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lundi 27 avril 2015

La famille d'Agnès Marin saisit le Conseil supérieur de la magistrature

Par Stéphane Durand-Souffland
Mis à jour le 27/04/2015 à 12:45
Publié le 27/04/2015 à 12:25

 
Le père d'Agnès Marin face à la presse, à la cour d'appel de Riom en octobre 2014.
Le père d'Agnès Marin face à la presse, à la cour d'appel de Riom en octobre 2014. Crédits photo : THIERRY ZOCCOLAN/AFP

 INFO LE FIGARO - La famille d'Agnès Marin, violée et assassinée en novembre 2011 dans un collège privé du Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire), demande des comptes à la juge d'instruction qui avait autorisé la sortie de prison du criminel avant le drame.
 
La famille d'Agnès Marin, violée et assassinée de 17 coups de couteau en novembre 2011 dans un collège privé du Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire), vient de saisir le Conseil supérieur de la magistrature (CSM).
Le père, la mère et les grands-parents paternels de la victime estiment, en effet, qu'une juge d'instruction de Nîmes, en charge d'une précédente affaire concernant le criminel, Mathieu, mineur au moment des faits, a fait preuve de légèreté en le remettant en liberté.
Une erreur d'appréciation qui mérite, à leurs yeux, une sanction disciplinaire.
En octobre 2014, Mathieu a été condamné définitivement à la réclusion criminelle à perpétuité.
Il avait comparu à la fois pour l'assassinat d'Agnès, dont il avait partiellement brûlé le corps, et pour le viol d'une autre jeune fille, commis dans le Gard quelques mois auparavant.
C'est à la suite de ce premier crime qu'il avait été placé en détention provisoire.
Bien que ce viol ait été prémédité, et même scénarisé selon un rituel très inhabituel, surtout pour un individu de son âge, un expert psychiatre désigné par la juge d'instruction avait affirmé sans détour que le sujet ne présentait aucune dangerosité.

Ses parents avaient, eux, fini par trouver un établissement scolaire qui accepte un adolescent au profil inquiétant.
De sorte que la magistrate avait autorisé la sortie de prison de Mathieu.

Un suivi défaillant

Dans le courrier adressé au CSM, que Le Figaro a pu consulter, la famille Marin s'appuie largement sur le réquisitoire prononcé, en première instance, par l'avocat général Jeanne-Marie Vermeulin, devant la cour et les jurés du Puy-en-Velay.
Celle-ci, sans accabler explicitement sa collègue nîmoise mais pointant le suivi défaillant de Mathieu après sa mise en liberté, avait notamment déclaré, selon les notes prises par les parties civiles: Les faits du Chambon auraient-ils pu être évités?
Je me sens totalement solidaire de mes collègues car je sais combien la décision est solitaire et combien ses enjeux sont complexes.
Mais je ne peux pour autant me dérober à l'examen lucide de ce dossier.
Qui a permis à Mathieu Moulinas d'être livré à lui - même dans une ‘‘réserve de trente filles'' comme a dit un témoin?
Cet examen, je le dois à cette famille blessée, à cet accusé peut-être mal protégé, à une institution dont la place dans la société est majeure et qui a le devoir de l'assumer de manière exigeante et responsable.

L'expertise psychiatrique confiée au docteur Claude Aiguesvives a exclu toute dangerosité de l'adolescent: je reproche à cet expert un avis lapidaire et trompeur dans sa formulation.
 Le premier viol porte le sceau d'un fonctionnement pervers.
La manière dont la décision de remettre Mathieu Moulinas en liberté a été préparée pose problème: ni la juge, ni le parquet n'ont exercé le minimum de contrôle sur cet établissement [NDLR: le Cévenol, aujourd'hui fermé] alors que celui-ci est un campus mixte et sans murs, a une réputation de laxisme et de défaut de surveillance.
J'estime que c'était l'établissement le moins adapté possible au cas de Mathieu.
 
C'est pourtant sur la base de ce certificat de scolarité et après une simple conversation téléphonique avec l'expert psychiatre - sans même attendre la lecture de l'intégralité de son rapport qui sera remis quelques jours plus tard - que la décision de remettre Mathieu en liberté est prise.
 
 Il y a des décisions qui demandent un minimum de temps et d'attention.
L'inscription de Mathieu au Cévenol est une injure au bon sens.
 La multitude de carences dans le suivi de l'adolescent n'ont pas permis de rectifier le tir.
 D'abord le cadrage minimaliste donné par la juge d'instruction sur le suivi psychiatrique ; ensuite le faible nombre des visites rendues par les services de la Protection Judiciaire de la Jeunesse au Cévenol pour s'assurer du comportement de l'élève, alors que des alertes auraient du être données, notamment lorsqu'il a été surpris en train d'essayer de télécharger un film pornographique sur un ordinateur de l'établissement.


Agnès Marin, violée et assassinée en novembre 2011. Crédits photo :

Je comprends la colère et l'indignation de la famille d'Agnès.
Nous ne pouvons pas nous réfugier derrière la question des effectifs ou des moyens insuffisants et des lois mal faites.
Nous avons le droit et le devoir d'exiger des moyens qui nous permettent de travailler correctement. Mais cette exigence doit nous permettre d'accepter la critique quand elle est justifiée.
Nous ne pouvons pas esquiver les questions sur notre responsabilité.
 Ce constat n'a de valeur que s'il est un appel à mieux faire».
 
Sanction disciplinaire demandée
 
Les proches d'Agnès Marin demandent donc au CSM de prononcer une sanction disciplinaire à l'encontre de la juge d'instruction - sollicitée par Le Figaro, celle-ci n'a pas souhaité s'exprimer.
 
Le 7 février 2014, ils ont déjà porté plainte contre l'État pour «faute lourde», exigeant que toute la lumière soit faite sur les dysfonctionnements au sein de la justice et de l'Éducation nationale.

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