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dimanche 1 septembre 2013

Mosquée de Dornach : soirée électrique au Lerchenberg

   
le 31/08/2013 à 05:01 Emmanuel Delahaye                             

Plus de 300 personnes ont assisté jeudi soir à la réunion organisée par l’Ascen au Lerchenberg de Dornach. Photo François Torelli
Plus de 300 personnes ont assisté jeudi soir à la réunion organisée par l’Ascen au Lerchenberg de Dornach. Photo François Torelli
                
Quelque 300 personnes ont assisté jeudi soir à la réunion publique organisée par l’Ascen-Dornach contre le projet de mosquée porté par la Communauté islamique Millî Görüs. Estimant l’atmosphère hostile, le maire de Mulhouse Jean Rottner n’y a fait qu’une très brève intervention.

Ce devait être une soirée d’explications, de confrontation de points de vue et, surtout, d’informations puisées à la meilleure source possible : la mairie de Mulhouse.
 Des explications – en particulier celles qui poussent les adhérents de l’Association de sauvegarde du cadre de vie, de l’environnement et de la nature de Dornach (Ascen) à s’opposer au projet de centre cultuel et culturel musulman au beau milieu du secteur de la Mer Rouge –, il y en a bien eu.


 Pour la confrontation de points de vue, le bilan est déjà plus maigre…
 Quant aux informations concrètes venues de la Ville, hélas, il n’y en eut guère sur place (lire ci-dessous notre interview du maire de Mulhouse Jean Rottner, réalisée hier après-midi).

Il est 19 h 30 bien sonnées, jeudi soir, quand Philippe Lallemant ouvre l’assemblée générale extraordinaire de l’Ascen avec une bonne demi-heure de retard, devant une grande salle du Lerchenberg quasiment comble.
 Au bas mot, 300 personnes sont présentes.
 Pierre Freyburger (PS), Bernard Stoessel (centre), Martine Binder (FN) et le premier adjoint au maire Denis Rambaud (UDI) figurent dans les premiers rangs.
 Plusieurs autres élus mulhousiens sont également présents dans la salle. L’arrivée du maire Jean Rottner ayant (officieusement) été annoncée comme imminente, les organisateurs ont d’abord choisi de patienter.
 Constatant qu’il n’apparaît toujours pas, Philippe Lallemant finit par lancer la soirée.
 Méthodique, le président de l’association récapitule les raisons d’un refus massif (l’Ascen revendique à ce jour quelque 800 signataires pour sa pétition lancée courant juillet) : craintes de nuisances sonores à répétition, craintes du stationnement automobile sauvage, crainte d’une perte de valeur des propriétés foncières du quartier, etc., les motifs sont nombreux.

Il est une autre raison, au moins potentielle, que Philippe Lallemant récuse fermement : non, la démarche de l’Ascen n’a rien à voir avec l’islamophobie. La Communauté islamique Millî Görüs (CIMG) de Mulhouse, porteuse du projet, « ne doit pas être diabolisée ».
Elle a droit à un lieu de culte, mais ni sur le site projeté (le lieu-dit de l’Isenholz), ni d’une telle taille, jugée surdimensionnée.
 D’après les informations recueillies par l’Ascen, le projet de CIMG consiste à racheter le bâtiment désaffecté de France Télécom situé rue Édouard-Branly (4500 m² de bâti, sur 2,5 ha de terrain), afin d’y loger 1500 places de prière, un centre culturel turc pourvu d’une bibliothèque, un logement d’imam, un commerce de 300 m², une crèche, une morgue et 40 salles de classes.
"Nous voyons rouge, nous en avons plus qu’assez"

« Notre ordre du jour est donc le suivant, résume Philippe Lallemant : il s’agit de préserver Dornach d’un gigantesque complexe cultuel, culturel et commercial…
 Et politique – car Millî Görüs est un mouvement nostalgique de l’empire ottoman, hostile à la nature laïque de l’État turc.
 Millî Görüs a des sympathies pour le Hamas, il est proche des Frères musulmans, ainsi que d’Ennahda en Tunisie.
 Il défend une vision traditionnelle de l’islam et entend empêcher l’intégration à la culture occidentale. »
 La salle boit du petit-lait.
 Denis Rambaud pianote énergiquement sur son smartphone.

« Nous voyons rouge, nous en avons plus qu’assez , reprend le président de l’Ascen.
 Pourquoi n’avons-nous jamais entendu parler de ce projet malgré toutes nos instances de démocratie participatives ?
 Je ne sais pas. »
 Au même moment ou presque, la photo, projetée sur grand écran, d’un Jean Rottner tout sourire, prenant part en février dernier à un banquet organisé par CIMG, déclenche un début de bronca, d’autant que Philippe Lallemant enfonce le clou : « Ce soir-là, des flyers de présentation du projet de la Mer Rouge étaient disposés sur toutes les tables !

 Et ils étaient bien rédigés en français ! »

"J’en appelle au gel du projet"

« Ce soir, l’Ascen souhaite poser des questions aux élus , conclut l’orateur.
 Le projet de la CIMG est contraire aux valeurs de la République !
Nous demandons donc que la Ville exerce son droit de préemption, nous demandons aussi à être informés en amont sur ce dossier et à être consultés ! » Philippe Lallemant cède alors le micro à un premier intervenant : Pierre Freyburger, conseiller général (PS) de Mulhouse-Ouest (qui englobe Dornach) et chef de file de l’opposition municipale.
 La règle préalablement édictée par l’Ascen est que chacun s’en tienne à deux minutes d’intervention.
 Pierre Freyburger respecte la consigne, peu ou prou. « J’ai échangé avec Bernard Stoessel sur ce que je souhaite dire ce soir, commence l’élu socialiste , et mes propos seront millimétrés.
 Il est normal que chaque religion puisse disposer de lieux de culte adaptés, mais, ici, nous sommes clairement dans une situation de blocage démocratique.
 Ce dossier a été géré en catimini au plus haut niveau de la mairie, ce qui est incompréhensible et inacceptable, quand on prêche la concertation en permanence.
 Il y a rupture de confiance !
J’en appelle donc au gel du projet, à l’étude d’un autre site et à un changement de méthode, qui privilégie la clarté, la transparence et la lucidité. »

Des applaudissements nourris se lèvent aussitôt dans la salle, vite suivis d’un curieux instant de flottement : toujours pas de Jean Rottner à l’horizon. Hésitant, Philippe Lallemant interroge Denis Rambaud du regard.
 Le premier adjoint lui fait signe qu’il ne souhaite pas prendre la parole. C’est finalement l’adjoint Philippe Trimaille (UMP) qui hérite du micro : « Rassurez-vous, Jean Rottner va bien venir, il arrive dans quelques minutes. » La salle prend bonne note, mais elle gronde d’impatience.
"Si vous voulez, je peux me taire !"

20 h 45 passées : enfin, Jean Rottner arrive, à grandes enjambées.
 « Je suis très heureux de pouvoir vous saluer ce soir, commence le maire de Mulhouse.
 Si vous êtes venus, je pense, c’est pour savoir si oui ou non ce lieu de culte se fera à Dornach. »
« Non, non, non ! » , clament aussitôt plusieurs personnes du public.

 Le maire se raidit : « Il y a un refus clair de ce projet à Dornach, ça, je l’ai largement compris…
 Mais si vous le voulez, je peux me taire !
 Si je vous donne des explications, je crois que cela peut se faire dans le respect de la parole des uns et des autres. »
 Nouvelle réaction de la salle.
Jean Rottner s’empourpre pour de bon : « Je vois que cette salle m’est hostile…
 Dans ce cas, ma conclusion sera un peu sèche : vous ne voulez pas m’entendre, j’en tire les conséquences. »

Le voici qui repart comme il est venu, dix minutes à peine après son arrivée. Le brouhaha est à son comble.
 Dans la foule, une femme se lève, furieuse, pour l’apostropher au passage : « Vous avez dit que vous seriez clair, mais vous partez sans avoir rien dit, ni oui ni non.
 C’est honteux ! » Un gros quart d’heure plus tard, la réunion est finalement levée dans un calme précaire.
 Le Lerchenberg se vide petit à petit, malgré un petit embouteillage à l’entrée du bâtiment : les nouvelles adhésions à l’Ascen battent leur plein.


http://www.lalsace.fr/haut-rhin/2013/08/31/mosquee-de-dornach-soiree-electrique-au-lerchenberg

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