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samedi 5 juillet 2014

Ukraine / Donbass : Slaviansk ville martyre, livrée à la sauvagerie et à la barbarie «proeuropéenne»

5 juillet 2014 Jacques Frère


 
 
Jour de deuil dans le Donbass. Ce matin, la plupart des défenseurs de la milice indépendantiste qui protégeaient Slaviansk et Kramatorsk se sont repliés vers Lugansk, Gorlivka et Donetsk.
 
Quasi encerclées, ces agglomérations ne pouvait plus être défendues militairement.
En milieu de journée, les forces gouvernementales sont entrées dans ces deux villes.
On signale déjà de très nombreux pillages, des exécutions sommaires et des viols même.
 La population qui n’a pas fuit (soit à peu près quelque 50.000 personnes) est livrée aux exactions et à la vengeance de la soldatesque kievienne.
Le régime « proeuropéen » applique à la lettre les consignes de purification ethnique du Département d’Etat…
Un symbole est tombé, la Liberté a perdu une bataille, mais elle n’a pas perdu la guerre.
 
 
 
La situation militaire au 4 juillet au soir, que nous ne pouvons présenter de façon exhaustive dans nos comptes-rendus quotidiens. C’est en russe, mais cela donne une idée précise du champ de bataille, assez loin de la propagande de Kiev ou de celle des Occidentaux.
 

 
Mais la guerre n’est pas finie dans le Donbass : Lugansk et Donetsk résistent toujours et forment même deux points de fixations importants face aux forces kieviennes en surnombre.
 A Gorlivka, mais aussi à Severodonetsk ou encore sur Konstantinovska des points forts ont été établis et seront âprement défendus.
 A 10 contre 1 Slaviansk a tenu pendant trois mois.
 On imagine alors les capacités de résistance des autres secteurs des régions de Lugansk et de Donetsk qui disposent de plus d’armements, de blindés et d’artillerie (y compris antiaérienne) que n’en avait Slaviansk.
Cette ville était un symbole mais, paradoxalement, s’était un des points les moins bien préparés pour se défendre face à une agression armée qui n’a pas hésité à employer massivement l’artillerie lourde contre les civils.
D’autant que la milice n’a pas été militairement écrasée sur la poche de Slaviansk-Kramatorsk, elle s’est repliée vers des positions mieux défendables.
Porochenko et toute la clique putschiste qui pensaient écraser les défenseurs de Slaviansk dans leur réduit en sont pour leurs frais.

Reste à savoir ce que vont devenir les civils de l’agglomération de 100.000 habitants avant la guerre. Les comptes-rendus et les témoignages qui nous parviennent sont déjà alarmants.
Hors d’Ukraine, plus de 400.000 personnes (dont près de 160.000 dans des camps de première urgence) se sont réfugiées pour fuir la politique criminelle de Kiev depuis le coup d’Etat de février.
 Ils sont en Crimée, dans la région de Rostov-sur-le-Don, en Biélorussie, dans la région de Moscou, et même dans des pays de l’Union européenne chez des parents ou des amis.
 Ils craignaient pour leur sécurité, pour leur vie et celle des leurs.
Au regard de ce qu’il se passe ce soir à Slaviansk et Kramatorsk, on ne peut pas leur donner tort.
 
Slaviansk et Kramatorsk sous la botte
Un détachement de la 95e brigade aéromobile sur la route de Slaviansk
A l’heure actuelle Slaviansk est totalement isolée du reste du monde.
Dans la nuit, ce qui semblait être de la part des forces gouvernementales une manœuvre d’encerclement s’est achevé au petit matin.
Semenovka et Mykolaivka ont été particulièrement atteintes par les salves de l’artillerie ukrainienne tout au long de la nuit, un vrai déluge de fer et de feu.
 Une soixantaine de pièces d’artillerie de moyen et de gros calibre (120, 122, 152), de même qu’une vingtaine de lance-roquettes multiples allant du 122 (Grad) au 300 mm (Smerch) en passant par le 220 (Uragan), étaient positionnées tout autour de la poche de résistance.
Depuis 5 jours, cette artillerie déversait un déluge de projectiles essentiellement destiné à éliminer les civils et détruire les infrastructures.
Le colonel Strelkov, qui estimait pouvoir tenir encore une à deux semaines dans ces conditions, a brusquement décidé d’un repli sur Lugansk, Gorlivka et Donetsk.
 Ses forces risquaient l’anéantissement par manque de munitions et de carburant.
De plus, résister encore à l’intérieur de l’agglomération aurait immanquablement mené à un massacre généralisé des civils. C’est en fait ce que Kiev espérait.
 
 


 Batterie gouvernementale de 122 D-30 tirant sur la population de Slaviansk : pas de pitié pour les civils !
La percée en force ce matin des défenseurs de Slaviansk a laissé des traces : ici un BMD-2 d’une compagnie de la 25e brigade de parachutistes (sous commandement de la 95e brigade) a été détruit.
Kramatorsk, légèrement plus au sud, a été elle aussi évacuée par la milice du Donbass.
 Les troupes gouvernementales ont pris une agglomération vide de combattants.
 Elles vont donc se venger sur la population.
Arsen Avakov, le ministre de l’Intérieur de la junte, affirmait ce matin détenir une cinquantaine de prisonniers du secteur de Slaviansk.
 Information invérifiable et sujette à caution, Avakov étant un habitué de la désinformation, des mensonges et des annonces bidons
Ce matin, une grande partie du bataillon indépendantiste qui défendait Slaviansk a entamé un repli stratégique à la fois vers Kramatorsk (puis vers Donetsk, via Gorlivka) au sud et vers Lugansk à l’est.
 La poche de Slaviansk n’était donc pas totalement verrouillée par les forces gouvernementales.
 Entre 8h00 et 9h00 (heure locale), des mouvements de troupes, incluant les automoteurs Nona, ont été constatés par un certain nombre d’habitants.
 Deux colonnes ont été formées  : l’une constituée d’au moins 20 véhicules blindés, l’autre avec plus de 200 véhicules légers comme des camions et des bus. Une partie des blindés, dont deux Nona et des BMP-2, est arrivée à Lugansk en fin de matinée, une autre colonne à Donetsk (voir les vidéos ci-dessous).
 Il est possible que les deux grosses colonnes de départ se soient scindées en plusieurs convois plus petits.
 

 
 

 

 
 Sur le côté des véhicules, les miliciens ont inscrit, non sans humour : « Na Kiev » (à Kiev !) A l’évidence, le moral est bon…

En milieu d’après-midi, on annonçait que Slaviansk était « tombée ».
Sur les 110.000 habitants que compte normalement l’agglomération, la moitié ont déjà fuit les violents combats qui ont touché la ville depuis deux mois.
Porochenko a exigé de faire aussitôt hisser le drapeau ukrainien sur l’hôtel de ville et le ministre de l’Intérieur, Avakov, a ordonné à ses paramilitaires de « nettoyer » la ville, avec tout ce que cela sous-entend comme exactions et autres massacres.
 
Tactique à la Kutuzov

Le colonel Igor Strelkov a réussi à dégager ses forces de Slaviansk, percer les lignes ukrainiennes (ou profiter d’une des nombreuses failles du dispositif adverse) puis faire mouvement dans l’ordre sans pertes importantes.
 Une manœuvre audacieuse qui semble être hors de portée des forces gouvernementales : parce qu’à 10 contre 1, prendre une ville moyenne seulement une fois qu’elle a été évacuée par plus de 80% de ses défenseurs, au bout de 3 mois de siège, c’est le comble de l’incompétence militaire.
 Strelkov est sans doute un des chefs de guerre les plus capables de ces dernières années.
Par cette redisposition, le commandant en chef des forces du Donbass, Igor Strelkov, espère gagner du temps, puisque les forces de Kiev devront forcément se redéployer, notamment en moyens d’artillerie, la tactique de la junte étant basée essentiellement sur les pilonnages intensifs de zones urbaines pour toucher des civils et détruire les habitations.
 Le temps imparti pourrait être utilisé efficacement pour une réorganisation plus cohérente de l’ensemble du système défensif de la Nouvelle Russie, tout en améliorant la qualité des voies de communication, d’approvisionnement militaire, en tout premier lieu en armements lourds (artillerie, blindés…).
Le général Mikhail Kutuzov en son temps savait que battre en retraite pouvait aussi amener tôt ou tard à la victoire.
Le colonel Strelkov, grand spécialiste en histoire militaire, sait aussi qu’à l’été 1941 le retrait soviétique fit croire à l’agresseur hitlérien que la partie était gagnée…
A Artemovsk (44 km au sud-est de Slaviansk), cette nuit, un détachement gouvernemental a été pris sous le feu de la milice.
 Le bâtiment qui faisait office de QG des indépendantistes a été incendié.
Cette tentative de percer au centre du dispositif indépendantiste aura été vaine.

Le pont de Yampol détruit par les forces du Donbass

A Mykolaivka, en plus des éléments de la 95e brigade aéromobile, une compagnie du « Bataillon Donbass » de la garde nationale vient d’être engagée.
 Composée pour l’essentiel d’activistes néonazis de Praviy Sektor, cette unité du ministère de l’Intérieur est chargée de « nettoyer » la bourgade une fois que toutes les forces du Donbass en auront été chassées.
Les défenseurs de la bourgade étaient estimés entre 300 et 400 combattants avant le retrait de ce matin.
 Sur Slaviansk, il ne restait plus qu’un millier de volontaires qui avaient choisi de se maintenir sur place pour tenter de protéger la population. En ce moment, ils sont dans la nature.
 

La milice de Slaviansk n’est pas partie dans dire un dernier au revoir à ses assaillants : le point de contrôle de Novoselivka a encore été l’objet cette nuit encore d’une attaque.
 Situé au nord-ouest immédiat de Krasny Liman, il était censé sécuriser une partie des axes de ravitaillement des forces gouvernementales au nord de la poche.
La nuit précédente, des salves de mortiers de 120 Nona avaient sérieusement endommagé 2 BMP-2 (dont un détruit).
 Bilan pour les troupes kieviennes : 7 tués, 6 blessés. Aucune perte du côté indépendantiste.
 

 
De plus, cette nuit, de 23h30 à 01h00 (heure locale), les positions gouvernementales sur le mont Karachun ont subi une attaque au mortier, suivi d’un assaut en règle d’une position sur la route de Slaviansk à Kramatorsk.
 Un char et trois véhicules blindés ont été mis hors de combat, un soldat est mort et quatre autres ont été blessés.
 Deux véhicules de combat d’infanterie ont été endommagés.
Visiblement Strelkov préparait son coup puisque c’est notamment par cette route qu’une des deux colonnes se sont extirpées de la poche quelques heures plus tard.
 
Lugansk et Donetsk, points de résistance


Sur Lugansk, nous l’avons écrit, la résistance est nettement plus organisée question logistique et moyens de combat.
 D’ailleurs, les unités combattantes se composent de plusieurs bataillons (bataillons « Rus » et « Zarya » notamment), à au moins 3 compagnies chacun.
Ces dernières 48 heures, sur le secteur nord de Lugansk, là où Kiev entend bien percer pour prendre la ville, environ 130 militaires, paramilitaires et agents de sécurité (Spetsnaz du SBU) ukrainiens ont été soit tués, soit sérieusement blessés au point de devoir être évacués.
 En outre, lors des combats, sept véhicules blindés de type BTR, BMP (photo) ou BRDM, au moins deux obusiers de 122 D-30, deux sections de mortiers, un système anti-aérien (modèle non précisé, sans doute un ZU-23/2 sur camion) et cinq véhicules légers ont été détruits.
A noter qu’un Il-76, ravitaillant par parachutage les éléments de l’armée et de la garde nationale encerclés sur le site de l’aéroport, aurait été touché par des tirs.
 Aujourd’hui, lors de pilonnages d’artillerie sur l’agglomération, une personne a été tuée et 13 autres ont été blessées, dont un enfant.
 

 
T-64BV Bulat à un point de contrôle de la milice à Lugansk
 
A une vingtaine de kilomètres au nord-ouest de Lugansk, la milice a fait sauter un pont sur la Siverskiy Donets, au sud du village de Trokhizbenka.
 Il permettait de faire passer une partie du ravitaillement des forces kieviennes engagées au nord de Lugansk.
A Donetsk, les forces gouvernementales s’attendent à un nouvel assaut des indépendantistes sur la zone aéroportuaire, transformée en une sorte de no man’s land depuis mai.
Les renforts tant en hommes aguerris qu’en véhicules blindés et moyens d’appui qui viennent d’arriver de la poche de Slaviansk vont permettre très rapidement une nouvelle opération sur cette zone.
A Donetsk, toujours, une partie de la population commence à partir de la ville, en direction de l’est, de la Russie.
 L’annonce de la perte de Slaviansk et Kramatorsk ce matin semble avoir créé un vent de panique auprès des civils qui craignent que les forces gouvernementales fassent subir à la capitale du Donbass le même sort que Slaviansk.
On notera qu’à chaque fois que des civils partent, ce n’est jamais en direction de Kiev ou de l’ouest ukrainien.
Le peuple du Donbass sait parfaitement d’où vient la haine et qui l’instrumentalise contre lui.
 
La purification ethnique à l’américaine

Le fameux plan de nettoyage ethnique, partiellement présenté par des représentants du gouvernement putschiste et dont des éléments ont déjà fuité dans la presse kievienne, a été imaginé par des experts américains de la RAND Corporation, un think tank lié au lobby militaro-industriel US très influencé par les néo-conservateurs.
A noter que parmi les anciens politiciens recrutés par ce groupe de réflexion, il y a un attrait remarqué pour les anciens secrétaires d’Etat à la Défense et les ex-responsables de la sécurité nationale, tels que Harold Brown, Donald Rumsfeld, Frank Carlucci, ou Zbigniew Brzezinski.

Ce dernier est le théoricien géopolitique le plus russophobe qui soit actuellement, il est notamment le promoteur de l’encerclement de la Russie, le « Containment ».

Ce document comprend trois étapes concernant « l’action punitive » dans l’est de l’Ukraine contre les populations civiles.
 L’élimination physique ou la capture des membres et des sympathisants civils des forces indépendantistes ; la création de camps de concentration dits de « filtration » pour les quelque 7 millions de civils du Donbass ; la spoliation des biens des habitants de la région au profit des paramilitaires et militaires ukrainiens ayant participé à l’opération « antiterroriste » ; de même que la mise en place de la loi martiale dans les territoires de l’est, de septembre 2014 à janvier 2015.

 C’est le plus grand plan de purification ethnique entrepris depuis la Seconde Guerre mondiale.

On croirait même la copie actualisée du « General Plan Ost » du IIIe Reich appliqué aux « territoires de l’Est » lors de l’Opération Barbarossa.
 Pourtant Alfred Rosenberg n’a jamais été membre de la Rand Co… mais il en a manifestement inspiré certaines idées.
Les ministres des Affaires étrangères d’Allemagne, de Russie et de France ont appelé Kiev à se conformer aux accords concernant le rétablissement du cessez-le-feu à l’issue de la rencontre à Berlin le 2 juin.
Pour Berlin, Paris et Moscou il fallait que Kiev rétablisse le contact avec l’est du pays au plus tard le 5 juillet.
Les Européens ne se sont pourtant pas montrés très enthousiastes.

 Ils ont très bien vu qu’après le rapport du ministre ukrainien des Affaires étrangers sur la rencontre à Berlin, Porochenko a immédiatement appelé le vice-président américain Joe Biden « pour consultations ».

 Et ce, avant même une réunion du Conseil de sécurité nationale de l’Ukraine.
 Porochenko, et avant lui le président « par intérim » Turtchinov, ne décidaient rien sans un entretien téléphonique avec Washington.

Dans l’Ukraine « proeuropéenne », c’est Obama qui décide de tout !
 
Il semblerait que les Américains aient assez de mal à comprendre que l’Union européenne (et l’ensemble du continent européen) a besoin d’un Etat stable du point de vue économique et politique et non d’un territoire où règne une forme de « chaos géré », dans un contexte où les Etats-Unis ont choisi de rompre avec la Russie et que les relations entre Moscou et Washington sont, de fait, entrées dans une phase de confrontation.

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