Pour échapper aux procès en sorcellerie, certains médias frisent l'autocensure
 

 
 
Est-il si difficile d’appeler les mariages communautaires musulmans par leur nom ? Se cachant derrière son petit doigt pour échapper aux procès en sorcellerie, Le Figaro fait dans la litote…
 

Il y a quelques jours, Le Figaro a consacré un article fort intéressant aux mesures prises par la mairie de Nice pour faire face à toutes sortes de débordements lors de certains mariages.
Il est question de rodéos en deux-roues, de circulation sur les trottoirs, de routes bloquées, d’agressivité et d’insultes envers les forces de l’ordre lors d’éventuels contrôles, de conduite dangereuse en général « et même [de] coups de feu pour exprimer sa joie ».

La piste des youyous
 
Diantre ! « Depuis quand de telles dérives dans les coutumes nuptiales ? », se demande le lecteur curieux ? Et pourquoi ? Tous les mariages sont-ils concernés ? Mystère.
Quelques indices, pourtant.
Le Figaro évoque « youyous », « drapeaux notamment étrangers », « musique folklorique », et précise qu’un élu de l’opposition socialiste dénonce la « stigmatisation ».
La piste se précise !
Autant dire clairement ce que tout le monde a déjà compris.
Lors des réunions officielles dans les préfectures ou les mairies, ces mariages « à risque » sont appelés « mariages communautaires », et le terme ne désigne évidemment pas la communauté bouddhiste, mais les personnes issues de l’immigration originaire de pays de culture musulmane.
On me pardonnera la lourdeur de la formulation, mais « mariages communautaires » est hypocrite et « mariages musulmans » ne correspond pas au phénomène observé, ne serait-ce que parce que les comportements répréhensibles évoqués se produisent au moment des cérémonies civiles, et non autour d’éventuelles bénédictions religieuses.

Bloquer la circulation n’a rien de traditionnel
Bien évidemment, tous les mariages de couples de culture musulmane ne donnent pas lieu aux infractions évoquées plus haut, loin s’en faut.
Cependant, à de très rares exceptions près, ces débordements, parfois particulièrement graves en termes de sécurité, ne se produisent que lors de mariages de couples issus de l’immigration de culture musulmane.
Quelles que soient les conclusions que l’on en tire, il serait malhonnête et absurde de prétendre analyser ce phénomène sans prendre en compte un facteur aussi marquant.
En outre, si l’on peut considérer certaines pratiques comme essentiellement festives et plutôt classiques (musiques, danses, klaxons), il n’y a rien de traditionnel dans le fait de bloquer la circulation de manière anarchique, de prendre les ronds-points à contre-sens ou de rouler sur les trottoirs en injuriant les piétons !
Si on veut y voir une dimension culturelle, alors il s’agit de la « culture banlieue » (si tant est qu’on puisse l’appeler « culture », je laisse ce débat aux ethnologues) et certainement pas des cultures maghrébine ou turque.

La ville de Nice bien inspirée
Pour ma part, dans ces débordements récurrents qui se déroulent toujours sur la voie publique, je vois surtout des démonstrations de force.

C’est une manière de s’approprier un territoire, et de narguer autant les forces de l’ordre que le reste de la population, en premier lieu les autochtones, mais aussi toutes les personnes issues de l’immigration qui n’aspirent qu’à vivre tranquillement et se retrouvent prises en otage par une prétendue « communauté ».
A ce titre, on ne peut que se réjouir de l’efficacité des décisions de la mairie de Nice, dont d’autres communes ont la bonne idée de s’inspirer, tout comme des récentes évolutions législatives pour sanctionner les rodéos motorisés, qui relèvent des mêmes tendances.

Autocensure, j’écris ton nom
 
Pourquoi Le Figaro n’a-t-il pas dit les choses plus clairement ?
Que sur un tel sujet Le Monde, L’Obs ou Libé passent sous silence la partie de la réalité qui ne va pas dans le sens de leurs choix dogmatiques ne surprendrait personne, mais, en l’occurrence, on peut difficilement soupçonner Le Figaro de défendre la même idéologie !
D’autant plus que le rédacteur de l’article a tout de même pris soin d’y glisser des indices dénués de toute ambiguïté en plus d’être factuels…
Alors pourquoi ?
J’aimerais y voir un appel au bon sens des lecteurs en forme de clin d’œil.
Hélas, je crois plutôt que le but était « de le dire sans le dire tout en le disant sans qu’on puisse reprocher à quiconque de l’avoir dit ».
En clair, une technique typique des journaux confrontés à la censure.
Oh, évidemment, il ne s’agit pas de l’activité d’un quelconque bureau de la propagande, du moins pas encore.
Mais pour être plus insidieuse la censure contemporaine n’en est pas moins dangereuse !

Peur de stigmatiser
Elle est la peur d’être confronté aux accusations d’islamophobie, de xénophobie, de racisme, notions d’ailleurs souvent allègrement confondues les unes avec les autres, accusations graves lorsqu’elles sont fondées mais le plus souvent utilisées à tort et à travers pour interdire toute analyse rationnelle de l’islam, des flux migratoires ou des communautarismes.
Elle est la peur de choquer, parfois cyniquement pour ne pas perdre en audience, parfois simplement pour ne pas heurter, mais cela ne fait que donner une prime aux plus susceptibles alors que ce sont au contraire ceux dont il faudrait le moins tenir compte.
Elle est peut-être aussi la peur sincère de stigmatiser, c’est-à-dire la peur d’encourager des généralisations abusives, ce qui est inquiétant puisque cela suppose l’idée que les lecteurs seront incapables de faire par eux-mêmes les nuances les plus élémentaires.
Or, toute démarche qui commence par le préjugé que « les gens » n’ont pas ce simple discernement, en arrive inévitablement à les estimer incapables de juger par eux-mêmes des sujets importants, et donc à rejeter la démocratie.

2018, année de la post-vérité?
Dans tous les cas, la vérité est sacrifiée.
Or, quelles que soient nos convictions philosophiques, politiques, éthiques ou même religieuses, refuser la vérité ne résout rien et nous condamne à nous débattre dans les illusions et à l’impuissance, face aux difficultés auxquelles nous sommes confrontés.
Malheureusement, le constat est simple.
Nous sommes en 2018, et le plus ancien quotidien de France se sent obligé de recourir aux allusions et aux périphrases parce qu’il n’ose plus dire clairement ce qui est pourtant parfaitement factuel et vérifiable.
Prenons garde !

Si nous renonçons à user de notre liberté d’expression, nous la perdrons.

Si nous ne montrons pas que nous sommes prêts à la défendre, on nous la prendra.