vers l’Union Européenne qui du fait de sa posture n’aurait d’autre solution que de les accepter.

La déstabilisation politique pourrait alors arriver sur le reste de l’Union si elle devait absorber d’un coup un million de clandestins, démontrant par là même son incapacité à surveiller les frontières.

La situation grecque dure depuis bien longtemps, l’exaspération du peuple grec pourrait remettre en cause, à court terme, un système politique qui jouissait d’une certaine stabilité pour ce pays jusqu’ici.

Tous ces éléments laissent à penser qu’une confrontation entre gouvernement et armée pourrait arriver prochainement…

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